ROME, Italie - Laissé de côté par Pep Guardiola à Manchester City, Joe Hart aurait pu choisir le confort du banc de touche de l'Etihad Stadium ou un prêt sans risque en Premier League. Mais le gardien de but de l'Angleterre a opté pour l'inattendu et s'épanouit finalement depuis six mois en Serie A, au Torino.

« Mia, tua, destra, sinistra, passa, tira, dammela, lascila ». À moi, à toi, droite, gauche, passe, tire, donne la moi, laisse-la. Encore une phrase en italien de manuel scolaire et Hart pouvait lancer un long soupir de soulagement et savourer les applaudissements des journalistes italiens: sa conférence de presse de présentation était un succès.

« Il a appris entre 30 et 50 mots, ceux qui servent à diriger une défense, et il les utilise déjà à l'entraînement », assurait dès septembre son nouvel entraîneur Sinisa Mihajlovic. « Pour nous, c'est une superbe opportunité. Il est titulaire en sélection, il a de l'expérience, du caractère et la volonté de gagner », ajoutait alors le Serbe.

De fait, le pedigree du natif de Shrewsbury est assez éloigné des standards du Torino, 7e, 9e et 12e ces trois dernières saisons en championnat. À 29 ans, Hart compte en effet 68 sélections avec l'Angleterre, a joué 40 matches de Ligue des Champions et disputé deux Coupes du Monde et deux Euros.

« De bons pieds »

Mais son championnat d'Europe en France a été désastreux et à son retour à Manchester, le nouvel arrivant Pep Guardiola lui fait comprendre qu'il ne compte pas sur lui.

« Le foot est affaire d’opinions. Certains pensent que je fais partie des meilleurs du monde, d’autres que je ne sers à rien. Malheureusement, il se trouve qu’un de mes anciens entraîneurs ne croyait pas beaucoup en mes qualités », a-t-il résumé en octobre dans La Gazzetta dello Sport.

Guardiola aime les gardiens qui évoluent très haut, habiles dans le jeu au pied, et Hart ne correspond pas à ses idées sur le football.

Plus terre-à-terre, Mihajlovic voit lui en Hart un gardien suffisamment fort avec les pieds comme avec les mains pour faire mieux que le décevant Padelli et pour tirer son groupe vers le haut.

« Guardiola dit que ce n'est pas le meilleur avec les pieds. Mais de ce que je vois, il a de bons pieds. Après, si ce que Guardiola veut c'est un Guardiola qui joue dans les buts, il aura du mal à le trouver », a-t-il ainsi perfidement lancé.

Wonderwall

Vrai sujet de curiosité dans une Serie A rarement fréquentée par les Anglais -même si Gascoigne, Hateley, Ince, Beckham brièvement et une poignée d'autres s'y sont illustrés-, Hart réussit au bout du compte une saison correcte, sans plus.

Très sollicité derrière une défense qui laisse beaucoup de situations de frappes aux adversaires, il a commis quelques erreurs, dont une dès ses débuts contre l'Atalanta Bergame, et n'a pas fait suffisamment de miracles pour hisser le Torino plus haut que la 9e place qu'il occupe avant d'aller affronter l'AS Rome dimanche.

Mais il s'est parfaitement intégré au groupe, comme l'a prouvé une vidéo d'un dîner entre coéquipiers où on le voit chanter Wonderwall d'Oasis accompagné à la guitare par le défenseur Molinaro, et les tifosi l'adorent.

Sa réaction souriante et fair-play après avoir pris les crampons du Milanais Lapadula en plein visage - avec son étrange pansement sur le crâne et son visage tuméfié, il était comparé sur les réseaux sociaux à un Teletubbie - a aussi été saluée en Italie.

Pour autant, la poursuite de son aventure piémontaise semble improbable, surtout sans qualification européenne. Et un retour à City? Guardiola a bien changé d'avis sur Yaya Touré. Et Claudio Bravo ne lui a pas vraiment donné de raisons de ne pas au moins y réfléchir.