Et maintenant, le vrai tournoi commence. La phase de groupe, c’était bien, mais ce n’est qu’à partir d’aujourd’hui qu’on pourra statuer sur les véritables aspirations des prétendants au titre de la coupe dorée, un vase aussi appelé: Gold Cup. En cette période où certains se questionnent sur les rapports de force du traité de l’ALENA, disons que l’occasion de renverser la hiérarchie du ballon rond sur le continent tombe à point pour le Canada - ne serait-ce que le temps d’un tournoi. Mais pour y arriver, il faudra d’abord s’imposer contre les finalistes de l’édition 2015: la Jamaïque. Voici quelques éléments-clés à surveiller dans ce quart de finale disputé jeudi 19h 30 à RDS.

Vitesse des Reggae Boyz

Sur la piste de course comme en bobsleigh, un cliché colle à la peau des Jamaïcains: la vitesse est leur arme no 1. Pour les hommes d’Octavio Zambrano, qu’on le veuille ou non, il s’agira d’un des facteurs à prendre en considération sur la pelouse du stade de l’Université de Phoenix. Des joueurs comme Darren Mattocks en attaque - 4 buts à ses 5 derniers matchs en sélection - Kemar Lawrence et Alvas Powell sur les flancs, représentent tous un danger si on leur laisse de l’espace pour atteindre leur vitesse de pointe. « La Jamaïque fait penser à une équipe MLS », a d'ailleurs laissé entendre le capitaine unifolié Patrice Bernier dans le cadre d'une entrevue accordée à notre balado: Loin de s'en foot #LDSF.

Le Canada s’est toutefois bien défendu face à une menace semblable lors du match contre le Honduras (0-0). Zambrano avait alors opté pour une variante plus « athlétique » dans sa ligne arrière avec Manjrekar James dans l’axe et Sam Adekugbe sur le flanc gauche. Les deux ayant bien répondu à l’appel, il est fort possible que Zambrano soit tenté de compter sur eux à nouveau lors du quart de finale. Autrement, ce sera le retour de Dejan Jakovic dans la charnière, un joueur expérimenté qui sait anticiper, mais qui est plus vulnérable en 1 contre 1 et sur les longs ballons. Sur le flanc, Zambrano pourrait donc poursuivre avec le solide tandem de Jong-Adekugbe, une formule ayant fort bien fonctionné.

La clé dans cette affaire, c’est de bien rester organisé, ce que le Canada a réussi à faire lors de ses matchs de la phase de groupe. Rester organisé, c’est demeurer compact, avec une distance réduite entre les lignes, c’est-à-dire entre les défenseurs et les milieux, entre les milieux et les attaquants, etc. À défaut de cela, on a un match qui risque de se transformer en compétition d’athlétisme. Et à ce jeu-là, il sera difficile pour le Canada de supplanter la Jamaïque, quoique

Les armes du Canada

Assez parlé de l’adversaire, ce qui étonne bien des observateurs dans ce tournoi, c’est la fluidité de la circulation du ballon quand le Canada en prend possession. La confiance en soi des joueurs sur le terrain est un contraste éclatant avec [NDLR: avertissement d’allusion scabreuse] l’étiquette du footballeur unifolié qui souille son caleçon dès que l’adversaire fait mine de le mettre sous pression.

Premiers artisans de la réussite canadienne, les milieux de terrains Samuel Piette et Scott Arfield. Le Québécois de Le Gardeur vient d’ailleurs d’être nommé au sein de l’équipe étoile de la phase de groupes du tournoi par le réseau ESPN. Piette a réussi 128 de ses 141 passes tentées lors des trois derniers matchs pour un taux de précision de 90,7%. « L'un de nos meilleurs joueurs dans le tournoi », renchérissait Bernier en faisait allusion à son coéquipier. Son entente avec Arfield est excellente, ce qui a permis au Canada de percer les lignes adverses à plusieurs reprises contre le Costa Rica et le Honduras.

Pour sa part, le joueur de Burnley en Premier League anglaise continue à démontrer tout l’éventail de son talent à cette Gold Cup. Son centre-tir contre le Costa Rica aura permis au Canada de marquer un but haussant la confiance du groupe à un moment important dans le tournoi. Contre la Jamaïque, Arfield devra trouver l’espace dans le dos de Je-Vaugh Watson pour embrouiller la défense des Reggae Boyz. Bien appuyé par Bernier ou encore Jonathan Osorio, l’axe Piette-Arfield représente la pierre angulaire du milieu de terrain canadien.

L'autre arme - de moins en moins secrète - du Canada provient de la capacité d’improviser du jeune Alphonso Davies, lui aussi nommé sur l’équipe étoile du tournoi par le réseau de télé américain. Déjà trois fois buteur dans la compétition, Davies alterne encore entre les contrôles ratés et les dribbles spectaculaires, mais il est néanmoins celui qui parvient le mieux à concrétiser lorsque l'ouverture se présente. Qu'il soit partant ou remplaçant, s’il arrive à chasser la nervosité qui le pousse parfois à précipiter ses actions, Davies aura certainement son mot à dire lors de ce match à élimination.

Joker et autres cartes cachées

Zambrano a bien joué ses cartes depuis le début de cette Gold Cup. Et comme dans une partie de poker 5-Draw, l’entraîneur canadien s’est prévalu de son droit de changer un de ses joueurs pour ajouter un atout à son effectif avant la montée des enchères. L’addition de Cyle Larin à l’effectif canadien pourrait donc changer la donne. Mais de quelle manière utiliser l’attaquant d’Orlando City? Lucas Cavallini s’est bien acquitté de sa tâche jusqu’à présent. Jackson-Hamel a aussi contribué en tant que remplaçant et même comme partant. Avait-on réellement besoin de Larin en ce moment?

Bien que l’attaquant ontarien n’ait pas le même rendement en sélection qu’en MLS, il faut reconnaître que son arrivée ajoute du poids à l’avant. Et dans l’état d’esprit actuel de l’équipe canadienne, Larin peut certainement servir de référence à la pointe du navire. Des ballons servis par Arfield, de Jong ou même Michael Petrasso, l’ailier reconverti en latéral droit, représentent un potentiel alléchant pour un joueur du gabarit de Larin. Pour un attaquant, tout est souvent question de confiance et de bonnes dispositions. S’il arrive dans le camp canadien avec une mentalité conquérante, je suis d’avis que son intégration sera déterminante dès le match contre la Jamaïque.

Outre l’utilisation de Larin, ce qu’on surveillera dans l’affrontement entre Canadiens et Reggae Boyz, c’est le duel de gardiens entre Milan Borjan et Andre Blake. Tous les deux très bons lors des matchs de groupe, ces portiers sont agressifs et possèdent le sens du spectacle. En contrepartie, ils ont également une tendance à s’exposer à une sortie mal calculée à chaque match. High risk, high reward, comme on dit à Kingston ou encore à Kingston. L’accent peut varier dans la façon de prononcer, mais qu’on soit en Ontario ou dans les Caraïbes, on s’entend qu’un quart de finale de vase doré, ça reste un jeu d’erreurs. Celui qui en commettra le moins devrait donc permettre à son équipe de l’emporter.