MONTRÉAL – Soit Mauro Biello ne s’y prend pas de la bonne façon pour passer son message, soit certains de ses joueurs ont décidé qu’ils n’avaient tout simplement plus le goût de l’entendre. 

À défaut de détenir tous les éléments d’information qui pourraient permettre d’en arriver à une conclusion certaine, il apparaît à tout le moins légitime de lancer la réflexion au lendemain d’une autre déconvenue inconcevable de l’Impact à domicile.

Impact 1 - Revolution 3

Depuis des semaines, Biello multiplie les signaux de détresse devant les performances sans conviction de son équipe. Après un blanchissage contre Chicago, il a offert des excuses publiques aux partisans. Après une volée contre Orlando, il a accusé ses joueurs de se croire meilleurs qu’ils ne le sont.

Samedi, le coach avait l’air trop assommé pour brûler un autre fusible. Personne n’aurait pu le blâmer s’il l’avait fait alors qu’une foule historiquement reconnue pour sa clémence venait de chasser ses favoris du terrain au son de bruyantes contestations.

Battu 3-1 par le Revolution de la Nouvelle-Angleterre, l’Impact a désormais plus de défaites que de victoires cette saison au Stade Saputo. Depuis qu’il a amorcé sa saison avec quatre triomphes à ses six premiers matchs, il n’en a gagné que cinq sur ses 23 suivants. Et ce qui a pendant longtemps été tenu pour acquis est aujourd’hui loin de l’être : s’il ne se réveille pas, l’Impact sera aspiré sous la ligne rouge sur laquelle s’assoiront à la fin de la saison les six équipes qualifiées pour les séries éliminatoires dans l’Association Est.

Comment justifier cette dégringolade? Comment expliquer qu’un assemblage aussi talentueux ait aujourd’hui l’air si fragmenté, ses composantes si incompatibles?

On ne pourra jamais remettre en doute le dévouement de Mauro Biello pour le club auquel il a donné plus de vingt ans de sa vie. « Je suis quelqu’un qui veut gagner. Il n’y a personne qui veut gagner plus que moi. Pas le président, pas les fans, pas le gars sur Twitter. Il n’y a personne qui veut gagner plus que moi, ça c’est clair », a-t-il voulu faire comprendre samedi soir.

Mais avec les récentes contre-performances accumulées par son équipe, il est permis de se demander si sa dévotion pour le logo est présentement partagée par un nombre suffisant de fidèles dans son vestiaire.

« Certains gars ont travaillé », a laissé tomber Biello au milieu d’une longue réponse lors de son point de presse d’après-match. Une façon peu subtile de faire remarquer que d’autres non.

Des manquements inexplicables

Biello avait fait ses devoirs et savait exactement quel genre de problèmes le Revolution allait poser à son équipe en fin de semaine. Au complexe d’entraînement, une bonne portion de la préparation avait été consacrée à la protection de la surface de réparation face à la menace que représentait notamment Kei Kamara. La réponse de ses joueurs fut désolante.

« Ils ont marqué précisément sur le jeu qu’on avait pratiqué jeudi, a-t-il déploré, encore médusé. Le ballon est dans le coin, il sort de la surface, il est centré... mais on rate notre couverture et on se retrouve en arrière 1-0. Au bout du compte, il faut exécuter. »

Hassoun Camara, dont le leadership positif se reflète des deux côtés des lignes de touche, s’est porté à la défense de son entraîneur lorsqu’on lui a demandé si le message de ce dernier se rendait bien à toutes les oreilles dans le vestiaire de l’Impact.

« Bien sûr, a répondu sans hésiter le grand numéro 6. Les choses vont être difficiles dans les prochains jours, les prochaines semaines parce qu’on va vouloir chercher la petite bête, se demander si le coach est à la hauteur ou autre. Je pense qu’on a bien travaillé cette semaine et à la fin, le coach ne peut rien faire lorsque vous prenez un but à la première minute comme ça. Vous pouvez mettre Mourinho en face, si les joueurs ne sont pas concentrés et déterminés dès la première minute, c’est qu’il y a un problème collectif et c’est à nous, les joueurs, de l’assumer. »

« Tactiquement, nous devons faire un peu plus ce que le coach demande de nous et le supporter de cette façon », a aussi glissé Didier Drogba au milieu de sa mêlée de presse.

Biello donne l’impression d’être une bonne tête de foot, un pilote minutieux et travaillant. Cet homme devant qui des milliers de partisans étaient prêts à se prosterner à son arrivée aux commandes de l’équipe n’est certainement pas devenu un mauvais entraîneur au cours de la dernière année. Pas plus tard que la semaine dernière, son capitaine, Patrice Bernier, vantait la qualité du son travail et de celui de ses adjoints dans la préparation des troupes.

Mais quelque chose, quelque part, semble brisé entre l’envoi et la réception du message. Comment expliquer, sinon, le manque de concentration grossier et récurrent, l’effort approximatif ou encore l’indiscipline occasionnelle? Comment expliquer que des détails anodins, des erreurs d’amateurs, continuent de faire grincer cette machine qui devrait depuis longtemps être rodée au quart de tour?

Le spectre de 2013

La glissade actuelle de l’Impact n’est pas sans rappeler la saison maudite de 2013 où l’équipe, alors sous la férule de Marco Schällibaum, avait gaspillé un solide début de campagne avec un effondrement spectaculaire dans la deuxième portion du calendrier. Les Montréalais s’étaient qualifiés sur la fesse pour les séries, mais en avaient été cavalièrement expulsés par le Dynamo de Houston.

Biello, qui était aux côtés de Schällibaum pour cette débandade qui avait coûté son poste au volcan suisse, ne croit pas que le lien soit justifié.

« Je pense que ce qui est arrivé en 2013 est totalement différent. Le groupe n’était pas le même et il y a d’autres choses qui étaient arrivées qui ne se comparent en rien avec cette année », a-t-il réfuté.

« Chaque saison a son histoire et je pense qu’on a une meilleure équipe qu’en 2013, a statué Camara avant de soumettre un autre vote de confiance envers Biello. On a un coach sur lequel on compte et qui a une grande confiance en nous. À la fin, c’est nous, les joueurs, qui sommes sur le terrain. On doit prendre nos responsabilités. »

« Il faut mieux jouer, conclut Biello. C’est juste ça, ça commence avec ça. Jouer mieux, s’entraîner mieux. Il faut être prêt à se battre et à la fin, on pourra s’en sortir. »

C’est le genre de message rempli d’espoir qu’on entend à répétition depuis des mois. Finira-t-il par se rendre aux destinataires concernés?