MONTRÉAL – Aucun des hommes en blanc n’y était, il y a six ans, lorsque l’Impact a subi la défaite la plus cruelle de son histoire.

Mais ils se souviendront tous du soir où ils ont réussi à refermer cette large cicatrice qui hantait le club montréalais.

L’attaquant recrue Cameron Porter a semé l’hystérie dans un Stade olympique rempli par plus de 38 000 supporteurs, mardi soir, quand son but marqué dans les arrêts de jeu a permis à l’Impact d’arracher un nul de 1-1 qui l’a propulsé directement en demi-finale de la Ligue des champions de la CONCACAF.

L’Impact était passé à un cheveu d’accéder à cette phase en 2009, mais s’était plutôt effondré devant la grandeur du moment. Contre le Santos Laguna, un autre club mexicain, il avait été victime de deux buts dans les arrêts de jeu et avait vu un grand rêve s’envoler en fumée.

Cette fois, ce fut tout le contraire d’un effondrement. D’un élan désespéré et inspiré, alors que la cause semblait vaine, un héros inattendu a pris le contrôle de la destinée du club. « Miraculeux », pouvait-on même entendre dans les coulisses du vieux dôme sur le chemin qui menait au vestiaire des vainqueurs.

« Tout ce dont j’entends parler depuis que je suis arrivé à Montréal, c’est ce match de Ligue des champions que l’Impact avait remporté ici. Mais aujourd’hui, je vais prendre ce nul qui nous permet d’avancer avant n’importe quelle victoire. C’est une grande journée pour cette équipe et pour cette ville. Je ne crois pas que ceux qui ont eu la chance de vivre ce moment l’oublieront de sitôt », a commenté le gardien Evan Bush.

« Ça démontre la force de ce groupe, soulignait le défenseur Bakary Soumaré. On sera une équipe qui ne va pas lâcher. Il y aura des hauts et des bas, mais on sait qu’on a un groupe très solide, un groupe de gagnants. On a eu un peu de chance, mais au football, la chance, en général, on l’a quand on la mérite. »

Porter, un choix de troisième ronde au plus récent repêchage de la MLS, était entré dans le match à la 85e minute. Sa présence dans le match, en remplacement du milieu de terrain Nigel Reo-Coker, donnait alors un deuxième attaquant aux retardataires.

Son arrivée s’avéra rapidement providentielle. À la troisième des quatre minutes de temps ajouté, Porter a accepté avec la poitrine une longue prière de Calum Mallace, lui aussi inséré dans la rencontre dans la troisième demi-heure, a encaissé un contact avec un défenseur tout en maintenant possession du ballon et s’est immédiatement mis en marche vers le filet adverse.

Son premier but chez les professionnels, inscrit avec le calme d’un vétéran aguerri, a presque déclenché une émeute.

« Je ne savais même pas comment célébrer, alors j’ai commencé à courir », a exprimé le héros du jour, qui s’est rapidement retrouvé enterré sous une montagne de coéquipiers après son coup d’éclat.

« Quand j’ai vu le ballon arriver, je me répétais que je ne devais pas être tendu, que je devais relaxer. Je devais être prêt pour ce moment et saisir ma chance. Et une fois que le ballon s’est retrouvé sur mon pied, c’était devenu la même chose qu’à l’université : je devais tout simplement le mettre dans le but », a décrit le produit de Princeton.

« J’ai fait quelques pas, j’ai levé les yeux et j’ai tout de suite aperçu Porter, a raconté Mallace, qui se trouvait à une bonne quinzaine de mètres de la ligne centrale lorsqu’il a effectué sa passe décisive. Il a fait la même chose qu’il faut à chaque jour à l’entraînement. Ce n’est pas pour rien que l’équipe l’a mis sous contrat. C’est un travailleur acharné et il ose prendre des risques. »

« C’est un but fantastique, s’émerveillait Bush, qui montre maintenant une fiche de 6-2-2 en Ligue des champions. Quelle passe! Quelle réception par un gars qui n’en est qu’à ses débuts chez les pros! Et quel calme pour parvenir à marquer dans de telles circonstances! »

« Si un joueur est capable de m’alimenter de la sorte, c’est mon travail de finir en beauté », a humblement rétorqué Porter.

