Par David Boutin (Chroniqueur historique)
Ma dernière série d'articles a portée sur les duels que se sont livrés les grands constructeurs engagés dans le championnat du monde de Formule 1. Impliquant des sommes considérables dans ce sport dans un but commercial ou bien à titre de développement technologique, ces derniers se devaient d'être mis à l'avant-plan d'une chronique à caractère historique.

Mais à la base, qu'est ce que la F1? Un championnat de pilotes ou de constructeurs? Bien sur, certains diront qu'avec une voiture ordinaire on ne peut prétendre au titre, donc par conséquent, il s'agit d'un championnat de voitures. Suffit d'avoir la meilleure du plateau et hop, le tour est joué.

Hum.. dans les faits, c'est pas si simple que ça. Si cela était vrai, comment expliquer que deux pilotes d'une même écurie n'arrive pas au même résultat? Le facteur humain; ça vous dit quelque chose? Voilà la différence. Et c'est pourquoi la F1 a pour nom entier « Le Championnat du Monde des Pilotes de Formule 1 ».

Qu'est ce qui deffraie les manchettes de l'actualité de ce merveilleux et démocratique monde de la F1? Le dernier développement aérodynamique des dérives latérales d'une McLaren conçues un mardi soir à 2h00 du matin par une bande d'ingénieurs? Ou bien les guerres d'insultes entre Villeneuve et Montoya? Ou bien encore mieux, le véritable duel sur la piste entre Schumacher et ses adversaires de ces dernières années?

D'abord et avant tout, ce sont les pilotes qui font que la F1 est ce qu'elle est. Ces derniers sont mis à l'avant plan par ce qui les oppose soit leur ambition, leur tempérament, leur culture et leurs résultats.

A noter également, l'apport de grands noms à la F1 tel les promoteurs, ingénieurs, figures politiques, journalistes…

Au fil des prochaines semaines revivont ensemble ces grandes rivalités qui opposèrent ces as du volant.

D'entrée de jeu il faut préciser qu'au fil des années les rivalités et duels ont été engendrés par les médias qui créaient eux mêmes ce côté mythique du sport automobile. Par conséquent, au début du siècle, les médias ne jouaient pas encore ce rôle si prédominant.

Cependant, la première véritable « star » du sport nous venait de France où les premières courses d'envergure fûrent organisées. Georges Boillot, ingénieur de profession et pilote Peugeot en vint même jusqu'à représenter tous les espoirs de la France avant le Grand Prix de l'ACF en 1914 qui opposait Peugeot contre les Mercedes. Seul contre cette armada il dû se résigner en fin de course à l'abandon suite à une rupture de valve.

La première grande rivalité entre deux pilotes fût sans contredit celle opposant les deux Italiens Achille Varzi et Tazio Nuvolari. D'origines et de mode de vie fort différents, ces deux as passsionnèrent tant leurs partisans respectifs que le monde de la course automobile en fût divisé en deux alors que les partisans de l'un étaient nommés les « Varzistes » et ceux de l'autre, les « Nuvolaristes ».

Les médias de l'époque virent dans les différences de style et de personnalités de chacuns là de quoi trouver n'importe quoi à faire scandale tel la rumeur que Varzi aurait tenté de tuer l'autre dans son sommeil la nuit avant une course d'importance. On est bien loin des gué-guerres d'égocentrisme actuelle…

Varzi était surnommé le « métronome » car la précision et la finesse de son pilotage permettait au chronomètre d'indiquer une régularité au tour encore jamais vue à l'époque. Pour preuve, au Grand de Prix de Monza en 1930, l'écart maximal enregistré sur le temps moyen était d'une seconde et demi!!! A vrai dire, il en devenait même monotone de voir le pilote de Galliate tourner sans la moindre dérobade ou freinage plus appuyé qu'un autre.

De son côté, Nuvolari avait tout pour plaire aux foules car sa fougue et sa capacité d'improvisation lui permettaient des acrobaties de toutes sortes tout en lui donnant plus souvent qu'autrement la victoire en fin de course.

Tous deux introduits aux sports mécaniques par les courses motos, ils se retrouvèrent tous les deux en course automobile au volant de Bugatti engagées par Nuvolari lui même en 1928. Plus expérimenté, Nuvolari aura le dessus plus souvent qu'autrement lors de cette saison. Las de jouer les seconds violons, Varzi se verra rapidement confier le volant d'une Alfa Romeo P2 lui donnant l'opportunité « d'exploser » son talent dès la fin de l'année.

L'anecdote de course la plus connue ayant mis au prise les deux frêres ennemis vint au Mille Miglia de 1930. En fin de course, croyant la victoire en poche Varzi fût surpris de voir Nuvolari le doubler dans les derniers mêtres d'une longue et pénible course se terminant tard en soirée. En effet, bien des kilomètres auparavant, Varzi avait bien reconnu dans ses rétroviseurs les phares de la voiture de Nuvolari, mais pourtant, ils avaient disparus depuis longtemps. Qu'est-ce qu'a bien pu manigancer Tazio pour qu'il réapparaisse de nulle part ainsi?

Sachant trop que sa remontée serait évidente par le rapprochement de ses phares; il les éteignit jusqu'à la toute fin et se colla à Varzi!! Déboitant à la dernière seconde il laissa ce dernier sans aucune chance pour répliquer. Tous qualifièrent la manouvre de géniale, pour Varzi il s'agissait d'une « mauvaise farce ».

Plus souvent qu'autrement, leur rivalité eu lieu en dehors de la piste entre autre alors que Nuvolari tentait de rejoindre la puissante équipe d'Auto Union mais les manoeuvres en coulisse de Varzi et Hans Stuck l'en empêchèrent.

A l'inverse, alors que Varzi tente désespérément de convaincre son équipe qui'il s'est débarrassé de sa dépendance à la morphine, Nuvolari lui damne le pion et reprend son volant en 1937.

Jamais vraiment remis de son problème, le pauvre Achille abandonna le sport juste avant la deuxième grande guerre pour y revenir l'instant de quelques courses avant de perdre la vie lors du Grand Prix de Berne en 1948.

Tazio Nuvolari revint également à la course après le conflit n'étant que l'ombre de lui même car souffrant de graves problèmes pulmonaires. Il mouru de cette maladie en 1953.

Les livres d'histoire recellent d'anecdotes entre ses deux hommes, il s'agit là pourtant de l'une des rivalités la plus cordiales du sport. En effet, les deux se vouaient tout de même une certaine admiration. Varzi surnommait Nuvolari « Maestro » et alors qu'une course de confrontation directe leur avait été proposée Nuvolari trancha la question:
Si je perds, je ne retrouverai jamais la paix, et si je gagane j'aurai de la peine pour toi. Quoi qu'il arrive, notre amitié en sera touchée.

Une simple poignée de main mit fin à la discussion pour toujours.