Comme des millions d'amateurs de hockey, j'ai été témoin de la mise en échec assénée mardi au Centre Bell par Zdeno Chara sur Max Pacioretty. Les conséquences de la blessure au joueur du Canadien ne sont pas sans me rappeler un épisode de ma vie où j'ai subi une blessure semblable. Même si ma situation n'était pas totalement identique, elle était fortement comparable.

Comme Pacioretty, j'ai été victime d'une fracture au cou. Ma blessure est survenue à Saint-Lary en France lors d'un entraînement en janvier 2002, quelques semaines avant la présentation des Jeux olympiques de Salt Lake City. En réalisant mon saut, je suis parti par en avant. Puis, c'est comme si j'avais rentré mon menton dans ma poitrine et je suis tombé sur mon cou en allant vers l'avant.

J'avais subi une fracture de la vertèbre C-5 avec une fusion avec la C-6. Mon disque entre les deux vertèbres avait explosé. Pour me soigner, les médecins avaient prélevé un morceau de ma hanche et ils ont sculpté un disque identique aux autres disques qui étaient parfaits. Les docteurs l'ont inséré entre les deux vertèbres touchées avec une plaque en titanium et quatre vis pour stabiliser le tout.

Dans le cas du joueur du Canadien, la fracture se situe au niveau de la quatrième vertèbre cervicale. C'est plus haut que dans mon cas. Si Pacioretty n'a pas de problème à bouger, que sa moelle n'est pas touchée et qu'il n'a pas de perte musculaire, c'est une bonne nouvelle.

Il faut savoir qu'une fracture d'un os, ça se répare. Mais avant que ce soit vraiment solide, on parle de trois mois avec stabilisation totale. Au cours des premières semaines, ça peut bouger en raison de la fusion, mais il faut tout de même rester immobile, car il doit y avoir le moins de mouvements possible. Donc, il est hors de question de faire de l'entraînement. Ça m'avait demandé deux mois et demi avant que je puisse recommencer à faire des activités. Dans le fond, l'important était de tout faire pour éviter de chuter à nouveau. Il fallait absolument éviter les chocs.

Dans mon cas, j'ai pu recommencer à skier en touriste environ trois mois après l'accident. J'avais encore de la douleur, mais je pouvais bouger mes membres. J'avais été immobilisé durant une longue période et j'avais perdu ma masse musculaire. Après la chirurgie, j'ai dû apprendre à marcher à nouveau. C'est à ce moment que ton corps se bat pour réparer la blessure. Ça demande beaucoup d'énergie.

J'ai recommencé à faire l'entraînement intensif pour un retour à la compétition environ six mois plus tard et encore là, je faisais une journée d'entraînement et je devais me reposer pendant deux jours par la suite.

J'ai vu l'incident qui a conduit Max Pacioretty à l'hôpital. J'ai trouvé la séquence brutale. Quand j'ai pris connaissance des blessures, ça ne m'a pas replongé dans le temps parce que je n'ai pas nécessairement songé à mon propre accident.

Au niveau du cou, chaque blessure est unique. Il y a tellement de façons de subir une fracture à cet endroit qu'il a autant de programmes de remise en forme.

Je n'avais pas peur

Quand j'ai recommencé à skier, il n'y avait aucun doute dans mon esprit, aucune peur, aucune crainte. Même si au début c'était du ski léger, j'ai quand même été en mesure de faire une ligne d'une vingtaine de bosses rapidement lors de cette première journée sur les pentes. Mais dans un sport comme le hockey où tout le monde veut se frapper, la prudence est de mise.

Une grande force d'un compétiteur est d'être capable de faire abstraction des choses qui peuvent déconcentrer. C'est comme ça aux Jeux olympiques ou lors des courses. Si j'avais eu le moindre doute, je ne serais pas revenu à la compétition. C'est humain d'être craintif, mais à partir du moment où tu comprends la raison de ta peur et que tu es capable de contrôler la situation, tu dissipes les doutes.

Si Pacioretty a confiance à son état physique et s'il sait que c'est solide. Il doit y aller. Moi, on m'a expliqué qu'une fois que la fusion est complète, c'est plus solide qu'avant la fracture. C'est comme faire une soudure au milieu d'un tuyau en métal.

Je n'ai pas de conseil à lui donner, mais je peux lui dire que j'avais conservé une attitude positive et que j'ai pris le temps de bien guérir. J'ai voulu prendre un temps plus sécuritaire pour dissiper les doutes et m'assurer que je ne courais aucun risque. Quand je suis revenu à la compétition, j'étais meilleur qu'avant ma blessure. La preuve, un an après j'étais au premier rang mondial au niveau de la coupe du monde. Mais bien sûr, c'est du cas par cas et ce n'est pas le même sport. Moi, il n'y a personne qui m'étampe dans la bande tous les jours.

Je lui souhaite prompt rétablissement et je l'invite à prendre tout son temps avant de revenir au jeu.

* propos recueillis par Robert Latendresse