LONDRES - Prévenant que le football ne doit pas être «pris à partie par ceux qui veulent du mal», le président de la FIFA Sepp Blatter a exigé que la fédération égyptienne lui communique les causes détaillées de l'émeute survenue dans un stade qui a provoqué la mort d'au moins 74 personnes.

Blatter a demandé, dans une lettre à l'Association de football d'Égypte, que des gestes concrets soient posés afin d'éviter que ne se répètent les violences d'après-match de mercredi. Le conseil d'administration de la fédération a toutefois été congédié par le premier ministre du pays, et ses membres seront interrogés par des procureurs.

Walter Gagg, un expert en stades internationaux de football, a de son côté affirmé que l'enceinte où est survenue l'émeute est bien conçue et ne posait aucun danger pour les spectateurs. Selon cet officiel de la FIFA qui est également conseiller auprès de la Confédération africaine de football, les violences survenues étaient préméditées.

Gagg, qui a déjà inspecté le stade en question en vue de matchs de la Coupe d'Afrique des nations de 2006 et de la Coupe du monde U-20 en 2009, a avancé qu'il y a eu «préméditation des événements» et que les autorités du football «ne peuvent éviter un problème» si la violence est planifiée dans le contexte d'un match.

L'incident le plus meurtrier à survenir dans un stade de foot depuis 1996 a suivi un match de championnat disputé à Port-Saïd entre Al-Masry et Al-Ahly. Des partisans ont été piétinés à mort tandis que d'autres ont été poignardés ou ont suffoqué.

Durant une séance parlementaire tenue d'urgence au Caire, jeudi, plusieurs législateurs ont prétendu que certains policiers et militaires se sont retenus d'intervenir, permettant à l'émeute de prendre de l'ampleur et venant attiser le sentiment d'insécurité qui sévit au pays depuis la chute de Hosni Mubarak il y a un an. Le manager d'Al-Masry Kamal Abu Ali a remis sa démission après la rencontre, affirmant qu'il s'agissait « d'un complot pour renverser l'État ».

Les internationaux égyptiens et joueurs d'Al-Ahly Mohamed Aboutrika, Emad Moteab et Mohamed Barakat ont tous fait savoir qu'ils avaient décidé de prendre leur retraite du football après avoir été témoins de l'émeute.

L'entraîneur portugais d'Al-Ahly, Manuel Jose, aurait quant à lui demandé au club du Caire d'annuler son contrat et de lui permettre de retourner au Portugal.

« Je comprends tout à fait le choc et la colère qu'éprouvent les gens du pays après avoir constaté qu'un tel désastre ait pu avoir lieu, a écrit Blatter au président de l'AEF Samir Zaher, jeudi. Aujourd'hui est une journée noire pour le football et nous devons prendre des mesures pour s'assurer qu'une telle catastrophe n'arrive plus jamais. Le football est une force pour le bien, et nous ne devons jamais permettre qu'il soit pris à partie par ceux qui veulent du mal.

« Tel que discuté au téléphone (jeudi) matin, j'attends plus de nouvelles de votre part concernant les circonstances de cette tragédie. »

Peu après que Zaher eut discuté avec Blatter, il a été congédié par le premier ministre Kamal el-Ganzouri, tout comme le reste du conseil. Cette décision pourrait être considérée comme de l'ingérence de la part du gouvernement dans les affaires d'une association nationale, ce qui est à l'encontre des statuts de la FIFA. La FIFA n'a pas voulu commenter cet aspect de l'affaire, jeudi.

« Comme toujours, la FIFA vous soutient pendant cette période difficile et est prêt à vous donner tout le support dont vous pourriez avoir besoin », a écrit Blatter à la fédération égyptienne avant l'intervention du gouvernement.

L'émeute a éclaté quand 13 000 partisans d'Al-Masry ont envahi le terrain à la suite d'une victoire de 3-1 contre Al-Ahly, un club qui a été 36 fois champion d'Égypte. Des supporteurs d'Al-Masry armés de couteaux, de bâtons et de pierres ont pourchassé des joueurs et des partisans d'Al-Ahly, qui ont couru vers les sorties et les gradins dans l'espoir d'y échapper, selon des témoins.

« Ça m'attriste d'être témoin de telles violences dans un sport qui a le pouvoir d'unir les nations et de surmonter les différences, a déclaré le vice-président de la FIFA, le prince Ali bin al-Hussein de Jordanie. J'ai confiance que la famille du football d'Égypte saura se remettre de cette tragédie et retrouver sa force. »