MONTRÉAL - Bafoué par le comité organisateur local, le fait français a néanmoins été au centre des succès remportés par le Canada aux Jeux olympiques d'hiver de Vancouver.

Pas moins de sept des 14 médailles d'or décrochées par l'équipe olympique canadienne, en février dernier, ont été l'oeuvre d'athlètes du Québec - en tout ou en partie, dans les épreuves individuelles et en équipe.

Ces 14 victoires ont non seulement permis au Canada de rafler le plus grand nombre de médailles d'or parmi les pays en lice aux JO de 2010, mais aussi d'établir une nouvelle marque à des Jeux d'hiver à ce chapitre.

Par ailleurs, 13 des 26 podiums décrochés par le Canada avaient une saveur à fleur de lys, si on inclut les Québécoises d'adoption Jennifer Heil et Clara Hughes. Celles-ci ont contribué aux totaux de sept médailles d'argent et cinq de bronze.

Le Canada a ainsi récolté le meilleur total de médailles de son histoire à des Jeux d'hiver.

Ce sont là des résultats sans doute attribuables au programme Équipe Québec, instauré par le gouvernement provincial bien avant que le fédéral ne mette sur pied « À nous le podium » spécifiquement pour les Jeux de Vancouver... et peut-être pas pour les JO suivants.

Médailles mémorables

Plusieurs des médailles d'or les plus mémorables ont été remportées par des Québécois.

Il y a évidemment eu celle du skieur acrobatique Alexandre Bilodeau aux bosses. Celui-ci est devenu le premier athlète de l'histoire du Canada à accéder à la première marche du podium lors de JO disputés en sol canadien. Bilodeau est vite devenu la coqueluche de bien des Canadiens, entichés par la joie sans bornes de son frère handicapé Frédéric.

Il aura donc fallu attendre trois Jeux pour vivre cette première. Le Canada avait été limité à cinq médailles d'argent et six de bronze lors des Jeux d'été de Montréal, en 1976, puis à deux d'argent et trois de bronze pendant les Jeux d'hiver de Calgary, en 1988.

Il y a aussi eu les deux médailles d'or récoltées le même jour par le patineur de vitesse courte piste Charles Hamelin au 500 m, ainsi qu'au relais 5000 m en compagnie de son frère François, de Guillaume Bastille, d'Olivier Jean et de François-Louis Tremblay.

Ç'a permis de racheter l'amère déception vécue au 1000 m, alors que les frères Hamelin ont occupé les avant-postes de l'épreuve avant de terminer quatrième et cinquième d'une finale qui comptait... cinq concurrents.

Et ç'a donné lieu au baiser d'amoureux le plus médiatisé des Jeux, entre Charles Hamelin et Marianne St-Gelais, gagnante de l'argent au 500 m féminin.

Il y a également eu l'or décroché par Jasey-Jay Anderson au slalom géant en parallèle. L'athlète en surf des neiges a ainsi accédé, à l'âge de 34 ans, à un podium olympique pour la première fois de sa carrière, à sa quatrième et dernière participation aux Jeux.

On pourrait aussi inclure à ce tableau la médaille d'or que Sidney Crosby, un Québécois honoraire à cause de son passage avec l'Océanic de Rimouski dans la LHJMQ, a procuré au Canada lors de la toute dernière journée.

Performances émouvantes

Il y a aussi eu des médailles d'autres couleurs qui valaient leur pesant d'or.

À commencer par celle de bronze de Joannie Rochette en patinage artistique, récoltée quelques jours seulement après le décès subit de sa mère Thérèse, 55 ans.

Le contexte lui a valu un capital de sympathie qui faisait écho aux Jeux d'été de 1992, à Barcelone, quand Sylvie Fréchette avait participé aux JO malgré le suicide de son fiancé Sylvain Lake.

Pas étonnant que la patineuse de 24 ans ait été choisie porte-drapeau en vue de la cérémonie de clôture.

Il y a également eu la médaille de bronze de Clara Hughes, porte-drapeau de la cérémonie d'ouverture, lors du 5000 m en patinage de vitesse longue piste. Cette médaille à ses derniers Jeux d'hiver a permis à l'athlète de 37 ans de se retrouver avec un total de six en carrière, un sommet pour un athlète du Canada à égalité avec la patineuse de vitesse Cindy Klassen. Hughes sera des JO de Londres en 2012, alors qu'elle effectuera un retour au cyclisme.

Bémols

Si les athlètes québécois ont brillé aux Jeux de Vancouver, ç'a été moins brillant en ce qui concerne la place qu'on a accordé à la langue française.

Dans les mois menant aux Jeux, plusieurs plaintes ont été déposées auprès du commissaire canadien aux langues officielles, Graham Fraser, notamment par la Société Saint-Jean-Baptiste. Le COVAN tardait à tenir sa promesse de donner au bilinguisme la place qui lui revenait dans ses activités et ses communications.

Le fait français a obtenu si peu de place à la cérémonie d'ouverture que même le premier ministre du Québec, Jean Charest, s'est joint au lot de critiques.

Le comité organisateur, qui avait pourtant eu la sage idée d'inviter plusieurs athlètes pour allumer la vasque, n'a pas trouvé le moyen d'y inclure Gaétan Boucher aux côtés des Rick Hansen, Catriona Le May Doan, Steve Nash, Nancy Greene et Wayne Gretzky.

À quelques heures de la cérémonie, Boucher, le premier grand olympien de l'histoire canadienne avec quatre médailles, avait exprimé son regret qu'on ne lui ait pas donné la chance de faire « l'une des seules choses que je n'ai jamais faites aux Jeux olympiques ».

Reste que tout cela n'a pas réussi à gâcher « nos » Jeux.

Ce qui est venu bien près de le faire, par contre, c'est le décès du lugeur géorgien de 21 ans Nodar Kumaritashvili, quelques heures avant la cérémonie d'ouverture.

De même que le temps doux. Celui-ci a notamment chamboulé le calendrier du ski alpin à Whistler, et obligé le comité organisateur à prendre des mesures extraordinaires (fermeture hâtive, transport massif de neige) à Cypress Moutain, lieu des épreuves de ski acrobatique et de surf des neiges.