MONTRÉAL – Djordje Mihailovic a déjà été dans ce genre de position. Et ça s’est rarement bien terminé.

Chacune des deux dernières saisons que le milieu de terrain américain a passées avec le Fire de Chicago avant d’être échangé au CF Montréal s’est conclue de la même façon : avec son équipe coincée tout juste sous la ligne rouge départageant celles qui sont qualifiées pour les séries de celles qui n’y participeront pas.

En 2019, le Fire a terminé au huitième rang à trois points d’une place dans le tournoi de fin de saison. L’année suivante, alors que dix équipes étaient exceptionnellement admises en séries, Chicago a fini onzième à un point de l’objectif.

« Je me souviens aussi de ma première année dans la Ligue, raconte Mihailovic. On était au premier rang du classement général à la pause du match des étoiles. Dans nos quatre derniers matchs de la saison, on n’avait signé qu’une victoire [NDLR : le Fire avait en fait remporté deux de ses quatre derniers matchs, mais avait terminé sa saison sur une défaite de 3-0] et ce momentum nous a suivis en séries. On s’est fait sortir dès notre premier match de séries. »

Mihailovic, qu’on a appris à connaître comme un féroce compétiteur au cours de sa première saison en Bleu et Noir, décrit l’incapacité de jouer en séries comme un « énorme échec », un échec dont il assume et continue de supporter le poids, même dans une nouvelle équipe. Un échec qu’il n’est pas intéressé à revivre cet automne.

« Il y a des choses qu’on peut apprendre du passé. J’ai vécu de grandes déceptions, mais je ne veux pas qu’elles me caractérisent. Je veux être jugé sur la façon dont je me relèverai. Les deux dernières années à Chicago ont été difficiles, mais je veux aujourd’hui faire profiter des leçons que j’ai apprises à ma nouvelle équipe. »

« Maintenant, c’est le temps de mettre la pédale au plancher », proclame Mihailovic.

Le CF Montréal amorcera officiellement le sprint final de sa saison samedi lorsqu’il recevra la visite de l’Union de Philadelphie au stade Saputo. Avec encore six matchs à disputer, le Club de Foot occupe le septième et dernier rang donnant accès aux séries dans l’Association Est. Ses 40 points le mettent sur un pied d’égalité avec D.C. United et New York City FC et seulement cinq points le séparent de son prochain adversaire, qui est lui campé au troisième rang.

Derrière, les clubs d’Atlanta, New York et Columbus peuvent encore aspirer à se hisser dans la bonne partie du tableau. En partant de la prémisse que seuls la Nouvelle-Angleterre et Nashville sont assurés d’y être à la fin de l’année, on parle donc de huit clubs qui se battront pour cinq places disponibles.

« Il reste six matchs, ça va être six finales et puis on va essayer de garder notre façon de jouer et de rester focus sur ça, anticipe le défenseur Rudy Camacho. Je le dis depuis un moment, si on regarde trop le classement et qu’on pense trop à ça, on va oublier de jouer. Il faut qu’on soit concentrés sur notre jeu et sur nos principes. Il n’y aura pas de souci si on respecte tout ça. »

« L’opportunité est là, pour nous, d’envoyer un message au reste de la ligue. Mais la seule façon d’y arriver, c’est de ne penser à rien d’autre qu’au prochain match », agrée Mihailovic.

La gestion des émotions

Un vétéran de 30 ans qui achève sa quatrième saison en MLS, Camacho envisage avec excitation le prochain mois. Il apprécie le fait que la proximité entre les nombreux aspirants dans l’Est ajoutera « un peu plus de piment » à la fin de saison. « Il n’y en a pas un qui va lâcher et ça va être sympa à jouer », se réjouit le Français.

Mais le CF Montréal est une équipe jeune composée de plusieurs joueurs qui n’ont jamais encore occupé un rôle important sous haute tension. Il sera intéressant de surveiller leur réaction à la recrudescence de pression.

« C’est la gestion des émotions, indique Camacho. Certains joueurs peuvent être un peu plus stressés que d’habitude parce que ce sont des matchs à enjeu. Il faut essayer de rester confiants le plus possible. Même si on perd un match ce week-end ou un autre week-end, il faut rester confiants, il ne faut pas perdre ça. On a été confiants toute la saison et ce n’est pas parce qu’on a des matchs à enjeux qu’il faut perdre cette confiance, justement. On doit être solides mentalement parce que ça va être compliqué. »

Les recommandations du défenseur d’expérience s’appliqueront aussi au banc de touche. L’entraîneur-chef recrue Wilfried Nancy a fait un boulot colossal pour amener une équipe négligée à fracasser des attentes modestes, voire inexistantes. Mais le contexte a changé. On s’attend maintenant à des résultats de ses hommes.

« On est excités, a lancé Nancy à quelques jours du premier examen. Moi j’ai hâte. Je disais aux gars : ‘Ça y est, il faut qu’on commence le match. Même si on a 15 matchs en 15 jours, faut qu’on commence le match!’. Parce que j’ai envie en tant que coach de voir si on va être capables de maîtriser nos émotions, de rester sur la tâche, de continuer à faire ce qu’on fait bien et de s’améliorer sur certains détails dans les matchs qui sont vraiment cruciaux. Moi, c’est ça qui m’intéresse. J’ai besoin de faire ça. »

Nancy voudra peut-être avoir une petite conversation avec Mihailovic pour discuter du concept de la réussite et de l’échec. L’entraîneur ne croit pas qu’on devra juger le travail de ses hommes sur l’issue des six prochains matchs, même s’il aimerait bien sûr qu’il y en ait au moins un septième.

« Je pense qu’on doit aller voir un peu plus loin que ça. Mais en tant que coach, je suis très excité, j’ai hâte de commencer. J’ai envie de voir la suite au niveau de mes joueurs et comment ils vont assumer cette pression que j’adore. »