Humoristes vs lutteurs, qui sont les meilleurs « entertainers »? Qui domine la scène du divertissement? Il fut un temps où les gladiateurs n'auraient fait qu'une bouchée des fous du roi. Mais depuis que la lutte professionnelle est maintenant connue comme étant du divertissement sportif, le débat tient la route. Autre temps autres mœurs. Martin Vachon ou Jay Phenomenom? Gabrielle Caron ou Mary Lee Rose? Humoriste ou lutteur? Ce sont les questions que la soirée HumourMania tentait de répondre samedi dernier à l'Église du Toit Rouge dans le cadre du Zoofest.

C'est dans une salle chaude et humide, devant un public en feu, venu en très grand nombre se replonger dans leurs souvenirs les plus primitifs d'un lointain amour pour la lutte professionnelle que les humoristes de la relève et les lutteurs de la NCW ont offert une soirée des plus mémorables.

La finale de la soirée a vu le lutteur Samson battre l'humoriste ayant le plus d'expérience comme lutteur, Richardson Zéphir alias Bubba le Viking, dans ce qui fut le seul triomphe des lutteurs.

C'est d'ailleurs Zéphir qui a eu l'idée de présenter ce genre de spectacle.

« Avec HumourMania, je voulais faire un gala vraiment axé sur la lutte, avec humoristes versus lutteurs, au lieu de juste humoristes, pour amener la compétition à un autre niveau parce que là on est encadré par des professionnels », explique Zéphir, l'initiateur du projet, qui avait déjà lutté dans une dizaine de combats pour la défunte organisation WIF, un mélange de lutte et d'improvisation.

Zéphir n'était cependant pas le seul à avoir une idée reliant la lutte et l'humour.

« Frank Grenier et moi, on voulait faire un show sur la lutte. Alors quand on a su que Rich avait eu une idée sur la même thématique, on a travaillé ça ensemble. On avait des chums à la NCW qui ont accepté de nous donner des cours, qui ont embarqué là-dedans et qui ont été très généreux de leur temps », explique Martin Vachon, l'un des humoristes que l'on peut voir régulièrement aux show de la NCW.

Vachon fut d'ailleurs impliqué dans ce qui fut sans contredit le match de la soirée impliquant les humoristes, celui opposant les lutteurs Jay Phenomenom et Dirty Buxx Belmar au duo composé de Frank Grenier et de Vachon.

« C'est vraiment comme un rêve de ti-cul qui s'est réalisé. J'étais comme Hulk Hogan dans ma tête! », s'est exclamé Vachon, alias Marty Freedom, rencontré après le gala.

« Le show d'une vie. Un rêve de p'tit gars qui s'est réalisé », abonde dans le même sens Grenier, alias Franky Justice.

Korine Côté vs Mary Lee Rose, un échange assez « bitch »
Si la lutte était le principal focus du gala, l'un des moments forts de la soirée fut l'échange verbal entre l'humoriste Korine Côté et la lutteuse Mary Lee Rose.

« Saviez-vous que le mot lutteuse en grec ça veut dire grosse lesbienne?!? », de dire une Korine Côté très arrogante.

C'est alors que la lutteuse Mary Lee Rose arrive au ring pour répliquer et défendre la confrérie de la lutte.

« Toi, savais-tu qu'humoriste en ancien grec ça veut dire p'tite conne qui veut en manger une tabarnack?!! », ligne qui a valu à Rose (Cynthia Cournoyer), l'une des plus grosses réactions de la soirée.

C'en est suivi un début d'escarmouche entre les deux et au moment où Rose avait le dessus, c'est l'humoriste Gabrielle Caron qui s'est amenée au ring, dans ce qui deviendra un match handicap, deux contre un.

« Mon rôle était vraiment d'être là comme humoriste et que je mange une volée pour que Gabrielle embarque. Fallait donc que je sorte cette ligne là pour me faire péter la gueule! », raconte Korine, expliquant aussi pourquoi Gabrielle a lutté plus qu'elle dans le combat.

