Le calendrier de la Coupe du monde de rugby est bâti de curieuse façon. De gros week-ends, des jours de semaine plus légers, parfois même une journée de repos. Mais surtout, il n’est pas tout à fait équitable. Bâti pour mettre en vedette les « grosses » équipes du tournoi, ce sont les négligés, pourtant essentiels aux succès des premiers, qui paient la note. Ainsi, pour prendre un exemple, la France a affronté le Canada le 18 septembre, ayant joué son match précédent contre le Japon, le 10. Le Canada s’était frotté au Tonga, dans une magnifique victoire d’ailleurs, le 14. Entre les deux, trois petits jours de repos alors que la France en aura eu sept. Au rugby, ça fait une grosse différence, surtout à l’échelle d’un tournoi disputé sur six semaines.

Ce décalage s’explique par des impératifs marketing, mais il ne pourra tenir la route éternellement. Viendra un jour où les faire-valoir vont se rebeller… On dit de cette Coupe qu’elle est celle qui prouve qu’il n’y a plus de petites nations, que l’écart entre les bons et les novices s’amenuise de plus en plus. C’est vrai. Mais si on veut un jour que tous aient une chance égale dans la compétition, il faudra réviser la façon de faire les calendriers. C’est un problème beaucoup moins évident en Coupe du monde de soccer où les matchs sont répartis de façon égale, avec le même nombre de jours de repos entre chaque affrontement, parce qu’on joue tous les jours le même nombre de matches. À tout regrouper surtout sur les fins de semaines, c’est certain que ça amène des disparités.

Arbitrage

J’adore l’arbitrage de cette Coupe du monde. C’est fait avec brio (petit bémol sur M.Joubert…) et doigté. L’arbitre et les juges de touche ont un micro et une oreillette et peuvent communiquer entre eux. Mieux, nous les entendons! On peut alors apprécier le travail de l’arbitre à sa juste valeur. Au rugby, il est un véritable chef d’orchestre, un meneur de jeu. Les meilleurs sont en communication constante avec les joueurs. Avant de siffler un hors-jeu, l’arbitre le mentionne au joueur en faute. Si celui-ci ne se replace pas vite, alors il sifflera. À chaque fois qu’il pénalise, il explique. On sait quand il y avantage, on sait quand il se termine. L’équipe qui ne joue pas assez vite se fera rappeler à l’ordre verbalement avant qu’on entende le coup de sifflet. L’arbitre maintient le dialogue avec ses joueurs, y allant même d’une pointe d’humour à l’occasion. M. Dave Pearson, après avoir été accidentellement renversé sur un sol boueux par le capitaine Américain Todd Clever, a ajouté aux remontrances qu’il lui adressait : « Et vous aurez à payer ma note de nettoyage ». Ce qu’il semble que Clever n’a pas fait.

Un autre bon point pour l’arbitrage, c’est la reprise video. Au rugby, on y a droit, pour les essais seulement. Et c’est bien suffisant. Mais dès qu’il a un doute, l’arbitre demande au juge vidéo son avis. Et ça se fait toujours avec doigté et courtoisie. « Matt (ils se nomment par leur prénom), y a-t-il une raison pour laquelle je ne devrais pas accorder cet essai? » ou « Matt, y a-t-il un essai? » Et la réponse vient. « Dave, je ne vois aucune raison pour laquelle vous n’accorderiez pas cet essai » ou « Dave, le pied du joueur était en touche lorsqu’il a aplati le ballon, vous devriez refuser l’essais. » Et bien sûr, même s’il a le pouvoir de décider par lui-même, l’arbitre suit toujours les conseils de ses adjoints.

Pas qu’à la video d’ailleurs. Lors de jeux considérés déloyaux, le juge de touche peut le signaler à l’arbitre qui lui demandera immanquablement son avis sur la mesure à prendre. Et immanquablement, il suivra l’avis. Toutes ces mesures font que les arbitres sont très peu contestés par les joueurs qui leur vouent un respect exemplaire. Dans ce sport physique à l’extrême, on pratique tout de même une courtoisie réjouissante.

Le Canada

C’était rêver en couleur que d’espérer une victoire canadienne contre les Bleus. Mais, durant la première mi-temps à tout le moins, le Canada a presque tenu le coup. C’était 19–10 à la mi-temps…Pritchard avait raté deux pénalités et Munro un drop. Faites le calcul, ç’aurait pu être 19–19.

Mais il faut être honnête, ce n’aurait été que retarder l’inéluctable. Le botteur et demi de mêlée Morgan Parra a été irréprochable. Six pénalités en six, quatre transformations sur quatre. Dans une Coupe du Monde où bien des botteurs ont des ratées, c’est tout un exploit. En deuxième mi-temps, les Français ont explosé. Trois essais, juste assez avec celui de la première mi-temps pour leur donner le point bonus offensif. Les Canadiens ont bien tenté de coller au score, mais la commande était trop forte. Pourtant, la France n’a pas encore convaincu. Il faudra qu’elle trouve mieux contre la Nouvelle-Zélande samedi prochain. Quant au Canada le match contre le Japon est à sa portée. Autant en profiter avant de rencontrer les All-Blacks… Réussir à prendre le troisième rang de la poule serait s’assurer d’une participation à la Coupe du monde 2015. Ce n’est quand même pas si mal.