Il semble que ce soit maintenant la norme avant le début de chaque Jeux olympiques. Les prédictions les plus pessimistes viennent de partout, on invoque le retard sur les travaux, on craint la cohue sur les routes, on doute des mesures de sécurité, on anticipe les refoulements aux aéroports…

Sotchi aura vécu tout cela et à bien plus grande dose encore par rapport à Vancouver et Londres, en tout cas. Jusqu’à la cérémonie d’ouverture, on aura entendu ou lu quantité de commentaires qui frôlaient parfois l’apocalypse. Mais alors, quel est donc le bilan, quelques heures après la conclusion des Jeux d’hiver de 2014? Selon moi, et à la lumière de mes expériences passées et des nombreux témoignages recueillis auprès de mes collègues, ce fut tout simplement un événement sans faille! Sotchi a réussi à organiser des Jeux sécuritaires, encadrés au maximum, des Jeux qui se sont déroulés avec la rigueur et la précision d’une montre suisse tout en gardant, malgré tout, un visage humain et accueillant pour nous.

Bien sûr, le fait que le cœur des activités ait été concentré sur un tout petit territoire a grandement facilité les choses, à tous les points de vue. Le Parc olympique regroupait tous les sports intérieurs, le grand stade, le centre de presse, le centre de diffusion ainsi qu’un des principaux hôtels et il était beaucoup plus facile de favoriser un haut niveau de sécurité ainsi que la célérité des déplacements. Les autres hôtels, dont le nôtre, étaient aussi tous près du centre nerveux et on pouvait généralement atteindre notre lieu de travail en une quinzaine de minutes tout au plus.

Mais cela n’enlève rien à la qualité du plan global d’opérations. Quotidiennement, on pouvait passer les formalités de sécurité en un clin d’oeil, même si tout était passé au peigne fin. L’autobus TM5, que nous utilisions entre l’hôtel Azimut 3 et le Parc olympique, apparaissait au plus toutes les 10 minutes, presque 24 heures par jour! Même chose pour les autres circuits. Il était aussi facile de marcher d’un site à l’autre ou de monter à bord de la navette qui faisait la boucle à partir du centre de presse.

Et à en juger par le flot continu et ordonné de spectateurs qui allaient et venaient d’une compétition à l’autre sans le moindre indice de problèmes quelconques, on pourrait porter, sans se tromper, le même jugement positif du point de vue de ceux qui payaient très cher leurs billets pour assister aux différentes compétitions.

Les bénévoles d’abord

Cela m’avait frappé à Montréal en 1976 et n’a jamais cessé de me fasciner depuis. Malgré tout l’argent qu’on injecte pour la tenue des Jeux olympiques, malgré tous les gens qui sont embauchés et payés pour faire un travail quelconque au sein du comité organisateur, malgré les services auxquels on est en droit de s’attendre en payant notre chambre d’hôtel ou notre repas au restaurant, malgré les militaires et/ou policiers qui sont en devoir partout autour de nous, le cœur et l’âme des Jeux, ce sont tous ces bénévoles que nous croisons partout sur notre route, à chaque instant de notre travail, au quotidien.

Malgré une barrière linguistique évidente, qui n’existait pas à Vancouver ni à Londres du point de vue de l’anglais à tout le moins, la très grande majorité de ces femmes et hommes rencontrés sur notre chemin n’avaient qu’une chose à cœur : nous aider à trouver une solution au moindre problème. En baragouinant un mot en russe ou en anglais ou par le bon vieux langage des signes, on finissait toujours par se faire comprendre. Et si la personne en place n’avait pas la réponse à notre question, elle se faisait un devoir de contacter son supérieur ou un collègue pour l’obtenir.

Des bénévoles à SotchiIl n’y a pas plus bel exemple de ce dont je parle que lors de notre départ de Sotchi, samedi matin. Il était autour de 5 heures, nous étions un groupe fort imposant qui attendait l’ouverture des guichets pour s’enregistrer vers Francfort. À partir du début du processus, il y eut une certaine confusion quant aux frais de bagages excédentaires à payer et quant au cheminement des valises jusqu’à Montréal et je fus l’un des « heureux élus » à tomber dans le dédale des procédures. On m’obligea à traverser l’aéroport au complet pour aller régler ma note en personne à un guichet de perception, ce que nous pouvons faire directement au comptoir ou même en ligne avant le départ avec la plupart des compagnies aériennes! Voyant mon irritation, une gentille dame portant l’ensemble bleu des bénévoles vint à ma rencontre. Dans un anglais plus que rudimentaire, elle m’offrit de m’accompagner et de m’aider dans la démarche. Elle discuta avec une employée d’Aéroflot pendant une bonne vingtaine de minutes, sans trop que je sache quel était le problème. Elle souriait et me disait de ne pas m’en faire, qu’elle allait tout régler pour moi. Ce qu’elle fit, du reste.

Elle me raccompagna ensuite vers la zone de sécurité, en m’expliquant son histoire, du mieux qu’elle le pouvait. Elle s’appelait Svetlana, elle venait d’une banlieue de Moscou et depuis toujours, elle rêvait de vivre de près les Jeux olympiques. Elle s’inscrit donc comme bénévole et suivit un cours d’anglais pour être en mesure de se voir confier le poste. Elle m’expliqua comment elle était heureuse d’avoir été choisie et comment elle était triste de nous voir quitter et de voir les Jeux tirer à leur fin. « Games, very good for us, don’t want end », me dit-elle avec sincérité.

Je lui tendis la main en guise d’appréciation en lui disant qu’elle venait de faire quelque chose de très spécial pour moi. Elle était heureuse de m’avoir aidé. Son geste, comme des milliers d’autres, représente la vraie magie des Jeux olympiques.

Merci Svetlana. Merci Igor. Merci Valentina. Merci Mikhaïl.

Spasiba Sotchi!