Dans un combat spécial, un gauntlet match, c'est-à-dire un match où deux lutteurs débutent et le gagnant demeure dans le ring pour en affronter un autre, la victoire est allé à « La Merveille d'Hochelag » Martin Malette. Ce match a aussi vu les performances du lutteur Alextrême qui a défait tour à tour Jérémie Larouche (le sosie du chanteur Mika) habillé uniquement d'un g-string avec des bretelles, les Pic Bois déguisés comme Paul Bearer et l'Undertaker et François Boulianne avant de baisser pavillon devant Malette qui aura tout de même eu besoin d'une chaise pour parvenir à ses fins.

« J'en avais fait au secondaire, mais c'est jamais pareil comme quand ce sont des professionnels qui te le montrent », de dire François Boulianne, alias Franky Fancy Pants à propos de sa performance.

« Le but est de puncher, que ce soit dans la face ou avec les mots! »
Le premier match de la soirée à quant à lui opposer deux lutteurs de la NCW, deux des meilleurs dans leur catégorie, Surfer Mitch Thompson et Travis Toxic. Les deux y sont allés d'une incroyable performance. Un réel « spot fest » comme on l'appelle dans le jargon de la lutte, mais en même temps, avec cette foule endiablée qui contrairement à une foule normale n'était aucunement blasée de voir ces prouesses athlétiques, ce fut l'un des meilleurs matchs de l'année en 2012.

« Faut que tu commences fort pour attirer l'attention, c'est ce qu'on a fait avec Mitch et Toxic qui ont vraiment épaté tout le monde. Ça a mit la table pour tout le reste. Chaque match a son rôle comme chaque partie d'un texte a son rôle », explique Grenier, faisant référence aux similitudes entre la lutte et le métier d'humoriste.

« Le but est de puncher, que ce soit dans la face ou avec des mots! Le but est le même, c'est de faire réagir la foule », retient Korine Côté, qui a eu une ovation debout récemment au gala de Juste Pour Rire animé par Mike Ward avec son numéro sur les Mac.

Maintenant qu'ils ont performé non pas sur une scène mais dans un ring, qu'est-ce qui fut le plus éprouvant pour les humoristes?

« Les lendemains!, affirme sans faire de blagues Gabrielle Caron. C'est vraiment très exigeant. Une claque c'est une claque, quand tu tombes sur le dos, tu tombes sur le dos, même s'il y a une technique, mais avec l'adrénaline tu le sens pas, c'est le lendemain… »

Martin Vachon réfute d'ailleurs une conception que bien des gens ont.

« Tu tombes à terre, tu reçois des claques pour vrai, tout le monde pense qui pourrait faire de la lutte, mais c'est pas vrai. Après les premiers cours, y en plein qui ont voulu lâcher, parce que t'as mal à la tête, tu tombes sur le bas du dos. »

« L'humour fait pas mal en général et on est moins fatigué après un show habituellement, ajoute Grenier. J'ai jamais préparé un numéro d'humour autant. La lutte c'est le côté athlétique, mental, performance, divertissement, y a mille volets… »

HumourMania II?
Animé par l'humoriste Simon Delisle, alors que le tandem Jean-François Kelly et Olivier Martineau étaient aux commandes du show comme commentateurs, est-ce qu'il y a une chance qu'une deuxième édition d'HumourMania voit le jour?

« On veut faire ça à chaque 6 mois, mais les prochains qu'on veut faire, ça devrait être différent, humoristes vs humoristes, lutteur/humoriste vs lutteur/humoriste », révèle Grenier.

« HumourMania au Zoofest devrait être un peu comme notre Wrestlemania », confirme Zéphir.

Pour se faire, il faut que le Zoofest, les humoristes et la NCW désirent embarquer dans l'aventure une fois de plus et ça ne semble pas être un problème pour personne.

« Le Zoofest a embarqué tout de suite, j'avais pas fini ma phrase qu'ils avaient accepté. Le Zoofest va dans tout ce qui est humour, chant, théâtre, y vont explorer toute les formes d'arts et de divertissements. », explique Zéphir, laissant présager que l'an prochain devrait être qu'une formalité.

