COLLABORATION SPÉCIALE

Rester coincée dans les toilettes des vestiaires quelques minutes avant mon premier match professionnel officiel, c’est malchanceux.

Que cet incident fasse en sorte que lorsque j’arrive finalement au terrain (après avoir utilisé une force surhumaine pour déverrouiller la serrure), la clôture y donnant accès soit déjà verrouillée, ça confirme que ce n’est pas aujourd’hui que je vais gagner à la loterie. Je ne m’imaginais pas regarder le début de mon premier match professionnel entre deux maillons de métal, mais malgré ce début cahoteux, le reste de la journée fut un succès.

Après une victoire de 4-0 face à Jitex en coupe de Suède, nous sommes provisoirement au sommet de notre groupe. (NDLR; La coupe de Suède est une compétition disputée en parallèle à la saison régulière. Elle inclut les équipes de toutes les divisions.)

Deux semaines plus tard, nous visitons Hacken pour notre dernier match de ronde préliminaire. Une nulle ou une victoire contre celles qui ont fini en deuxième position du championnat l’an dernier et nous accédons aux demies-finales.

Il est 7 h 30 et nous sommes déjà en route vers Gothenburg. Lorsque mon cadran a sonné à 6 h 30 ce matin, le trajet de 3 h 30 ne me donnait qu’une envie: rester en position horizontale, les yeux fermés. Vers 10 h, nous nous arrêtons pour manger, et je ne suis toujours pas complètement réveillée.

Si tôt dans la journée, les boulettes végétariennes et les pommes de terre ont de la difficulté à passer. Au réchauffement d’avant-match, cet état amorphe m’habite toujours. J’avais espoir qu’être habillée en couleur néon de la tête au pied m’éveille instantanément, sans succès. L’arbitre siffle pour annoncer le début du match, et il devient rapidement évident que mes coéquipières partagent mon problème d’énergie.

Partout sur le terrain, c’est Hacken qui dicte la cadence. Ce n’est que 20 minutes et deux buts de l’équipe adverse plus tard que nous commençons finalement à trouver notre rythme. Cinq minutes avant la fin de la première mi-temps, nous réussissons à réduire l’écart. Le score à l’entracte est de 2 à 1 pour l’équipe hôte.

C’est la première fois de l’année que nous sommes menées, mais à en juger par l’atmosphère électrisante  dans le vestiaire, on croirait que la première demie s’est déroulée en notre faveur.

Le message est clair: ce match est à notre portée. Après quelques ajustements tactiques, nous sommes de retour sur le terrain, prêtes à changer l'allure du match. Au cours des 20 premières minutes de la seconde mi-temps, notre jeu agressif pousse Hacken à se replier défensivement.

Pour moi, il n’y a aucun doute que le but égalisateur approche. Puis, sur une contre-attaque, Hacken trouve le fond de notre filet. 3 à 1, la tâche devient soudainement plus ardue. Malgré tous nos efforts, nous ne réussissons pas à répliquer, et le score demeure inchangé.

En rentrant au vestiaire après le match, j’aperçois une dame inconnue assise près de la salle de bain. On m’indique qu’elle est ici pour le contrôle antidopage aléatoire. Quoi de mieux après une défaite nous empêchant d’accéder aux demi-finales que de faire pipi dans un pot devant une étrangère.

Heureusement, ce n’est pas moi qui suis choisie cette fois-ci. Je peux toutefois déjà lire l’appréhension sur le visage des deux heureuses élues. Une de mes coéquipières m’explique qu’une d’entre elles a pris 3 heures l’an dernier avant d’y arriver. Ça augure mal pour notre réservation chez Lilla Napoli, une des meilleures pizzerias en Suède. Ce matin, Beta nous avait fait part de ce plan avec enthousiasme, appuyant que ça puisse prendre des mois avant d’avoir une table à ce restaurant.

Une heure et demie plus tard, nous avons officiellement manqué notre réservation. Assises sur la chaîne de trottoir à côté du stade de Hacken, on aperçoit au loin un signe familier: le gros M jaune du McDonald’s. Sans plus tarder, on part en quête de frites et de McFleury. Ce n’est que trente minutes plus tard que nos deux coéquipières malchanceuses nous rejoignent.

Nous sommes de retour à Kristianstad vers 22 h 30. En chemin, nous nous sommes arrêtées dans un second McDonald, le premier n’ayant plus d’options végétariennes.

Le trajet de 3 h 30 m’a permis de réfléchir sur notre match. Bien que ce n’est pas le résultat que nous voulions, c’est possiblement le résultat dont nous avions besoin. À quelques semaines du début de la saison régulière, il est bon d’avoir un rappel que le chemin vers le sommet ne sera pas sans embuches, et que pour y arriver il faudra savoir surmonter ces obstacles ensembles.