Gervais avoue avoir sous-estimé la portée des propos de Grande
MONTRÉAL – Gabriel Gervais, le président du CF Montréal, l'a répété plusieurs fois, le jugement de l'organisation « a été altéré par la volonté de donner une deuxième chance à Sandro Grande ».
Pour ceux qui étaient déconnectés au cours des dernières heures, la nomination de Grande, lundi soir, à titre d'entraîneur-chef du club de réserve a été torpillée en quelques minutes et les dirigeants ont dû lui retirer son poste dès le lendemain matin.
Pourtant, ce n'est pas comme si le club montréalais n'avait pas été au cœur de plusieurs controverses au fil des ans.
« L'embauche avait été faite de bonne foi et motivée par ses excellentes compétences techniques, ses relations professionnelles ainsi que l'expérience et la maturité acquises au cours des dix dernières années. Force est d'admettre que ce fut une erreur », a mentionné Gervais qui assume l'entière responsabilité de ce fiasco.
« De toute évidence, nous avons manqué de sensibilité et largement sous-estimé la portée des propos tenus par Sandro et les gestes commis il y a plusieurs années », a-t-il ajouté dans un point de presse de 20 minutes.
Rappelons qu'en 2012, Grande avait publié un tweet, au lendemain de l'attentat envers au Pauline Marois au Métropolis, souhaitant qu'un tel acte parvienne à ses fins la prochaine fois. « La seule erreur que le tireur a commise la nuit dernière, c'est de rater sa cible!!! Marois!!! La prochaine fois mon gars! J'espère! », avait-il rédigé.
« On a manqué de sensibilité et je dirais même d'empathie dans le sens qu'on n'a pas marché dans les souliers de notre communauté et pas prévu comment ça l'affecterait. C'est un gros apprentissage pour moi en tant que président », a admis Gervais en présentant ses excuses à Mme Marois, aux partis politiques ainsi qu'aux partisans et aux partenaires de l'équipe.
Gervais a expliqué que la décision avait été prise en comité et qu'elle avait été approuvée par le propriétaire Joey Saputo. Les personnes impliquées étaient bien au fait des erreurs commises par l'ancien joueur du club montréalais.
« Ce qu'on a vu en lui comme candidat, c'était les dernières années, les bonnes choses accomplies et la maturité gagnée à travers les dernières années. On ne va pas banaliser les actes de violence ou des gestes haineux, loin de là. On était conscients de son passé un peu trouble », a prononcé Gervais en réponse aux politiciens qui ont dénoncé une banalisation de la violence politique via son embauche.
Gervais et les autres membres du comité avaient plutôt jugé que Grande méritait cette autre chance.
« C'est sûr qu'on pèse les pour et les contre. On a vu tout l'aspect technique que Sandro pouvait procurer à l'équipe. On a regardé l'ensemble de l'œuvre et, en comité, on a décidé d'aller de l'avant. C'était unanime », a précisé le président alors que le poste reviendra finalement à Patrick Viollat qui devait être son adjoint.
Parmi les arguments, Gervais a parlé des commentaires des parents qui n'avaient aucun problème à confier leurs enfants à Grande dans le cadre de ses fonctions précédentes.
Mais, quand l'ensemble des partis politiques dénoncent une décision sportive, que le premier ministre s'assurer de passer le même message et que la mairesse de Montréal en fait autant, ça devient difficile de maintenir son point.
Il faut préciser que Grande n'a jamais reconnu publiquement avoir écrit ce tweet haineux prétextant plutôt que son compte avait été piraté. Ainsi, il aurait d'abord été pertinent et souhaitable que Grande commence par s'excuser avant d'annoncer son embauche.
En devant voir les deux côtés de la médaille, on doit penser au fait que Grande est dévasté par la nouvelle. Dans un sens, autant que ses propos ont été horribles, il doit avoir payé sa peine un jour.
L'idée aurait pu être d'accorder un poste inférieur à Grande pour lui permettre de réintégrer l'organisation graduellement.
« Je pense qu'on est dans l'œil public. Peu importe le poste qu'il allait prendre, je crois que la réaction aurait été la même », a réagi Gervais.
« On s'attendait à voir des gens mécontents, mais pas de cette ampleur », a-t-il poursuivi avec transparence.
Cette autre tuile s'abat donc sur le CF Montréal après l'histoire du changement d'image, de la perte de Wilfried Nancy, de la réputation intransigeante du nouvel entraîneur Hernan Losada.
« On ne veut pas faire de drames constamment, ce n'est pas notre intention, loin de là. C'est le 30e anniversaire du club, ce n'est pas comme ça qu'on prévoyait le commencer », a reconnu Gervais.
La prochaine étape sera de regagner la confiance des partisans écorchés par cette bourde.
« Je vois beaucoup de partisans qui ne sont pas contents et je les comprends. Ce sera à nous de se battre pour regagner la confiance de chaque partisan », a mentionné Gervais qui ne s'est pas défilé.
Et l'ultime leçon se décrit ainsi.
« Si on veut donner une deuxième chance à quelqu'un, on va y penser deux ou trois fois. Se défier davantage pour avoir cette rigueur additionnelle. Se mettre dans les souliers de la communauté et démontrer plus d'empathie », a conclu Gervais alors que le comité du CF MTL aurait dû solliciter l'avis de ressources externes.