Dans une série de trois reportages qui seront diffusés à RDS au cours des prochains jours, Stéphane Leroux nous apprend que deux joueurs sur trois comptent sur les services d'un agent au niveau junior.

Permettez-moi de vous raconter la situation que j'ai vécue en tant que joueur dans la LHJMQ, avant d'avoir été repêché dans la LNH, il y a 15 ans. Vous comprendrez par la suite que mon opinion sera émise tout au long de ma chronique.

Lorsque j'ai été repêché dans la LHJMQ, je n'avais pas d'agent. Ce n'était pas important pour moi. J'avais le support de mes parents, même s'ils n'étaient pas impliqués dans le monde du hockey. J'ai été sélectionné en fin de quatrième ronde par les Saguenéens de Chicoutimi. Lorsque je me suis présenté, ça s'est bien passé. Je me suis bien comporté sur la glace, même si je n'étais pas le gardien de but numéro un. En raison de mes performances, mon nom a commencé à circuler. Après la période des Fêtes, j'ai commencé à rencontrer des équipes de la LNH.

Environ un mois avant le repêchage qui avait lieu cette année-là à Edmonton, Robert Sauvé est devenu mon agent - il l'a été tout au long de ma carrière. Avant de faire mon choix, j'avais rencontré beaucoup de monde et je m'étais fait achaler par plusieurs agents. Au cours de ma carrière junior, mon discours avait toujours été le même : ne me dérangez pas! Je me concentrais à jouer au hockey pendant la saison. Je n'avais pas besoin d'agent au niveau novice, j'en avais pas plus besoin au niveau junior! Je faisais confiance à mes entraîneurs pour mon travail sur la glace, non pas aux agents qui me sollicitaient. Lorsque la saison était terminée, j'étais conscient - dû au fait que je serais possiblement sélectionné lors des trois premières rondes - que les services d'un agent devenaient nécessaires, en raison des contrats, des négociations, ainsi que des jeux de coulisses.

J'ai donc rencontré quelques agents; mangé au restaurant avec un, parlé au téléphone avec l'autre, reçu de la visite chez mes parents. Ce qui était important pour moi, c'était surtout au niveau de la négociation des choses que je ne connaissais pas. En d'autres mots, je jouais au hockey et quelqu'un s'occupait du côté légal ainsi que des choses qui pouvaient devenir une distraction pour moi.

L'expérience et la réputation des agents jouent pour beaucoup, quand vient le temps de faire un choix. Dans mon cas, mon agent avait comme client Patrick Roy, Jocelyn Thibault, Jean-Sébastien Giguère. Du côté des joueurs, Vincent Damphousse, Michel Goulet, Denis Savard avaient fait partie de ce groupe.

Le rôle des parents et la relation joueur/agent

Évidemment, les parents ont un rôle très important à jouer dans le processus. Les jeunes sont sollicités parfois au niveau Pee-Wee, mais surtout Bantam, Midget espoir et Midget AAA, alors ça commence à un très jeune âge.

Je n'ai rien contre le fait que les jeunes soient bien encadrés, mais les jeunes doivent prendre leurs responsabilités.

J'avais une responsabilité en tant que joueur de hockey, c'est donc pour cette raison que j'ai engagé un agent. C'est important d'utiliser le mot "engagé", parce qu'il ne faut pas oublier que ce sont les joueurs qui paient le salaire de ces agents. Ce sont nous qui sommes les patrons de ces individus. À 99,9%, je dirais que j'ai toujours suivi les conseils de mon groupe d'agents, mais c'est que j'avais vraiment confiance en eux et qu'en retour, je pense qu'ils avaient confiance en moi. J'ai toujours pris les décisions finales. C'est important de comprendre le rôle « employé-employeur » parce que souvent, ce n'est pas de cette façon que les jeunes et les parents voient cette situation.

Chose certaine, les performances sur la patinoire dictent en premier lieu la situation.

Je côtoie les jeunes et parfois, ils semblent oublier à quel point les joueurs de hockey ont des responsabilités. En quittant souvent le domicile familial à un très jeune âge, c'est leur responsabilité de trouver les meilleurs endroits possible pour s'entraîner. Souvent, les jeunes se déchargent de ces responsabilités qui leur appartiennent et ne voient que la facilité que les agents leur offrent sur un plateau d'argent.

