TOKYO - En 2016, Jennifer Abel était revenue des Jeux de Rio embarrassée après ses deux quatrièmes places, ce qui avait entraîné une certaine crise d'identité chez elle. Visiblement, la leçon qu'elle en a tirée a depuis porté ses fruits.

La plongeuse de 29 ans ne reviendra pas de Tokyo avec sa médaille olympique individuelle tant souhaitée. Et si elle était animée d'émotions mitigées après avoir terminé au huitième rang de la finale au tremplin de 3 mètres des Jeux olympiques, elle a préféré s'attarder sur le « grand portrait » de sa carrière.

 

« Ce dont je suis la plus fière, c'est que j'ai terminé la compétition avec le sourire. C'est quelque chose que je n'aurais jamais fait auparavant. »

Abel, sérieuse aspirante à la troisième marche du podium derrière les intouchables chinoises, avait montré beaucoup de constance en préliminaires et en demi-finales les deux jours précédents. Il n'a fallu qu'une erreur sur son troisième plongeon, un double périlleux et demi renversé, pour venir tout gâcher.

Elle a manqué de hauteur sur son appel, ce qui a compromis son entrée à l'eau. Limitée à 39,00 points, elle a glissé de la 3e à la 9e place. partir de là, de son propre aveu, elle avait besoin d'un miracle pour espérer un podium.

« Cette grosse erreur m'a coûté toute chance de médaille, » a-t-elle reconnu.

« Ce plongeon m'a hantée toute ma vie. On a tous une bête noire en plongeon, et moi c'est celui-là. »

Elle s'expliquait pourtant mal ce faux pas puisque, bien que nerveuse, elle se sentait bien sur la planche avant de l'exécuter.

« C'est un de mes meilleurs départs en carrière pour ce plongeon. Je suis une fille qui anticipe beaucoup les choses. J'étais confiante, je n'ai pas hésité dans mon départ. Mais j'ai peut-être trop analysé la situation au lieu de me laisser aller naturellement comme à mes quatre autres plongeons. »

Sans grande surprise, la Chinoise Shi Tingmao a conservé son titre olympique et permis à la Chine de poursuivre sa mainmise sur la discipline. En avance dès son premier plongeon, elle n'a jamais été inquiétée et a devancé sa coéquipière Wang Han, par 34,75 points.

Les plongeuses chinoises dominent l'épreuve sans partage depuis les Jeux de Séoul en 1988. La dernière athlète ne provenant pas de l'Empire du Milieu à monter sur la plus haute marche du podium est Sylvie Bernier à Los Angeles en 1984.

Tingmao a tout raflé sur le tremplin lors de tous les grands rendez-vous internationaux depuis 2015, s'adjugeant l'or à chaque fois dans les épreuves individuelle et synchro aux Jeux olympiques et aux Championnats du monde.

L'Américaine Krystal Palmer, très en confiance tout au long de la finale, a hérité de la médaille de bronze.

Retour à la maison

Même si ses chances de podium étaient très minces, Abel a démontré une belle force de caractère à ses deux derniers essais.

« J'aurais pu abandonner et tourner la page. Mais je ne l'ai pas fait. Je voulais revenir en force et finir avec deux bons plongeons. C'est ce que j'ai fait. »

Sans chercher d'excuse ou de faux-fuyants, Abel ne pouvait que reconnaître que les 16 derniers mois n'ont pas été faciles à gérer avec la pandémie de COVID-19, le report des Jeux et la difficulté de s'entraîner ou de disputer des compétitions.

« Ça fait un an et demi que nous n'avons pas vraiment compétitionné et que nous vivons avec la menace toujours présente de l'annulation des Jeux à la dernière minute. Et là, on nous met comme ça aux Jeux olympiques. Je suis une fille très proche de mes émotions, surtout quand je plonge. J'ai plongé avec mon coeur depuis le début des Jeux, même si ce n'était pas toujours évident. »

« Je suis venue ici en me disant que je voulais être prête physiquement et mentalement. Ce que j'ai fait. J'ai offert trois belles performances depuis les préliminaires. Malheureusement, j'en ai manqué un. J'aurais préféré le rater en préliminaires ou en demi-finales. »

Quant à savoir si elle a effectué son dernier plongeon, dimanche, au Centre aquatique de Tokyo, il est encore trop pour le dire.

« J'ai fini 8e, donc je me suis qualifiée pour les Séries mondiales cet automne. Je n'ai encore pas pris ma décision, c'est tout frais. »

Pour l'instant, il lui importe de rentrer au plus vite chez elle pour se ressourcer.

« Ça fait six semaines que je suis partie de la maison. Je ne suis jamais partie aussi longtemps. J'ai vraiment hâte de rentrer et d'être dans mes affaires »

Abel peut au moins se consoler à l'idée que cette fois, elle reviendra de Tokyo avec une médaille. La semaine dernière, elle a remporté l'argent, au 3 mètres synchro avec Mélissa Citrini-Beaulieu.

Elle avait aussi obtenu une médaille de bronze en synchro avec Émilie Heymans aux Jeux de Londres en 2012.

Pamela Ware, de Greenfield Park, l'autre Canadienne inscrite dans cette épreuve, a été éliminée samedi en demi-finale.