Vancouver, C.-B. - « Le temps est venu de passer à autre chose », a-t-elle déclaré. Entourée de ses amis, sa famille et de son équipe de soutien, la championne olympique et la championne du monde canadienne Maëlle Ricker a fait mercredi ses tristes adieux au sport de compétition qu’elle aime tant.
 
« Le snowboard m’a permis de vivre de nombreux moments inoubliables, a-t-elle déclaré. Jamais je n’oublierai tout le chemin que j’ai parcouru, le jour où je me suis attachée à ma première planche en chaussant les bottes de mon père par-dessus les miennes, car les fixations étaient trop grandes, les pentes de poudreuse sans fin de Whistler que j’ai dévalées en compagnie de mon frère Jorli, puis ma participation à la compétition de la plus importante scène sportive au monde, chez moi, aux Jeux olympiques de Vancouver. Vraiment, j’ai vécu des moments fantastiques. »
 
En effet, d’autant plus que la carrière de compétition de la résidente de Squamish n’a été rien de moins qu’exceptionnelle. Sa première participation à un événement de snowboardcross remonte à 1994. Et elle en est devenue mordue tout de suite. « J’ai eu tellement de plaisir », dit-elle. Elle a aussi gagné la compétition. Alors qu’elle n’était encore qu’une adolescente à l’époque, sa féroce nature compétitive commençait déjà à s’affirmer. En 1996-1997, durant sa première saison sur la Coupe du monde, Ricker a réussi à monter deux fois sur le podium. Elle n’avait pas encore 20 ans... et déjà Maëlle était une vedette dans le monde des sports de glisse.
 
D’un naturel décontracté lorsqu’elle n’est pas en compétition – qui détonne avec le côté quelque peu violent du snowboardcross moderne – il est difficile de comprendre où Maëlle va chercher toute sa rage de gagner lorsqu’elle prend son départ. « J’aime trouver cette place ou on est sur le bord du contrôle, dit-elle, mais on pousse ses limites quand même. »
 
Cette attitude lui a valu beaucoup de succès sur la scène internationale. En effet, elle lui a permis de remporter deux fois les X Games, de gagner deux fois le globe de cristal lors du championnat de la Coupe du monde en snowboardcross, de triompher contre toutes attentes en 2010 en devenant la première canadienne à remporter une médaille d’or, chez elle, aux Jeux olympiques, et d’empocher en 2013 la seule médaille qui manquait à sa collection, celle de championne du monde. Elle est définitivement une femme accomplie. Mais pour Maëlle, remporter des courses n’est pas tout ce qui compte.
 
« Il n’y a rien de plus excitant pour moi que de me trouver dans un environnement qui combine à la fois ma passion pour les voyages et mon amour du plein air, tout en nourrissant mon désir de prendre part à des compétitions, mentionne-t-elle. En faisant partie de l’équipe canadienne de snowboard comme athlète, mon rêve s’est réalisé. Nous avons réussi à passer à travers les longues journées d’entraînement, la douleur et les blessures, et nous avons goûté à la victoire. »
 
Elle a aussi été un formidable exemple pour les athlètes en devenir au pays, tant chez les hommes que chez les femmes. « Au cours des deux dernières décennies, Maëlle a été une inspiration pour les jeunes planchistes à travers le monde », affirme Robert Joncas, directeur de la haute performance chez Canada Snowboard. « Sa bonne humeur, sa résilience et son éthique de travail sont contagieuses... et continueront de l’être! C’est un véritable bonheur de travailler avec elle. »
 
« Maëlle est une athlète extraordinaire », affirme Marcel Mathieu, entraîneur en chef de l’équipe canadienne de snowboardcross. « Son amour du sport, son intérêt marqué pour les stratégies de ses entraîneurs, sa volonté de se surpasser lors de l’entraînement qui parfois dépasse l’entendement... cette femme sait exactement ce dont elle a besoin pour remporter la victoire le jour de la course. Notre relation s’est vraiment développée avec le temps, vous savez, alors c’est difficile pour moi de résumer cette amitié en quelques mots. Mais une chose est certaine, c’est qu’elle a fait sa place parmi les grands de ce sport! »
 
