MONTRÉAL – Alors que les joueurs de l’Impact souhaitent désespérément laisser derrière eux la petite tempête qui a secoué l’équipe au cours des derniers jours afin de se concentrer sur un nouvel objectif devenu accessible avec la confirmation de sa qualification en éliminatoires, ne perdons pas de vue une chose : leurs chances de faire un bout de chemin en séries sont meilleures si Didier Drogba est dans ses crampons plutôt que dans son salon.

C’est du moins un avis partagé par Patrice Bernier, qui est toujours convaincu que l’Impact est une formation plus dangereuse avec son numéro 11, qu’il soit investi dans l’action ou simple spectateur.

« [L’entraîneur du Toronto FC] Greg Vanney l’a dit après le match, il était bien content que Didier ne soit pas dans le 18, a souligné le capitaine mardi. Ça prouve que quand il est là, même si c’est sur le banc, il attire l’attention. Qu’il soit sur le terrain dès le départ ou qu’il y entre en cours de match, il peut faire la différence et c’est ce qu’on s’attend qu’il puisse faire pour nous en cette fin de saison. »

Drogba a joué un rôle secondaire dans les récents succès de l’Impact, qui vient de récolter sept points sur une possibilité de neuf avec l’Italien Matteo Mancosu comme attaquant dans sa formation de départ. Mais Bernier assure que les observations et les conseils de la légende ivoirienne confèrent une valeur inestimable à sa simple présence.

« Didier a joué à un niveau élevé, un niveau que personne ici n’a atteint, et avec son sens tactique, son expérience, il nous parle continuellement. Même dans les dernières semaines, il a continué à dialoguer et à nous donner de l’information pour s’assurer que ça soit plus facile pour nous. Il continue de jouer le même rôle qu’il remplit depuis qu’il est arrivé. »

Bernier a confié s’être entretenu avec Drogba lundi soir et avoir constaté que l’état d’esprit du dangereux buteur était bon.

« Depuis le début, il n’a pas changé. Sa mentalité, c’est d’être avec le groupe et d’aller le plus loin possible pour laisser une trace dans ce club. Alors on continue, on avance », a dit le Brossardois, qui a préféré garder secrètes les paroles que Drogba a réservées à ses coéquipiers à son retour au travail.

« Tout ce que je peux dire, c’est que j’ai beaucoup de respect pour Didier en tant que joueur et en tant qu’homme. Il apporte beaucoup à ce club », a conclu Bernier.

« Didier est un grand champion et je suis sûr qu’il va tout faire pour aider cette équipe », a pour sa part affirmé l’entraîneur Mauro Biello, clairement désireux de passer à autre chose.

Une distraction

La décision de Drogba de quitter l’entourage de l’équipe quand il a appris de la bouche de Biello qu’il ne débuterait pas le match de dimanche contre Toronto a créé une commotion justifiée à un moment où le reste de l’équipe s’en serait bien passé.

« L'ambiance dans l'équipe est très bonne »

Bernier a admis que certains joueurs ont été mis au courant de toute l’affaire dans le vestiaire de l’équipe dans les heures qui ont précédé cet important derby.

« Il y en a qui étaient surpris parce qu’ils ne le savaient pas. Mais il fallait se concentrer, on avait un match à jouer », a raconté Bernier.

Après le nul de 2-2 qui permettait à l’Impact d’assurer sa place en séries, c’est la désertion de l’un de ses leaders qui occupait tout l’espace dans le vestiaire. Plutôt que de commenter la réussite sportive qui venait d’être accomplie, les vétérans Evan Bush, Hassoun Camara et Bernier ont été bombardés de questions quant à l’absence de Drogba.

Mardi, aucun membre d’un imposant contingent de journalistes affectés à la couverture de l’équipe n’a assisté à l’entraînement dirigé par Biello. Tous faisaient plutôt le pied de grue à l’entrée du Centre Nutrilait pour ne rien manquer d’une potentielle sortie en douce du joueur mécontent et de l’annonce imminente du président Joey Saputo. Aucune question n’a été posée sur le l’important match qui attend l’équipe dimanche prochain en Nouvelle-Angleterre.

« C’est sûr qu’après le match, ce n’était pas les questions auxquelles je voulais répondre », a convenu Bernier lorsqu’on lui a demandé si l’incident qui accapare l’attention depuis 48 heures pouvait être qualifié de distraction.

Pas de rôle défini pour Drogba

Vu comme un sauveur à son arrivée à Montréal l’été dernier, Drogba aura finalement été une grosse patate chaude placée entre les mains d’un entraîneur inexpérimenté qui n’était peut-être pas outillé pour cohabiter avec une personnalité aussi forte dans son vestiaire.

« Drogba va continuer de contribuer aux succès de l'équipe »

« Il n’est pas difficile à gérer, a répondu Biello quand on lui a demandé quelle avait la principale difficulté, pour le jeune pilote qu’il est, de diriger un joueur accompagné d’une telle aura. Chaque joueur a son caractère et il faut les gérer d’une différente manière tout en leur faisant comprendre que le collectif prime. »

Critiqué par certains observateurs, applaudi par d’autres, Biello persiste et signe. Rien dans ses réponses ne laisse percevoir une pointe de regret à la vue de la tempête qu’a causée sa gestion de son effectif.

« C’est de l’expérience. À la fin, j’ai toujours grandi comme ça. Je travaille pour une institution et c’est l’institution qui contrôle. Je suis entraîneur, je dois prendre des décisions et j’en ai pris une qui était pour le mieux de l’équipe. »

Les prochains choix tactiques de Biello seront évidemment scrutés à la loupe. Puisqu’il sera disputé sur la surface synthétique du Gillette Stadium, Drogba ne devrait pas prendre part au dernier match de la saison régulière, match qui pourrait servir à l’Impact pour se prévaloir de l’avantage du terrain au premier tour éliminatoire. Ça, c’est la théorie.

Comme à son habitude, Biello n’a toutefois pas voulu dévoiler ses plans pour le prochain match, pas plus que pour la fin de la saison. « Je n’ai pas dit à Didier qu’il allait démarrer sur le banc jusqu’à la fin de la saison », précise toutefois l’entraîneur.