OTTAWA - Les athlètes canadiens qui participeront aux Jeux Olympiques cet été à Pékin porteront des uniformes faits en grande partie en Chine. Les protestations des syndicats du vêtement et des politiciens n'y changeront rien.

La Compagnie de la Baie d'Hudson soutient qu'elle a fait de son mieux mais qu'il était impossible de faire produire au Canada tous les vêtements et accessoires requis par l'équipe olympique, qui compte plusieurs centaines de personnes.

La porte-parole de l'entreprise, Hillary Marshall, a souligné que la collection présentée jeudi aux médias était "écologique". Beaucoup de morceaux seront faits de bambou, de coton biologique et de cocona, un textile technologique dérivé de l'écorce de noix de coco.

"Ces textiles ne sont tout simplement pas disponibles au Canada", a-t-elle déclaré, en entrevue à La Presse Canadienne.

D'après elle, il aurait en outre été difficile de manufacturer au pays suffisamment de vêtements pour répondre aux besoins des athlètes ainsi qu'aux désirs des supporters, qui pourront se procurer certains éléments chez La Baie.

Le Comité olympique canadien (COC), qui a commandé les vêtements, se dit "très heureux et très satisfait" de la collection, en dépit de la controverse qu'elle a suscitée.

Les matériaux sélectionnés assureront le confort des athlètes en dépit du taux d'humidité très élevé à Pékin en été, a fait valoir la responsable des communications, Sylvie Bigras.

Le COC a toutefois insisté pour que les deux morceaux les plus importants de l'uniforme - le manteau de la cérémonie d'ouverture et celui que porteront les médaillés sur le podium - soient faits au Canada.

"Ce sont les vêtements les plus évidents. La cérémonie va être vue pas plusieurs millions de personnes", a souligné Mme Bigras.

En plus de fabriquer les uniformes, la Compagnie de la Baie d'Hudson remplit les caisses du COC à qui elle a promis de donner plus de 20 millions $ en sept ans, grâce à des tournois de golf et à des courses commanditées, entre autres.

Les partis d'opposition à Ottawa continuent néanmoins à dire que le Canada a raté une belle occasion de mettre en valeur son industrie du vêtement, mise à mal par la concurrence asiatique et la vigueur du dollar canadien.

Le libéral Denis Coderre va jusqu'à dire qu'il s'agit d'une "gaffe", qui démontre le manque de sensibilité des conservateurs envers les travailleurs qui craignent pour leur emploi. Plusieurs usines de vêtement ont fermé au cours des dernières années au Québec.

La plus récente à lancer la serviette est celle de Golden Brands, à Montréal, où quelque 600 personnes fabriquaient des complets pour les magasins Moores.

"S'il y a un événement où le symbolisme est extrêmement important, c'est les Olympiques, a souligné M. Coderre vendredi. On aurait pu profiter de l'occasion pour envoyer un message pour nos propres produits manufacturiers. Mais on ne l'a pas fait."

Le leader parlementaire du Bloc québécois, Pierre Paquette, voit dans cette affaire une autre manifestation du "laissez-faire" des conservateurs.

"Il faut se rappeler qu'il y a toujours à peu près 45 000 emplois dans la région de Montréal dans le vêtement. Évidemment si le gouvernement fédéral est complètement désintéressé de donner un petit coup de pouce à ce secteur-là, il est clair que les jours sont sombres", a-t-il conclu.

Une controverse semblable avait éclaté à la veille en 2006 à la veille des Jeux de Turin en Italie. La Compagnie de la Baie d'Hudson était déjà le fournisseur de l'équipe olympique à l'époque.

Selon Hillary Marshall, les comparaisons sont toutefois boiteuses. Les vêtements des athlètes avaient été fabriqués au Canada. Seuls ceux destinés au grand public avaient été manufacturés en Chine.

La Compagnie de la Baie d'Hudson se dit prêt à travailler de concert avec des fabricants canadiens en prévision des jeux d'hiver de Vancouver, en 2010.

Vendredi soir, le porte-parole de la secrétaire d'Etat aux Sports Helena Guergis, Blair MacLean, a indiqué que la ministre "regrette la décision du Comité olympique canadien de produire ces vêtements à l'étranger". M. MacLean a souligné que le COC "est un comité indépendant" et que la ministre "aurait préféré" que les uniformes des athlètes de l'équipe olympique canadienne qui participeront au Jeux de Pékin soient fabriqués au Canada.