Je n'ai aucune idée de la raison exacte pour laquelle j'ai été repêché en première ronde dans la LNH par l'Avalanche du Colorado. Par contre, mon agent m'a facilité la vie, en particulier lorsqu'est venu le temps de gérer mon horaire avant de rencontrer les différents directeurs généraux et dépisteurs des équipes avant la date officielle du repêchage.

Par la suite, je ne me suis jamais mêlé des négociations de contrats. Avec toutes les lois fiscales qui régissent, lorsqu'on vit aux États-Unis ou dans une autre province, c'est certain que les agents jouent un très grand rôle.

Si on prend connaissance de la relation que j'ai eue avec mon agent, que j'ai appréciée et que je recommanderais à des jeunes, vous comprendrez évidemment que je trouve qu'il y a trop d'agents qui gravitent autour des joueurs au niveau junior. J'ai vécu une belle expérience, je n'ai rien de négatif à dire contre les agents et ce, même si j'en ai entendu des vertes et des pas mûres.

Je connais personnellement des joueurs qui ont changé d'agent en espérant améliorer leur situation. Au hockey professionnel, je suis d'accord avec la situation, mais au niveau junior, on devrait surtout concentrer nos efforts aux bons endroits. À partir de là, les décisions devront être prises, à savoir si on poursuit sa carrière en Europe ou dans les circuits mineurs professionnels.

Quelques pistes de solutions

Comme mentionné plus tôt, les joueurs sont approchés très, lire trop rapidement. Je ne sais pas comment on pourrait appliquer une législation. Dans la NCAA, il y a des règlements qui empêchent les joueurs d'avoir un agent, mais des conseillers familiaux, par exemple, jouent un peu ce rôle. Vous constaterez qu'il y aura toujours des moyens de contourner les règles. Je le répète, ça prend une bonne présence parentale ainsi qu'un bon éveil d'esprit de la part des parents ainsi que des jeunes.

Je ne veux pas me faire un critique social, mais je trouve qu'on déresponsabilise les jeunes alors que c'est le contraire qui devrait se passer. Il faudra se positionner sur l'avenir de notre hockey.

Cela dit, je pense que la solution se retrouve au niveau de la ligue. Un joueur de 16 et 17 ans devrait gagner 35$ par semaine. Un joueur de 18 ans, 40$. Je peux affirmer que des joueurs touchent beaucoup plus que 35 $ par semaine.

Le seul argent que j'ai fait au niveau junior, c'est à la suite de ma première signature professionnelle avec l'Avalanche du Colorado alors que j'ai obtenu un boni à la signature.

Les principaux changements en 15 ans

Le nombre d'agents a grandi de façon astronomique depuis les 15 dernières années. À l'époque, certaines personnes rencontrées m'ont fait miroiter des choses, mais jamais rien de concret ne m'a été offert. Je ne suis pas un propriétaire d'une équipe au niveau junior majeur, mais je trouve que le chantage est allé trop loin. Est-ce que c'est parce que certaines équipes se sont mises d'accord pour accorder certains montants ou certaines conditions à certains joueurs? Ou est-ce que ce sont certains agents qui ont poussé l'enveloppe un peu loin? Je n'ai pas la réponse. Mais je sais que j'ai évolué pendant trois ans dans la LHJMQ et j'ai gagné 30$, 35$ et 40$ par semaine.

Même si les agents disent que ce n'est pas vrai, je peux confirmer que certains vont payer des cours de « power skating », des entraînements, des cellulaires et je ne trouve pas ça acceptable. C'est un cadeau de jouer dans la LHJMQ, c'est un tremplin vers un niveau supérieur. C'est la prochaine étape qui sera payante pour tout le monde si jamais le joueur s'y rend.

C'est là qu'il faudrait concentrer nos efforts, plutôt que de refiler la facture à des équipes juniors, des jeunes, des parents ou des agents. On devrait peut-être se calmer.

L'agent est important au niveau professionnel, alors qu'au niveau junior, ça reste une expérience de vie incroyable pour des joueurs qui sont, pour la plupart, des adolescents. Un encadrement adéquat est important, mais, selon moi, un ménage s'impose!

En terminant, c'est avec plaisir que je vous invite à visiter le site Internet de ma fondation pour enfants au http://www.fondationmarcdenis.org.

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Propos recueillis par Luc Dansereau