RDS au Qatar : Nacho voyageur, Nacho rêveur
DOHA, Qatar – « Il y a la plage où vous êtes? »
Ignacio Piatti nous fait signe de le suivre derrière la tour où il loge depuis maintenant près de deux semaines. Arrivé sur une terrasse surélevée, il monte sur un banc puis sur un muret de pierre afin de se donner une vue parfaite sur un long croissant de sable qui borde un énorme complexe hôtelier.
Quand il n'est pas au stade, c'est là qu'il passe le plus clair de son temps avec sa femme et ses trois enfants. Lui non plus, il trouve qu'il n'y a pas tant à faire à Doha. Mais les Piatti ne sont pas venus au Qatar pour faire les touristes de toute façon. Ils sont ici pour le fùtbol.
Piatti a longtemps hésité avant d'organiser ce voyage et venir assister à sa première Coupe du monde. Il s'est finalement décidé quand il a trouvé un forfait qui lui assurait son transport, son hébergement et des billets pour le troisième match de l'Argentine contre la Pologne. Il a ensuite utilisé ses contacts à Montréal pour s'assurer d'une place dans le stade pour les huitièmes de finale.
Quand son équipe s'est fait surprendre par l'Arabie Saoudite, une légère panique s'est emparée de lui. Qu'allait-il faire pendant tout ce temps, à l'autre bout du monde, si l'Argentine ne passait même pas la phase de groupes?
« Tout le monde se disait qu'on était en train de revivre la même déception qu'en 2018 quand on s'était fait éliminer en huitièmes de finale, nous racontait le sympathique Nacho, fièrement couvert de son maillot de l'Albiceleste quelques heures avant la victoire de 3-0 de Messi et compagnie. Mais après tout ça, ils ont bien joué contre le Mexique et ils ont gagné en confiance. Ça nous amène à aujourd'hui, à ce match contre la Croatie. C'est un grand match contre une bonne équipe. On a toute la confiance qu'ils passent en finale, mais il faut jouer le match. »
Au Qatar, Piatti n'est pas l'ancienne gloire de San Lorenzo ni l'ancien as buteur devenu recruteur pour le CF Montréal. Il est le petit chiquito qui a grandi dans la campagne de la province de Cordoba en encourageant Boca Juniors et en rêvant de courir un jour dans les traces de Batistuta.
C'est ce qu'il a fini par faire d'ailleurs, littéralement.
« En 2002, j'ai fait un essai à la Roma, où il jouait à l'époque. C'est lui qui m'avait apporté là. Très gentil, un grand joueur aussi. Quand j'étais petit, j'étais un numéro 9. Je le regardais beaucoup. Maradona aussi, mais Batistuta plus. Lui, il marquait des buts. Il était très fort. »
Piatti était un bambin en 1986. La Main de Dieu, el pibe de oro porté en triomphe à l'Azteca, il n'a bien sûr aucun souvenir de ça. « Mais mon père m'a dit que c'était incroyable, que tout le monde était dans la rue, c'était magnifique. Donc on espère. »
Au Qatar, il n'est qu'un supporter argentin parmi des milliers d'autres. Il estime qu'ils sont environ 40 000 à avoir fait le voyage comme lui. On ne sait pas où il prend ces chiffres, mais leur présence symphonique aux matchs de leurs favoris nous permet d'affirmer qu'il n'est pas loin de la vérité. Ils sont bruyants, déchaînés, passionnés. Les plus émotionnellement investis dans ce Mondial avec ceux du Maroc.
« Mais moi je ne suis pas comme ça. Je suis plus tranquille, lâche Nacho avec le sourire timide qu'on lui connaît. En Argentine, il y a beaucoup de passion. C'est pour ça que jouer au foot là-bas, c'est difficile. Tu perds un match et tu ne peux pas sortir dans la rue. Tu gagnes un match et tu es le meilleur. Et c'est toujours comme ça. Dans le stade, c'est fou. Quand on le vit de cette façon, c'est incroyable. »
Ils sont là pour le trophée, qui n'est pas revenu à la maison depuis 36 ans. Ils sont aussi là pour voir les derniers exploits de Messi dans les couleurs nationales. Une combinaison des deux serait un rêve duquel ils ne sont maintenant séparés que par une petite victoire.
« Je ne l'avais jamais vu jouer en personne, c'est la première fois ici. Avant ce n'était pas possible pour moi. C'est incroyable de voir ça. À la télé c'est une chose, mais en personne, les choses qu'il fait, les mouvements... »
« Tout le monde veut ça pour lui. Il a 35 ans, c'est maintenant ou jamais. En 2014, on a perdu la finale, tout le monde disait que Messi n'était pas bon. Beaucoup de personnes disaient qu'il était bon au Barça, mais pas pour l'Argentine. C'est bon pour tout le monde s'il gagne. On arrêtera enfin de parler en mal de lui. »
Le temps file, Nacho doit se préparer pour le match. Il nous tend la main et nous souhaite un bon retour à Montréal. Une ville où il se sent chez lui et où il compte de précieux amis, prend-il la peine de préciser.
« Mais il va faire froid quand vous allez rentrer, non? On est bien ici finalement... »
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