Le procès d’Oscar Pistorius a commencé le 3 mars dernier, lequel était initialement fixé jusqu’au 20 mars 2014. Or, la Cour n'a entendu à ce jour que 18 témoins sur 107 et par conséquent, le procès pourrait être prolongé jusqu’au 16 mai prochain.

Comme Pistorius a admis avoir tué Reeva Steenkamp, la question en litige est de déterminer s’il a agi volontairement ou accidentellement. Pour ce faire, il faut notamment se demander pourquoi Pistorius n'a pas vérifié si Reeva était bien couchée avant de tirer et pourquoi l’a-t-il fait sachant que la loi lui interdisait de tirer sur tout individu n’étant pas directement menaçant.

Quoi qu’il en soit, les dernières semaines du procès ont dressé un portrait peu flatteur de l’athlète paralympique : un homme craignant continuellement pour sa sécurité, un homme jaloux, un homme dépensier, mais surtout un homme amateur d'armes à feu. Toutefois, Pistorius s’est montré vulnérable lors de la présentation de la preuve, notamment en refusant de voir les photos prises après le meurtre et en vomissant lorsque la poursuite détaillait la mort de Reeva.

Nonobstant les trois accusations pour avoir contrevenu aux lois relatives au port d'armes en Afrique du Sud, l’accusation pour meurtre prémédité est celle qui nous intéresse. Un meurtre avec préméditation exige non seulement une intention de tuer, mais aussi la planification de tuer. En droit criminel, pour qu’un accusé soit reconnu coupable, il doit avoir commis un acte illégal en plus d’avoir l’état d’esprit nécessaire pour commettre cet acte.

Ainsi, la juge du procès ne pourra déclarer Pistorius coupable de meurtre au premier degré que si elle est convaincue hors de tout doute raisonnable qu'il avait l'intention de tuer Reeva et que ce meurtre a été commis avec préméditation. Ici, la préméditation se définit tel un projet bien arrêté et dont la teneur et les conséquences ont été soupesés et évalués. Mais encore faut-il établir que Pistorius considère, par ses propos délibérés, qu'il avait planifié ce meurtre.

De son côté, la poursuite fera notamment valoir que l'acte était prévu et prémédité puisque Pistorius avait, entre autres, mis ses prothèses jambières avant de marcher vers la salle de bain et tiré quatre coups de feu mortels. Or, si la poursuite n’est pas en mesure d’établir que Pistorius a commis un meurtre prémédité, rien empêche qu’il pourrait être trouvé coupable d’une infraction moindre, tel un meurtre au deuxième degré ou un homicide involontaire coupable qui ne nécessitent pas la préméditation, l’intention et la planification de tuer.

Selon la loi sud-africaine, si Pistorius est trouvé coupable d’un meurtre prémédité, il sera passible d’une peine à perpétuité obligatoire alors que pour un meurtre au deuxième degré, il sera condamné à une peine obligatoire de 15 ans.

Certes, les avocats de la défense plaideront probablement l’homicide involontaire coupable avec usage d’une arme à feu dont la peine est laissée à la discrétion du tribunal. 

C’est la juge Thokozile Matilda Masipa qui préside actuellement le procès, laquelle a une réputation de rendre des jugements sévères, notamment dans des dossiers relatifs à la violence contre les femmes.

Il importe cependant de mentionner que contrairement au Canada, l’Afrique du Sud ne dispose pas de jury populaire. En effet, le système canadien prévoit le droit à un procès devant jury à l’article 11f) de la Charte canadienne des droits et libertés.

Cela dit, les procès sans jury ne sont pas forcément une mauvaise chose en ce que les jurys rendent parfois des décisions inattendues ou inhabituelles. Ils peuvent également être influencés par l'opinion publique ou être potentiellement distraits par la célébrité de l'accusé. De telle sorte qu'un juge est plus susceptible de se concentrer sur les faits en litige et de rendre une décision sur cette base tout en assurant un résultat juste.

Quant à la défense, Pistorius devra faire valoir que la fusillade était un accident en misant sur les contradictions et les incohérences dans les déclarations faites par les témoins à la police et lors du procès, mais aussi en produisant des expertises balistiques. Au cours des derniers jours d’audience, la défense a pointé du doigt les manquements des enquêteurs, lesquels ont notamment sali les lieux, manié sans gants l'arme du crime et volé la montre de l’accusé. Bref, les avocats de Pistorius devront rendre la version de l'athlète plausible pour semer un doute raisonnable dans l’esprit de la juge Masipa.

Ainsi, l'avenir de Pistorius repose sur la décision d'une seule juge qui déterminera s’il s’agit d’une préméditation ou d’un accident, mais d’ici là, seule la preuve nous le révèlera.


11 f) « tout inculpé a droit à, sauf s’il s’agit d’une infraction relevant de la justice militaire, de bénéficier d’un procès avec jury lorsque la peine maximale prévue pour l’infraction dont il est accusé est un emprisonnement de cinq ans ou une peine plus grave »