MONTRÉAL – L'idée de Cendrine Browne était si certaine que même une 16e place aux Jeux olympiques de Pékin n'aurait pu lui faire changer d'avis: la saison 2021-22 allait être sa dernière en ski de fond.

Et elle n'aurait pu espérer une meilleure dernière saison.

« C'est difficile (de quitter), car j'ai eu les meilleurs résultats de ma carrière cette saison, a expliqué la jeune femme de 28 ans en visioconférence mercredi. J'aurais pu faire une autre saison, mais en sachant que c'était la dernière, j'ai vraiment tout donné ce que j'avais. C'est ce qui a fait que j'ai obtenu les résultats que j'ai eus.

« En ayant tout donné comme ça, je n'ai plus vraiment l'énergie de me lancer dans une autre saison. Je me sens comblée avec ce que j'ai réussi à faire. Je suis heureuse d'avoir arrêté au sommet: c'est ce que j'ai toujours voulu faire, arrêter avant de commencer à décliner. Qui sait comment une année de plus se serait passée? C'est important pour moi afin d'avoir de beaux souvenirs pour toute ma vie », a-t-elle mentionné.

Cette 16e place au 30 km style libre sur l'éreintant parcours de Zhangjiakou, à plus de 1650 m d'altitude, ainsi que la neuvième place au relais 4x5 km obtenue avec ses coéquipières de l'équipe canadienne feront assurément partie de ses précieux souvenirs.

« Une 16 place aux Jeux, je n'avais jamais rêvé de faire ça! », a-t-elle admis. Pourtant, son entraîneur, Louis Bouchard, lui avait prédit un top-20 à ses deuxièmes JO, après ceux de Pyeongchang quatre ans plus tôt. Bouchard lui avait d'ailleurs suggéré, en début de saison, de se laisser une porte ouverte en vue de la poursuite de sa carrière.

« Je me disais que des résultats extraordinaires pourraient peut-être me faire changer d'avis. (...) Ce qui est arrivé, c'est le scénario idéal pour moi », a-t-elle dit.

« Je ne voulais pas risquer d'avoir des déceptions après l'année extraordinaire que j'ai eue. Je ne voulais pas être amère envers le ski de fond. Je voulais que mon sport reste spécial à mes yeux. En terminant comme ça, il va toujours demeurer beau et important dans mon coeur. Je suis prête à redonner à la génération suivante », a-t-elle assuré.

C'est ce que Browne, qui est en voie de compléter un baccalauréat en intervention sportive à l'Université Laval, après avoir obtenu un certificat en gestion d'entreprise aux HEC et un autre en communications, s'apprête à faire.

Elle espère demeurer impliquée d'une façon ou d'une autre dans le ski de fond, que ce soit dans la gestion d'événements sportifs ou auprès d'organismes. Un poste au Comité olympique canadien pourrait aussi l'intéresser grandement.

La résidente de Saint-Jérôme demeurera également impliquée au sein du programme Féminaction, fondé en compagnie de sa coéquipière Laura Leclair. Ce programme vise à mousser la participation au ski de fond chez les jeunes femmes de 13 à 16 ans, comme athlètes ou entraîneuses.

« C'était important pour moi de ne pas mettre tous mes oeufs dans le même panier, de ne pas mettre toute mon énergie sur le ski. Promouvoir les saines habitudes de vie, l'équilibre, rester à l'école et donner à la communauté sont des valeurs auxquelles je tiens. En étant une personne équilibrée comme ça, ça m'a mieux préparée pour mon après-carrière. Comme j'avais autre chose dans ma vie, je ne me sens ni vide ni perdue », a résumé Browne.

Cette dernière est fière de l'héritage qu'elle laissera aux fondeuses de la prochaine génération, même si elle a parfois dû se battre avec acharnement contre Nordiq Canada afin de conserver sa place au sein de l'équipe nationale.

« Il y avait longtemps qu'il n'y avait pas eu de femme qui avait percé sur la scène internationale. J'espère avoir tracé le chemin pour elles, et leur avoir permis de rêver. J'ai montré qu'il y avait des places pour les femmes en ski de fond, et je pense que c'est gros. Il n'y avait pas de chemin tout tracé pour moi. Je me sentais perdue quand j'ai commencé, et ç'a pris du temps avant que je perce. Je pense que pour la génération qui s'en vient, ce sera moins difficile. Je suis fière de ça », a-t-elle confié.

« Si je n'avais pas vécu (mon affrontement avec Nordiq Canada), je ne serais pas la femme que je suis aujourd'hui. Quand la fédération cesse de croire en toi et remet toujours en question ta valeur en tant qu'athlète, c'est difficile, a-t-elle poursuivi. Tu dois avoir confiance en toi. C'est ce que j'ai dû prouver sur le terrain, mais j'ai travaillé aussi très fort en psychologie sportive afin de reconnaître ma valeur. Je suis contente d'avoir persévéré. J'ai réussi à prouver que j'avais raison par mes performances et ça, personne ne peut me l'enlever.

« Il ne faut jamais accepter de se laisser marcher sur les pieds. Il faut continuer de croire en soi et d'avoir de grands rêves », a conclu Browne.