L'étau se resserre autour de Noël Le Graët
La situation se complique encore pour Noël Le Graët : le président de la Fédération française de football (FFF), en retrait de ses fonctions, est visé par une enquête pour harcèlement moral et sexuel, des accusations qu'il dément mais qui assombrissent ses velléités de retour.
Cette enquête, ouverte lundi et confirmée mardi à l'AFP par le parquet de Paris, a été confiée à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) à la suite du signalement pour « outrage sexiste » effectué, selon le quotidien Le Monde, après le témoignage de Sonia Souid, agente de plusieurs internationales françaises.
Ces déclarations avaient été recueillies par les auditeurs de l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) chargés par le ministère des Sports d'éclaircir les nombreux dysfonctionnements en termes de management au sein de l'instance.
Sonia Souid avait publiquement dénoncé dans les colonnes de L'Équipe et sur RMC les avances lourdes de l'ancien maire socialiste de Guingamp, en poste à la FFF depuis 2011 mais de plus en plus contesté du fait de l'accumulation de polémiques, de petites phrases malheureuses et de révélations dans la presse sur de supposés comportements sexistes vis-à-vis d'anciennes salariées.
Le Graët dénonce des « interférences »
Le dirigeant de 81 ans « dément toutes ces accusations de harcèlement moral ou sexuel ou toutes autres infractions pénales », a-t-il réagi dans un communiqué transmis à l'AFP par ses avocates.
Dans ce texte, Le Graët s'étonne d'apprendre « par voie de presse » l'ouverture d'une enquête et fustige les « nombreuses interférences et pressions politiques » venues, selon lui, de la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera dans le cadre de l'audit de l'IGESR, et de la ministre chargée de l'égalité femmes-hommes, Isabelle Rome.
L'hypothèse d'une démission de Le Graët «serait un signal extrêmement positif envoyé à l'ensemble des victimes », avait commenté cette dernière, lundi sur la chaîne Public Sénat. Mme Oudéa-Castéra a assuré sur Twitter, la semaine passée, que l'audit diligenté par son ministère « sera digne » des témoignages de Sonia Souid.
La ministre des Sports n'a pas voulu, mardi dans un communiqué transmis à l'AFP, "commenter cette décision judiciaire".
« Il appartient désormais à la justice de faire son travail et de décider des suites à donner. Je n'ai reçu, ni commenté, ni qualifié les éléments qui lui ont été transmis en toute indépendance par l'IGESR et dont le parquet a jugé qu'il devait se saisir », a-t-elle indiqué, ajoutant qu'elle ne se « laissera pas mettre en cause » et que les « tentatives de diversion » de Le Graët « ne duperont personne ».
Avec ce premier développement judiciaire le concernant, l'étau se resserre autour du patron du foot français, déjà contraint le 11 janvier de se mettre en retrait après le tollé provoqué par ses propos à l'emporte-pièce sur Zinédine Zidane.
Le Comité exécutif de la « 3F », dont la grande majorité des membres est issue de la liste que le Breton a présentée avant sa dernière réélection, en mars 2021, avait décidé de lâcher son chef.
Comex jeudi
Le vice-président délégué de la FFF, Philippe Diallo, aussure l'intérim jusqu'au « Comex » suivant la publication du rapport d'audit prévue fin janvier. Mais l'ouverture de cette enquête compromet un peu plus les chances de Le Graët de récupérer la totalité de ses prérogatives à cette date.
Un retour « paraît de plus en plus difficile », a commenté Jean-Michel Aulas, président de l'OL et membre du Comex fédéral, mardi auprès de L'Equipe. « Mais encore une fois, attendons les éléments du rapport. Je ne peux pas me résoudre à condamner quelqu'un que je connais bien tant que je n'ai pas des éléments concrets qui viennent étayer cette position ».
Le Comex, sorte de « gouvernement » de la Fédération, a prévu de se réunir jeudi, sans ordre du jour précis, indique à l'AFP une source proche de l'instance.
La chute est rude pour Le Graët qui a passé plus d'un quart de siècle dans les hautes sphères du foot français et dont le mandat court toujours jusqu'en 2024.
Président de la Ligue (1991-2000) puis artisan, à partir de 2011 en tant que président, du redressement de la « 3F » et de ses comptes après le fiasco de l'équipe de France à Knysna lors du Mondial-2010, il a été un personnage central du ballon rond avant d'être rattrapé par ses dérapages multiples. Et désormais par la justice.