Samedi en fin de matinée, nous étions de retour au garage de la STM à Ville Lasalle. En compagnie de Nicolas, notre chauffeur d’autobus, nous venions de livrer des paniers de Noël chez six familles nécessiteuses en collaboration avec la Société St-Vincent de Paul. Notre matinée complétée, on jasait et mangeait des bouchées dans la cafétéria de la STM. Ma femme a avalé sa bouchée de salade de travers en voyant la nouvelle aux infos. Congédiement de Martin titrait la nouvelle. Bon, jusque là, on ne pouvait pas dire qu’il s’agissait d’une nouvelle surprenante et il n’y a jamais de bons moments pour remercier un entraîneur-chef.

Contrairement aux familles chez lesquelles nous venions d’apporter des paniers de Noël, Jacques Martin ne manquera de rien à l’approche des Fêtes. Il recevra la totalité de son salaire jusqu’à la fin de son contrat et au-delà.

Ce n’est que de retour à la maison que j’ai pu enfin mesurer toute la portée de ce renvoi.

Aujourd’hui, les qualificatifs manquent encore pour expliquer la situation. La nomination de Randy Cunneyworth au poste d’entraîneur-chef du Canadien vient de clairement démontrer que le fait français dans l’organisation, dans l’organigramme, dans les tripes de cette grande organisation du Tricolore n’existe plus.

Dorénavant, l’homme le plus médiatisé du Québec est d’origine ontarienne, unilingue anglais. L’organisation du Canadien rétorque que cette décision est intérimaire. Ce n’est que de la foutaise. Pierre Gauthier n’a-t-il pas déclaré « qu’une langue, ça s’apprend ! » Ben voyons.

Le Québec est la province canadienne la plus bilingue du Canada mais est-ce une raison pour insulter toute la population francophone ?

Randy Cunneyworth n’est en poste que depuis 48 heures et déjà, tous les boucliers du Québec sont levés. Certains exigent même le boycott de tous les produits Molson jusqu’à nouvel ordre.

Le président du Canadien, Geoff Molson se cache actuellement derrière la décision hockey de son directeur général et il a tort, sur toute la ligne. Ce n’est pas une décision hockey, c’est une rupture, une cassure avec notre histoire. La décision de Pierre Gauthier, qui habite les Etats-Unis et y payent ses impôts prouve que cette rupture est même faite avec sa province natale.

Le Québec est-il aujourd’hui en manque de gens compétents pouvant prendre les rênes du Canadien ? Mais que s’est-il donc passé pour que la population du Québec mérite un tel camouflet ? Pour que nos entraîneurs soient si maltraités, oubliés, rejetés comme de vieilles godasses usées.

Je ne connais pas Cunneyworth. Je l’ai croisé lors de son bref passage avec les Jets à la fin des années 80 alors que j’y étais journaliste. C’est clair qu’il ne pouvait pas refuser cette offre d’emploi, qu’il ne pouvait pas refuser de monter en grade mais il vit déjà sur du temps emprunté. Cunneyworth est en sursis parce que la grogne populaire n’ira qu’en s’accentuant.

Chez le Canadien, il faudra une sérieuse prise de conscience. Verriez-vous un unilingue français à la barre des Leafs de Toronto, vous ?

Aujourd’hui, le Canadien, c’est la grande noirceur, le retour aux années 40. Dommage mais peut-être est-ce le coup de pied au derrière que ça prenait pour faire renaître chez les Québécois ce sentiment de fierté d’être ce que nous sommes et d’aspirer à être reconnu comme un grand peuple.

Stéphane Langdeau

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