Toutefois, le snowboardcross est un sport difficile. Et il peut être extrêmement exigeant pour les athlètes. À la vitesse folle à laquelle ils dévalent les pentes, avec les acrobaties en hauteur auxquelles ils s’adonnent et les collisions violentes qu’ils absorbent semaine après semaine, il n’est pas surprenant que peu d’entre eux réussissent à ressortir indemnes d’une saison de Coupe du monde.
 
Même sur ce plan, Maëlle est unique. Elle a connu des retours légendaires après avoir subi des blessures, dont quatre opérations majeures au genou, une fracture ouverte au bras, des fractures aux côtes, des commotions. Et pourtant, rien n’a réussi à mettre un frein à sa volonté de participer de nouveau à des compétitions. Elle est implacable, déterminée et disciplinée, c’est incroyable. Mais vient un moment dans la carrière de tout athlète que le corps et l’esprit décident que c’est assez. À 36 ans, Maëlle a pris la sage décision de les écouter.
 
« Quelques années auparavant, je m’étais déjà dit que le jour où je ne serais pas à 100 % de mes capacités, je quitterais la compétition... Au camp d’entrainement en Amérique du Sud cet été j’ai senti que je ne pouvais plus pousser à fond.  Donc j’ai décidé qu’il était temps de passer à d’autres choses. Je ne veux pas participer à des compétitions si je ne peux pas donner le meilleur de moi-même. »
 
Cela ne veut pas dire qu’elle abandonne complètement le snowboard. Au contraire. « J’aime encore beaucoup faire de la planche, insiste-t-elle avec un sourire espiègle. Maintenant que je dispose de plus de temps libre, j’espère pouvoir profiter de la poudreuse des montagnes dans ma région cet hiver. »
 
Maëlle admet qu’il n’a pas été facile pour elle d’accepter l’idée de prendre sa retraite. « La décision de m’éloigner de la ligne de départ et de ne plus porter un maillot de course sera à la base de mes nombreuses nuits d’insomnie à venir, affirme-t-elle. Je ne regretterai pas ce choix cependant, et je suis reconnaissante de l’engagement de tous ceux et celles qui ont participé au programme visant à m’aider à progresser et ultimement à retourner sur les pentes grâce à une longue réadaptation. » 
 
Compte tenu de sa passion pour le sport, il y a de fortes chances que ce ne soit pas la dernière fois que nous entendons parler de Maëlle Ricker. « Je n’ai pas de plans pour le futur en ce moment, explique-t-elle, mais je suis prête à aider l’équipe canadienne de snowboard à passer au prochain niveau. »
 
C’est un sentiment que partage également Patrick Jarvis, directeur exécutif de Canada Snowboard. « Nous avons hâte d’explorer les possibilités avec Maëlle pour qu’elle puisse continuer de participer et d’apporter sa contribution au monde du snowboard, précise-t-il. Elle est unique en son genre – elle est un vrai cadeau pour le monde du sport – et nous aimerions trouver une façon pour qu’elle puisse partager son amour pour la descente et la compétition avec la nouvelle génération. »

On entend de pareille propos à travers le pays. « Au nom du Comité olympique canadien, j’aimerais féliciter Maëlle Ricker pour sa carrière exceptionnelle », dit Chris Overholt, chef de la direction et secrétaire général. « Cette quadruple olympienne s’est taillé une place dans l’histoire en devenant la première Canadienne à remporter une médaille d’or olympique en sol canadien. Elle est aussi la seule planchiste féminine à avoir gagné une médaille d’or olympique pour le Canada. Nous sommes impatients de voir Maëlle concrétiser ses projets d’avenir avec l’appui du programme Plan de match pour faciliter sa transition après sa brillante carrière sportive. »

 « Restez à l’affût », dit Maëlle en terminant.