Tout les humoristes qui ont été rencontrés sont unanimes; ils ont eu du fun et rembarquerait là-dedans à pieds joints.

Même son de cloche du côté de la NCW, alors que le président Benjamin Tull, alias Jay Phenomenom, a écrit ceci sur sa page Facebook.

« Je suis vraiment fier de tous les humoristes qui se sont donnés à 100% et tous les lutteurs qui ont été super patients et dévoués!! Ce genre de projet nous prouve que lorsque nous unissons nos forces on peut arriver à quelque chose de très spécial!! Merci encore et j'ai l'impression que l'aventure ne fait que commencer!! »

Sans l'ombre d'un doute, il y aura eu trois gagnants samedi dernier. Les humoristes de la relève, pour la plupart, ont vécu un rêve d'enfance et ont très bien paru. Les lutteurs de la NCW ont eu la chance de performer devant un public complètement différent de celui qu'ils sont habitués. Et finalement les fans présents, qui nous rappelaient les bons vieux fans de lutte des années 80 réagissant à un tout et à un rien, ont eu une soirée à la hauteur de leurs attentes.

« L'ambiance était inespérée, on aurait eu la moitié de ça qu'on aurait été content. Mission accomplie! », conclut fièrement Grenier.

Humoristes ou lutteurs? Un fanatique de statistiques vous dirait que le compte final fut Humoristes : 3 Lutteurs : 1. Mais ça n'a aucune réelle importance. Le débat demeure entier, car c'est HumourMania qui a vu son bras être levé par l'arbitre à la fin du match.

Vivement HumourMania II.
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Notes en rafale…
-Gabrielle Caron en a impressionné plus d'un avec ses prouesses dans le ring, au point qu'on lui a suggéré de pousser plus loin l'aventure de la lutte. Si le temps lui permet, elle ne dit pas non.

-Le meilleur arbitre au Québec, Bakais, s'est occupé de tous les matchs sauf deux, alors que l'humoriste fanatique aussi de UFC, Alexandre Douville, a très bien fait dans le Gauntlet match et Vanessa Guilbault de la NCW a fait celui des filles.

-J'ai bien aimé que les Grenier, Vachon, Zéphir prennent le temps de se faire faire des costumes de lutte, ce qu'on ne voit même pas toujours dans certaines organisations de lutte.

-Dans ce qui sera ma dernière « crack » sur la lutte québécoise, plusieurs humoristes ont mieux fait que bien des lutteurs que j'ai vus dans les 11 dernières années. J'ai d'ailleurs vu plusieurs shows de moins bonne qualité que celui-ci.

-Dominic Massicotte des Pic Bois, déguisé en Paul Bearer, était d'une ressemblance inouïe, autant au niveau du déguisement que de la façon d'agir. C'était vraiment quelque chose à voir.

-La pancarte qu'un amateur avait amenée et qui disait « L'humour c'est du fake » m'a bien fait rire!

-Olivier Martineau a sorti de très bons one-liners aux commentaires.

Durant le match de filles…« On se croirait chez Ardène au Boxing Day! »

Sur les pantalons ¾ d'Alex Douville…« On sait pas si ce sont des shorts trop longues ou des pantalons trop courts! »

-Faute de temps, Yanick De Martino et les Nanas Coustiques n'ont pu participer au projet finalement. Peut-être une prochaine fois…

-Plusieurs humoristes sont venus encourager leur confrères et consoeurs. Notons la présence de Benoit Lefebvre, Martin Perizzolo, François Bellefeuille, Stéphane Fallu et même de la directrice de l'école nationale de l'humour, Louise Richer.

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Le livre sur l'histoire de la lutte professionnelle au Québec, intitulé « Mad Dogs, Midgets and Screw Jobs : The Untold Story of How Montreal Shaped the World of Wrestling » et écrit par Pat Laprade et Bertrand Hébert, sera disponible à compter de février 2013. Il est présentement disponible en pré commande sur au www.amazon.ca