La blessure était encore très vive pour Evan Bush, seul dans sa chambre d'hôtel de Portland, là où sont basés les Whitecaps. 
 

Après une longue journée à voyager et à prendre connaissance de la vague d'amour à son endroit sur les réseaux sociaux, on sentait qu'il était à fleur de peau.

 

« Je me suis senti très émotif toute la journée, en fait depuis hier soir quand la décision a été prise. La cerise sur le gâteau, la partie difficile pour moi, c'est de voir les remerciements de l'Impact et des fans. »

Au cours des derniers jours, le gardien de l'Impact, qui a vu très peu d'action depuis la venue de Thierry Henry à la barre de l'équipe, a été approché à propos d'une transaction possible avec les Whitecaps. 

 

« Avec le plafond salarial, je me doutais que c'était une possibilité que je change d'adresse, mais c'est arrivé plus tôt que je le pensais », souligne Bush, les traits tirés par la fatigue après une journée chargée d'émotions. 

 

Le dernier chapitre au Red Bull Arena

 

Dimanche, l'Impact affrontait les Red Bulls au Red Bull Arena. 90 minutes avant le coup d'envoi, il a reçu la confirmation que la transaction avec les Whitecaps avait été complétée. 

 

« Comme je ne faisais pas partie des 18 joueurs dans la formation, mes coéquipiers se doutaient bien que quelque chose se tramait. J'en ai parlé avec Juukka Raitala (capitaine de l'équipe). Il voulait que je m'adresse à l'équipe avant le match, mais je ne voulais pas dévier l'attention du match. J'ai donc attendu après la rencontre dans le vestiaire. Je tenais à remercier tous les gars, qu'ils aient joué avec moi pendant quelques mois ou pendant plusieurs années. J'avais besoin de fermer un peu ce chapitre avec mes coéquipiers. À mon retour à Montréal, pendant la saison morte, je prendrai le temps d'aller remercier tout le monde du club à tous les niveaux. Je leur dois un grand merci! »

 

Ironie du sort, c'est donc au Red Bull Arena qu'Evan a appris que son séjour avec l'Impact était officiellement terminé...

 

« C'est dans ce stade que nous avons réalisé l'un des plus grands triomphes de l'histoire du club, quand nous avons battu les Red Bulls pour accéder à la finale de conférence. J'ai vécu beaucoup d'émotions en regardant le match dimanche soir », lance Bush en retenant un sanglot.

 

En 2016, l'Impact a éliminé les Red Bulls à New York, pour ensuite affronter le Toronto FC en finale de l'Est. Cette année-là, le Bleu-blanc-noir est passé à un cheveu d'atteindre la grande finale, mais les Torontois avaient autre chose en tête...

 

10 ans de souvenir

 

Tout au long de l'entrevue, Evan Bush doit souvent prendre une pause pour contenir ses émotions autant que possible. Après une soirée et une journée marqués par la réflexion et la tristesse, il a beaucoup de difficulté à répondre quand l'auteur de ces lignes lui demande ce qu'il trouve le plus difficile entre le fait de ne plus jouer pour l'Impact et celui de quitter la ville de Montréal, dans laquelle il a fondé une famille et développé de belles amitiés...

 

« Ouf, je t'ai dit que j'ai été émotif toute la journée. C'est tout ce qu'il y a en dehors du terrain, déclare Bush en baissant la tête. La partie qui ressort pour moi, c'est l'impact que j'ai pu avoir dans la communauté, avec les gens. Je ne me sens pas mal par rapport à la façon dont les choses ont déboulé dans les derniers jours. Mais il y a 10 ans de beaux souvenirs pour moi. »

 

« On a accompli de grandes choses et d'autres choses terribles que les gens nous rappellent souvent! », ajoute Bush en esquissant un sourire. « On célèbre les bons moments et on se fait aussi dire que nous ne sommes pas bons à l'occasion! »

 

Deux départs marquants
 

Depuis l'hiver dernier, les changements ont été nombreux chez l'Impact et Evan Bush a pu constater qu'un virage important s'opérait avec les embauches d'Olivier Renard et de Thierry Henry. Celui qui est maintenant un membre des Whitecaps retient deux départs en particulier, ceux de Nacho Piatti et de Nick DeSantis.

