Dès le début de la mise en scène, on savait que ce ne serait pas un match facile. Il pleuvait des cordes au Stade de Letzigrund et avant même de commencer, le match était promis à un avenir sombre pour l'une des deux équipes. Pour l'autre, ce serait le soleil …le temps d'une éclaircie.

L'Italie et la France se sont affrontées tant de fois. Leurs destins sont liés par une frontière commune, par des racines communes, par des guerres et des amitiés communes. Dans cet Euro, les deux finalistes de la Coupe du Monde 2006 arrivaient au dernier match de groupe avec un dossier étonnamment identique. Leur plus grosse défaite chacune en Euro et contre le même adversaire en plus, un match nul, toujours contre un adversaire identique, un seul but de marqué jusqu'à ce moment dans la compétition. Et toutes deux n'étaient pas complètement maître de leur situation, le résultat de l'autre match du groupe ayant une incidence directe sur leur sort dans cet Euro.

Mais là s'arrêtent les ressemblances. Sur le terrain, ce sont deux formations totalement dissemblables qui se sont affrontées. D'un côté une équipe qui montait en confiance en ayant réussi à trouver des solutions à la lourde absence de son capitaine Fabio Cannavaro, blessé quelques heures avant le début de l'Euro. Après la défaite sévère contre les Pays-Bas (3-0), le remaniement apporté par Donadoni laisse entrevoir des possibilités intéressantes, même s'il n'apporte pas le résultat. De l'autre côté une équipe qui inquiète avec la nulle de 0-0- contre la Roumanie et dont les changements l'enfoncent un peu plus. Le 4-1 contre les Pays-Bas suscite plus de questions qu'il n'apporte de réponses.

Le match promet. Donadoni semble plus calme que le Domench tourmenté que l'on voit à l'écran. Les changements audacieux qu'il a apportés en défenses notamment ont intérêt à bien fonctionner… mais pour la France, ce sera le château de cartes qui s'écroule. La blessure de Ribéry ravive les inquiétudes. Privée de son attaquant le plus vaillant, le plus créatif, et qui en plus revenait dans une position où il se sent à l'aise, la France vacille. Quand Abidal fait la faute sur Luca Toni et que Andrea Pirlo tranforme le penalty, la France s'affaisse. Quand Grosso, impeccable depuis son entrée dans le tournoi marque à l'heure de jeu, la France se meurt.

Pendant ce temps à Berne, les Pays-Bas font jouer leurs réservistes de luxe, on en vient à oublier qu'ils ne sont pas tous titulaires, et font mentir tous ceux qui avaient prédit qu'ils laisseraient la victoire filer afin d'écarter de la compétition les finalistes de la dernière Coupe du Monde. La porte est donc grande ouverte pour l'Italie qui y entre en bombant le torse.

C'est une triste fin pour la France qui aura de sérieux examens de conscience à faire. Jamais on n'aura eu d'unité au sein de ces Bleus, jamais on aura senti la fierté et l'envie les transporter sur le terrain. Les Turcs, par exemple, auraient pu se laisser abattre en tirant de l'arrière 2-0 à 15 minutes de la fin. On a pourtant senti une grande solidarité entre tous les membres de cette équipe, et c'est ensemble, tirés par un grand leader, qu'ils sont allés voler la victoire au nez des Tchèques. C'est bien souvent ce qui fait la différence.

À l'inverse de la France, l'Italie s'est mise à y croire. On sentait les joueurs tendus vers un but commun, on les voyait travailler pour alimenter leur attaquant de pointe Luca Toni, on savait qu'ils avaient confiance en leur gardien Gianluigi Buffon. Ils ne sont pas responsables de la blessure de Ribéry, ils n'ont pas provoqué l'expulsion d'Abidal. Ils ont cependant profité de chacune des occasions que le match leur apportait et une fois de plus cette équipe que l'on croyait condamnée, renaît de ses cendres.

La suite sera cependant délicate. Privée de Pirlo et de Gattuso, ses deux poumons du milieu de terrain suspendus pour un match, l'Italie risque de souffrir contre une Espagne effervescente depuis le début du tournoi. Les Italiens sont sur une montée, les Espagnols ont la réputation de flancher au moment critique… Il y aura onde de choc dans la Méditerranée.