L’Impact n’a jamais perdu en dix matchs à domicile en Ligue des champions (7-0-3). En demi-finale, le Bleu-Blanc-Noir affrontera le gagnant du duel qui oppose le D.C. United au L.D. Alajuelense, un club costaricain. Le match retour de cet affrontement aura lieu mercredi. Alajuelense a remporté le premier par le pointage de 5-2 à domicile.

« C’est de la merde »

La cause de l’Impact semblait perdue lorsqu’il a encaissé un but de German Cano sur un penalty à la 80e minute.
Cano a lui-même été au cœur de la décision contestée de l’officiel Henry Bejarano de décerner une faute dans la surface de réparation, tombant au sol alors qu’il livrait un duel musclé à Laurent Ciman. Lorsqu’il s’est retrouvé avec le ballon au pied, l’attaquant n’a laissé aucune chance à Bush, décochant un plomb qui a échappé à un plongeon du gardien montréalais.

« Je me sentais fautif par rapport au penalty, alors je pense qu’aujourd’hui, mes coéquipiers m’ont sauvé un peu. Je leur rendrai ça pendant la saison », confessait l’arrière belge après la partie.

Sans surprise, la décision a été bruyamment critiquée à l’intérieur du stade. Ciman, tout en concédant qu’elle était tirée par les cheveux, a toutefois admis ses torts.

« C’est vrai que c’était léger, mais mon placement n’était pas bon. J’ai voulu anticiper alors que j’aurais dû –surtout à cet endroit-là – rester derrière. Après, c’est sûr qu’il est tombé un peu facilement, mais bon, c’est ça le football. À la base, je ne pense pas qu’il y avait faute. »

Ses coéquipiers ne se sont toutefois pas montrés aussi diplomates.

« C’est de la merde, a tranché Soumaré. Le penalty, je ne l’ai pas revu, alors je ne peux pas vous dire. Mais chaque fois qu’on joue contre des équipes étrangères en CONCACAF, on a l’impression qu’il y a beaucoup de décisions qui sont... Disons que je n’ai pas été un très grand fan de l’arbitrage au match aller, ni au match retour. Mais écoutez, on ne peut rien y faire. Quant à l’arbitre, s’il arrive à dormir avec ça le soir, c’est son problème. »

« Je ne veux pas trop en dire, s’est retenu Bush. Dans les matchs de CONCACAF, on hérite des arbitres de la CONCACAF et on sait tous à quoi s’attendre avec ces arbitres. »

« L’issue d’un match devrait toujours être décidée par les joueurs et l’arbitre ne devrait jamais être un protagoniste. C’est pourquoi ce fut un match très frustrant pour moi », s’est plaint Frank Klopas, qui a été expulsé du match après le but vainqueur.

« Mais comme j’ai dit aux joueurs, Dieu ne dort jamais. On a eu le résultat qu’on méritait », a ajouté le coach, qui a blagué en disant qu’il purgera la suspension qui vient avec sa punition en écoutant le prochain match avec les Ultras.

Klopas avait désigné le même onze partant que lors du match aller au Mexique. Le milieu de terrain Andrés Romero a donc raté un deuxième match de suite en raison d’une blessure aux quadriceps tandis que Patrice Bernier, Hassoun Camara et Jack McInerney ont de nouveau été relégués à un rôle de réserviste.

McInerney est entré dans le match à la place de Dominic Oduro à la 77e minute.

Les visiteurs avaient quant à eux apporté quatre changements à leur formation de départ. L’attaquant Ariel Nahuelpan, meilleur buteur de la compétition et auteur du filet égalisateur lors du premier duel, a notamment été titularisé et inséré dans un schéma à deux attaquants aux côtés de Cano.