 

« Quand Nick a quitté l'équipe, ça a été comme un coup dans l'estomac pour moi. Il m'a embauché, j'ai énormément de respect pour lui et je sais à quel point il aimait l'Impact. L'autre départ marquant a été celui de Nacho Piatti en février. De voir des pilliers du club quitter comme ça, c'était difficile à accepter. Mais c'est normal, Olivier et Thierry arrivent avec leur vision et je n'en faisais plus partie moi non plus. »

 

Deux moments marquants

 

Le parcours de l'Impact en 2016 a certainement marqué Evan Bush, mais il a aussi fait partie d'un autre grand moment l'année précédente, alors que l'Impact a atteint la finale de la ligue des champions de la Concacaf. Bush a un sentiment partagé de ce parcours, puisqu'on se souviendra évidemment qu'il a été suspendu pour la finale, après avoir reçu un carton rouge en demi-finale. Il demeure très fier de ce grand accomplissement collectif. 

 

« Quand je repense au voyage au Costa Rica pour atteindre la finale, je dis que ce sont les meilleurs quatre buts que j'ai encaissés ! Nous avons perdu 4-2 mais nous avons obtenu notre place en finale ! Nous avons accompli des choses que nous n'aurions jamais dû réaliser. »

 

Un nouveau chapitre dans une zone de confort

 

Alors qu'il tente encore d'encaisser le coup de la transaction, Evan Bush se retrouve en quelque sorte en terrain connu avec les Whitecaps de Vancouver. Il retrouve Marc Dos Santos, ancien entraîneur de l'Impact, mais aussi l'entraîneur des gardiens, Youssef Dahha, sans oublier l'autre ancien de l'Impact, Maxime Crépeau.

 

« Quand on m'a approché avec l'idée de Vancouver, je n'étais pas entièrement surpris. N'eut été de la présence de Youssef, j'aurais probablement refusé sur-le-champ. Il est la première personne avec qui j'ai travaillé lors de mon essai avec l'Impact, en 2011. Marc a aussi été une personne importante pour moi, qui m'a donné ma chance à Montréal. Tout indique que ce sera une transition facile, même si je me retrouve dans une situation que je n'ai pas connue depuis longtemps. »

 

S'il a hésité au départ, c'est surtout parce qu'il pensait à sa famille, sa femme Colleen et leur deux enfants. Par contre, son épouse lui a démontré un soutien sans bornes en vue de son nouveau défi. 

 

« Le fait de voir son soutien a rendu le tout plus facile pour moi. Elle voyait que depuis quelques mois, j'étais moins heureux qu'auparavant au travail. Elle m'a soutenu à 100% et elle a même rendu ma décision plus difficile, j'aurais espéré qu'elle me dise de ne pas y aller! Cela aurait probablement été la chose facile à faire, soit de rester. Montréal a été un endroit fantastique pour ma famille et moi, c'est tellement un bel endroit pour élever des enfants. »

 

« C'est un cliché, mais je veux vraiment le meilleur pour ce club. Je serai toujours un fan. Ce club a représenté une partie majeure de ma vie et va continuer de l'être. »

 

Cette dernière phrase résume très bien l'héritage qu'Evan Bush laisse avec son passage à Montréal. Un joueur qui a toujours eu les succès de son club à coeur. Un athlète fier qui a toujours pris grand soin de son corps pour atteindre les plus hauts niveaux possibles. Mais aussi un homme de coeur qui est tombé en amour avec la ville de Montréal et qui a décidé d'y fonder une famille. Et finalement, un homme qui a toujours fait face à la musique avec les médias, dans les bons et les moins bons moments. 

 

L'Impact perd un ambassadeur important, qui aura laissé sa marque dans l'histoire du club.

 

Pas mal pour un petit gars de l'Ohio, qui s'est présenté à Montréal avec un essai professionnel en 2011, avant de grimper un à un les échelons pour devenir un gardien que les fans du club n'oublieront pas de si tôt!