Disputer 142 matchs, marquer 87 buts et amasser 95 passes sans écoper de la moindre minute de punition. Impossible dites-vous? Faites connaissance avec Zach O'Brien, du Titan d'Acadie-Bathurst.

À sa troisième et dernière campagne dans la LHJMQ, l'attaquant de 20 ans n'a toujours pas réchauffé le banc de punition, autant en saison régulière qu'en séries éliminatoires.

« J'ai du mal à me souvenir de ma dernière pénalité », admet O'Brien en entrevue au RDS.ca.

« Je crois que c'était en 2009, alors que je participais au Championnat du monde des moins de 17 ans à titre de membre de l'équipe Atlantique. C'était pour avoir donné de la bande », se souvient-il finalement après une hésitation de quelques secondes.

Le secret d'une telle discipline? « Je joue intelligemment », explique-t-il tout simplement.

« C'est difficile à comprendre », concède quant à lui l'entraîneur-chef du Titan, Éric Dubois.

« Il ne se met jamais dans une position où il se verrait forcé d'accrocher ou de faire trébucher. Il patine et trouve toujours une autre façon de s'emparer de la rondelle. Même coincé dans une cabine téléphonique, il sortirait tout de même avec le disque », image le pilote.

Inutile également de tenter de déconcentrer O'Brien. Les équipes adverses en savent quelque chose. « On le picosse et on le picosse encore, mais il ne réplique jamais. Je n'ai jamais dirigé de joueur aussi discipliné au cours de ma carrière d'entraîneur », assure Dubois.

Seul marqueur de 50 buts (51) la saison dernière dans la LHJMQ, O'Brien n'est en effet pas du genre à déroger de sa mission première.

« Sachant que je n'ai jamais écopé de minutes punition, certains joueurs des équipes adverses tentent régulièrement de me faire sortir de mes gonds. Jamais je ne réplique », signale O'Brien, qui est originaire de Terre-Neuve.

« C'est bien le dernier joueur de mon équipe que l'on peut déranger après un arrêt de jeu », confirme Dubois.

Si aucune minute de punition ne figure à son dossier, O'Brien le doit aussi aux officiels.

« C'est rendu à un point tel que les arbitres ont peut-être peur de lui décerner un premier 2 minutes en carrière! », rigole Dubois. Ce dernier se rappelle d'un match face aux Wildcats de Moncton en fin de saison l'an dernier.

« Il méritait sans l'ombre d'un doute une pénalité. À son retour au banc, ses coéquipiers ne se sont d'ailleurs pas privés pour se moquer gentiment de lui. "Téteux! Même les arbitres ne veulent pas te donner un 2", lui ont lancé plusieurs. Les officiels ferment peut-être un peu les yeux », opine Dubois.

Avec la collaboration ou non des arbitres, O'Brien ne s'est pas fixé comme objectif de terminer sa carrière junior sans pénalité. « Un jour ou l'autre, je serai pénalisé », anticipe-t-il.

Et le plus tôt sera le mieux.

Un boulet?

Si une telle discipline relève de l'exploit, O'Brien ne semble pas en tirer de fierté.

« Je me demande parfois si ce ne serait pas mieux d'être pénalisé et d'en finir une fois pour toutes. On risque d'en parler beaucoup à ce moment, mais je pourrai enfin tourner la page par la suite », révèle O'Brien, qui n'en est pas à sa première entrevue à ce sujet.

Quelques minutes de punitions ne nuiraient effectivement pas à O'Brien, qui aspire à une carrière professionnelle.

« L'an dernier, un dépisteur m'a questionné à son sujet. Puisque Zach ne présentait pas un excellent différentiel (moins-2) et n'avait écopé d'aucune punition, il remettait en doute son implication physique », raconte Dubois.

« Zach en était d'ailleurs un peu gêné l'an dernier. Les gars l'agaçaient un peu et il n'aimait pas ça. De plus, je suis sûr qu'il a eu écho des questionnements au sujet de son implication physique. Même son père m'a déjà indiqué que ce serait bien pour Zach d'amasser quelques minutes de punition », renchérit Dubois.

En attendant que cela se concrétise, O'Brien n'entend pas pécher inutilement.

« Je n'aborde pas chaque rencontre en me disant que je n'écoperai pas de pénalité. Ça arrivera quand ça arrivera. En espérant que ce ne sera pas lors d'un moment critique d'un match de série », espère O'Brien.

Meilleur pointeur des siens avec huit buts et huit mentions d'aide, O'Brien compte pour l'instant faire ce qu'il fait de mieux, compter.

«C'est une locomotive. C'est le genre de joueur qui peut traîner toute une équipe », observe Dubois.

Quand la porte du cachot s'ouvrira finalement devant O'Brien, personne ne lui en tiendra donc rigueur.

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