MONTRÉAL - Les Jeux olympiques de Tokyo doivent s'ouvrir le 23 juillet 2021, soit dans moins de sept mois si tout va comme prévu. Mais cette fois, une grande partie de ce que nous connaissons des Jeux olympiques a changé.

« Ça risque d'être une expérience des Jeux complètement différente, convient le psychologue sportif Bruno Ouellet. Une saison sans compétition, ça va jouer sur la qualité de la préparation. »

Il explique que normalement, l'année qui précède les Jeux permet à plusieurs de tester les lieux des installations olympiques.

« Ça ne veut pas dire que les athlètes ne seront pas capables de performer à un très haut niveau, mais on ne peut pas avoir une approche rigide. » Selon lui, l'équipe de soutien va jouer un rôle majeur et doit préparer l'athlète à toutes les éventualités.

« C'est encore possible que les Jeux n'aient pas lieu », note-t-il.

Dans ces circonstances, comment les athlètes se préparent-ils à vivre Noël et les quelques mois qui restent avant le début des Jeux de Tokyo? Nous leur avons posé la question. Voici quatre espoirs olympiques canadiens.

Mathea Olin veut réaliser un rêve

Le surf fera son entrée officielle aux Jeux olympiques en 2021, et Mathea Olin est prête à entrer dans la vague. À 17 ans à peine, Mathea est un phénomène. Celle qui a grandi au large des côtes de la Colombie-Britannique, à Tofino, a raflé les deux premières médailles du Canada à l'international en surf _ l'or et le bronze _ lors des Jeux panaméricains à Lima au Pérou en 2017.

L'annulation des compétitions en raison de la pandémie a été un coup dur pour la jeune athlète. « Quand tu passes autant de temps dans l'eau à améliorer tes performances, que tu t'entraînes chaque jour au gym et que tu vois ta progression, c'est sûr que c'est décevant », souligne-t-elle, tout en disant profiter de ce temps pour se rapprocher de sa famille.

Elle poursuit aussi ses études à distance, même si « ce n'est pas toujours évident d'apprendre la chimie par soi-même », souligne-t-elle en riant.

L'espoir olympique aura 18 ans au moment où le surf fera ses débuts à Tokyo. Ces derniers temps, elle devait s'entraîner sur les plages d'Hawaï et bien que plusieurs incertitudes planent encore quant à la logistique des entraînements, Mathea garde deux objectifs en tête : se qualifier pour les Jeux et finir son secondaire.

Joseph Polossifakis renoue avec le plaisir de faire du sport

L'escrimeur québécois Joseph Polossifakis va tenter de se qualifier pour ses deuxièmes Jeux olympiques à Tokyo après avoir pris le 23e rang aux Jeux olympiques de Rio, en 2016.

Le Montréalais a vu le premier confinement comme une opportunité d'essayer différentes choses: il a appris l'espagnol, il a passé plus de temps à cuisiner et s'est même mis au Pilates. Ce qui lui a permis de « recharger ses batteries et de retrouver le plaisir de faire du sport », confie-t-il.

Après plusieurs mois d'entraînements improvisés à faire du vélo, de la course et à bouger par tous les moyens possibles _ notamment avec l'aide de nombreuses vidéos glanées sur le web_ il s'estime heureux d'avoir à nouveau accès aux installations du Stade olympique malgré les plages horaires très strictes.

« Je le vois tellement comme un privilège que les athlètes puissent encore s'entraîner surtout en étant conscient que la plupart des gens n'ont plus accès au gym. »

Et comment prévoit-il fêter Noël ? « Je vais rester ici et me détendre. Je veux garder la forme et la santé alors c'est ce qui compte », répond-il avec sagesse. Sa prochaine compétition aura lieu en mars et il tient à être prêt pour les qualifications.

La cycliste Karol-Ann Canuel s'entraîne en Europe

La cycliste professionnelle originaire d'Amos, Karol-Ann Canuel, fera partie de l'équipe canadienne féminine à Tokyo. L'espoir de médaille au contre-la-montre féminin est fébrile à l'idée de revivre l'expérience des Jeux olympiques après ceux de Rio, d'autant plus que ce sera son premier voyage au Japon.

La dernière année l'a amenée à changer ses plans à maintes reprises et « c'était plus difficile », admet-elle. Karol-Ann a depuis décidé de s'installer en Espagne où elle s'entraîne et a retrouvé une certaine routine.

Son copain est aussi venu la rejoindre. « Ça fait une source de stress en moins, souligne-t-elle. J'y vais une journée à la fois maintenant. »

La résidente de Gatineau célèbre habituellement le temps des Fêtes au Québec, mais elle ne verra malheureusement pas sa famille cette année. « Ce sera pour une prochaine fois », dit-elle, résignée, en visioconférence.

Même si son entourage sera restreint, elle s'estime chanceuse, car elle vit avec un autre couple québécois et a donc pu se créer un semblant de bulle familiale loin de la maison.

Emily Batty apprend à pédaler sans pression

Emily Batty a vu la médaille de bronze, en vélo de montagne, lui échapper de peu à Rio. « C'est quelque chose qui me tenaille depuis », évoque-t-elle en entrevue téléphonique. C'est aussi ce qui la motive à s'entraîner encore plus fort afin de monter sur le podium des Jeux de Tokyo en juillet.

Elle a tout misé pour atteindre une forme optimale avant que la COVID-19 ne fasse voler ses plans en éclat. « En février, j'étais indéniablement là où je voulais être, j'avais travaillé fort et j'étais vraiment prête pour les qualifications », raconte-t-elle.

De nature optimiste, elle s'est ressaisie rapidement après avoir appris que les Jeux seraient reportés. Les compétitions étant également annulées, ce temps d'arrêt lui a permis de faire du vélo, non pour atteindre un temps précis ou des buts prédéterminés, mais pour le simple plaisir d'en faire.

En novembre dernier, elle a entrepris un périple à bicyclette en Islande avec son entraîneur des seize dernières années, qui est aussi son mari. « Les athlètes sont habitués à respecter un programme, explique-t-elle. Ce qui peut conduire à l'épuisement. Là, j'avais l'occasion de pouvoir pédaler sans pression. »

Elle en est encore à peaufiner ses plans pour l'hiver. Le but est de se rendre en Californie ou en Georgie, où elle pourra dévaler les pistes jusqu'à 15 heures par jour. Pour l'heure, ce qui est confirmé à l'agenda est un arrêt à Victoria, en Colombie-Britannique, pour le mois de janvier.