On ne va pas se raconter d’histoires: cette victoire canadienne face au Zimbabwe ne restera pas dans les résultats marquants de la sélection. Le succès était attendu face à l’équipe la plus faible du tournoi olympique et le résultat (3-1) demeure somme toute modeste, essentiellement parce que les Canadiennes ont nettement levé le pied et été moins mordantes en deuxième mi-temps. Gestion tranquille d’un match plié après 45 minutes (3-0).

C’est à cette première mi-temps que l’on doit s’intéresser. Le Canada a entamé sa rencontre comme il fallait, mettant une grosse pression sur l’adversaire, archi-dominant au milieu et allant provoquer beaucoup d’approximations et de fautes techniques dans une défense fébrile et trop souvent incapable de s’aligner. Le succès des Canadiennes dans cette première mi-temps repose sur trois éléments: la domination du milieu de terrain, permettant de jouer haut, d’attaquer en nombre et de forcer l’adversaire à reculer; la capacité à varier les attaques et surtout à mettre plusieurs joueuses différentes en situation; la discipline nécessaire pour utiliser les faiblesses de l’adversaire.

Un milieu libéré et dominant

La présence de Schmidt à la base du milieu de terrain a été un premier point gagnant. Désirée Scott n’a pas démérité lors du premier match, mais les circonstances (expulsion rapide de Zadorsky, domination australienne au milieu) l’ont amené à jouer un rôle plus conservateur. Schmidt est un peu plus proactive dans le gain du ballon et l’impulsion vers l’avant. Son rôle de couverture permet en outre de pousser Fleming et Matheson vers l’avant. Et ces deux-là vont permettre de multiplier les pistes offensives. Le Canada a vite su jouer au-delà ou à travers le rideau défensif du Zimbabwe et surtout en variant les appels. C’est ainsi que Matheson se retrouve la joueuse la plus avancée pour gagner son penalty. C’est ainsi que Mahteson, de nouveau, ou encore Fleming vont se retrouver plusieurs fois derrière la défense, tout comme Beckie, Sinclair ou Tancredi, sans oublier les apports essentiels de Lawrence et Bélanger, les deux latérales clairement attachées à des rôles ultra-offensifs, là encore en se lançant derrière la défense.

C’est l’essentiel du jeu canadien en première mi-temps, empêchant l’adversaire de s’organiser et le contenant à de longues balles pour tenter d’exploiter (sans grande réussite) la vitesse de ses attaquantes.

Sinclair toujours décisive

Il est tout de même fondamental de souligner l’apport incessant de Sinclair au développement du jeu canadien. Par le passé, elle ne se signalait pas particulièrement par son bagage technique. Une formidable joueuse de surface, remarquablement puissante et particulièrement douée dans l’anticipation et la finition. Aujourd’hui, elle a toujours ce sens du placement, mais le met au service de la création plutôt que de la finition. Elle se libère pour offrir des solutions de jeu, possède une couverture de balle solide et enchaîne les gestes techniques de qualité. C’est l’un de ceux-là qui amène le premier but. Un geste qui lui permet d’effacer deux adversaires et de se donner le temps de jouer face au but et de voir l’appel de Beckie devant le but. Ce n’est pas tant la fluidité du geste qui marque, mais toute l’autorité, la certitude, dont il est empreint. La finition de Beckie est un peu plus compliquée (en deux temps), mais on lui donnera le crédit d’avoir su réagir rapidement et d’être idéalement placée (deux éléments qui lui permettront de marquer le troisième sur un centre idéal de Bélanger).

La gestion du match aura permis à John Herdman de donner du temps de jeu à Chapman, Rose et Prince, toutes les joueuses canadiennes ayant maintenant eu du temps de jeu après deux rencontres. Même D’Angelo, choisie dans les buts plutôt que Labbé - n’aura pas eu grand-chose à faire, mais n’aura pas rassuré sur sa sortie inutile qui amène le but zimbabwéen.

Buchanan suspendue... un « moindre mal »

L’autre facteur « positif » est que même les coups du sort (les « faits de jeu ») semblent offrir aux Canadiennes une porte de sortie, une atténuation du problème. Au premier match, l’expulsion de Zadorsky. Bien gérée (Quinn a plutôt bien pris la relève). Elle sera de retour contre l’Allemagne, son absence n’aura été vécue que contre le Zimbabwe, un match où elle n’était pas vraiment indispensable. Deuxième facteur intéressant, l’absence de Buchanan pour le dernier match de groupe face à l’Allemagne… Oui!

Buchanan prend un deuxième carton jaune en deux matches, pour une faute totalement inutile (volontairement pas à distance sur un coup franc quand elle mène 3-0...). Elle est donc suspendue pour le prochain match. Or, ce prochain match n’est pas un à gagner à tout prix pour le Canada.

Merci à Saskia Bartusiak d’avoir égalisé pour l’Allemagne à la toute fin de leur match contre l’Australie (2-2). Un résultat qui qualifie le Canada pour les quarts. Qui lui garantit au moins une seconde place. Qui lui permet de viser la première de son groupe.

Pas besoins de battre l’Allemagne

Est-ce vraiment essentiel? Même avec une défaite face aux Allemandes, les Canadiennes finiront deuxièmes. Dans cette optique, elles joueraient leur quart face au deuxième du Groupe E - Suède ou Chine. En battant l’Allemagne et finissant premières, elles joueraient le deuxième du Groupe G, certainement la France (battue par les États-Unis, 1-0). Il me semble que la première option est sans doute plus favorable que la deuxième... L’absence de Buchanan surviendrait ainsi pour un match moins important que le quart de finale de vendredi prochain. Au bout du compte, un nul face aux Allemandes serait idéal: se garder un match « moins compliqué » en quart, tout en allant chercher une base de satisfaction, d’assurance et d’expérience face aux Allemandes (leur 2-2 contre l’Australie doit aussi remettre en perspective la victoire des Canadiennes sur les Matildas lors du premier match).

Le fondamental de ce tournoi olympique va être la récupération. Trois matches de groupe, mercredi - samedi - mardi. Suivis d’un quart le vendredi. Quatre matches en moins de dix jours. Quand tu sais que tu es qualifié pour les quarts, mieux vaut reposer les joueuses lors du troisième match.

Les Canadiennes se retrouvent donc où elles voulaient idéalement être avant la compétition. Qualifiées après deux matches. Avec un choix de jeu, et de sélection, ouvert et compréhensible pour le dernier match. Au bout du compte, tout va assez bien pour les Canadiennes. Elles n’ont pas souvent eu autant d’assurances dans un tournoi que cette année (qualifiées, totalement maîtresses de la suite de leur parcours après deux matches). Si elles ne s’endorment pas dessus, elles peuvent nous offrir les mêmes émotions qu’il y a quatre ans. C’est maintenant un objectif à viser.