Il n’aura pas le moindre point à défendre au classement, ni de bourse mirobolante à empocher, pas plus que la possibilité de décrocher le 1er titre ATP qu’il convoite tant. Mais qu’à cela ne tienne, Félix Auger-Aliassime se dit fébrile à l’idée de renouer avec la compétition à compter de samedi, dans le cadre de sa participation à la 2e édition de l’Ultimate Tennis Showdown, cette compétition au format largement repensé par l’entraîneur de renom Patrick Mouratoglou.

Ayant dû renoncer à une participation au 1er volet de l’UTS en juin puisqu’il soignait une blessure à une cheville, Auger-Aliassime a accepté d’être du 2e chapitre de l’aventure, tout comme l’a fait l’Allemand Alexander Zverev. On a offert aux deux étoiles montantes un laissez-passer les conduisant directement aux demi-finales, où ils retrouveront sur leur chemin les joueurs issus de la phase de groupes. Au nombre des rivaux possibles pour le Québécois ce week-end, on compte Fernando Verdasco, Benoit Paire, Corentin Moutet et Dustin Brown.

Qui entre Auger-Aliassime et Zverev aura le loisir de choisir son adversaire en vue du carré d’as de cet UTS 2? La réponse viendra à l’issue d’un duel disputé samedi  entre les 20e et 7e raquettes mondiales.

Ce n’est là qu’une seule des nombreuses différences marquées entre le concept proposé par l’UTS et le tennis professionnel tel qu’on le connaissait au préalable.

 « Je suis toujours ouvert à essayer de nouvelles choses. Je trouve ça stimulant et ça mérite d’être essayé, a affirmé Auger-Aliassime dans une entrevue accordée mercredi au RDS.ca. C’est bien que des personnes mettent de l’avant de nouvelles compétitions qui peuvent intéresser un nouveau public au tennis. Peut-être vont-ils avoir de l’intérêt pour le reste de la saison 2020 [de l’ATP] par la suite ou pour la saison prochaine.

« En même temps, c’est aussi très plaisant de renouer avec la compétition. C’est sûr que ce n’est pas devant le public, mais de recevoir des messages d’encouragement sur les réseaux sociaux, des gens qui m’écrivent qu’ils vont regarder la compétition parce que je la joue, ça fait du bien », a raconté celui qui s’est envolé vers Monaco au mois de mai après deux mois de confinement en sol montréalais, pour mieux travailler sur son tennis et son conditionnement.

Dix secondes de moins entre chaque point

Ces derniers jours à l'entraînement, Auger-Aliassime a axé une partie de ses séances sur une récupération rapide, étant donné l'effort cardiovascularie considérable que requièrent les matchs joués à l'UTS.

« Ça fait longtemps que je ne me suis pas testé en compétition. J’ai hâte de voir ce que je peux faire et produire comme spectacle. (...) Déjà à l’entraînement, j’ai essayé de reproduire les 15 secondes entre les points [au lieu des 25 secondes normalement allouées]. Physiquement, c’est exigeant surtout après un long point de devoir récupérer en 15 secondes. Ce sont des matchs qui ne sont pas très longs, au maximum autour d’une heure, mais très intenses. C’est quelque chose que le public peut apprécier, et qui représente un défi pour les joueurs », a expliqué celui qui portera le surnom de 'Panther' durant le tournoi.

Retour à l'action spécial pour FAA

Au-delà du rythme effréné ponctuant chacune des manches d’une durée d’un quart d’heure, Auger-Aliassime se doute bien que son entrée en scène tardive dans le tournoi exigera de sa part une capacité à s’ajuster rapidement à une foule de conditions différentes.

Certaines de ces conditions pour le moins uniques feront même appel à ses qualités de stratège.

« L’ajout de cartes à jouer dans les règlements est une chose qui m’intrigue, a révélé Auger-Aliassime. Le tennis, à la base, est déjà un sport tactique. C’est un peu comme un jeu d’échecs d’un jeu à l’autre, d’un set à l’autre. Mais d’avoir des cartes à sa disposition pouvant soit s’avantager ou désavantager son rival, et de devoir trouver le bon moment pour s’en servir, c’est quelque chose que j’ai envie d’essayer. C’est un peu comme dans les jeux de société. Peut-être que les joueurs ayant participé à la 1re édition de l’UTS vont mieux maîtriser que moi cette facette, mais ce sera à moi de m’adapter. »

Presqu’autant que le sentiment d’accomplissement que lui procure le tennis, Auger-Aliassime reconnaît s’être ennuyé de l’esprit de franche camaraderie  qu’il entretient avec les autres joueurs du circuit ATP.

« Ça fait du bien de revoir les gars. J’ai pu frapper [au Monte-Carlo Country Club] avec ‘Sascha’ Zverev et j’ai croisé Grigor Dimitrov à l’entraînement. J’ai aussi frappé avec quelques autres joueurs du circuit récemment. C’est bien de renouer avec eux, après des semaines, voire même des mois à frapper seulement avec (mon) équipe. C’est très positif comme sentiment d’émulation, de motivation, de se retrouver avec des joueurs de haut niveau. Et je m’entends bien avec la plupart d’entre eux. C’est comme retrouver ses collègues si on veut! »

Confiant que l’US Open aura lieu

Si Auger-Aliassime sait précisément avec quels rivaux il renouera à l’Ultimate Tennis Showdown, c’est beaucoup moins fluide en ce qui a trait à l’US Open, prévu à l’horaire du 31 août au 13 septembre. Le comité organisateur de l’USTA a beau chercher à rassurer tous les acteurs impliqués de la rigidité des règlementations et des mesures sanitaires mises en place, le doute persiste sur la faisabilité du projet d’envergure qu’est celui de présenter un tournoi majeur à l’intérieur d’une « bulle », alors que les États-Unis demeurent le pôle majeur de la pandémie de COVID-19.

Les défis à relever, ce n’est pas ce manque pour les organisateurs, reconnaît ‘FAA’, particulièrement lorsque l’on souhaite y faire déplacer massivement des athlètes issus des quatre coins de la planète.

« Les restrictions seront sévères, ça c’est certain. Et ce sera un challenge, d’amener des joueurs de partout à New York. Mais à un mois du début du tournoi, je suis convaincu que l’USTA, l’ATP et la WTA se sont mis d’accord sur la marche à suivre. Personnellement, je suis confiant que [l’US Open] va avoir lieu. Je serais même surpris si l’inverse se passait. Je me prépare pour un départ (vers Flushing Meadows) le 14 août et j’ai confiance  qu’ils auront mis les restrictions suffisantes pour que tout le monde puisse jouer en sécurité. »

Une discussion avec Dimitrov qui l'a secoué

L’optimisme affiché par Félix Auger-Aliassime quant au contexte demeure cependant empreint de prudence. Une discussion récente avec Grigor Dimitrov, croisé  durant une sortie de course à pied, a aidé le Québécois de 19 ans à mettre les choses en perspective en ce qui a trait aux dangers potentiels de la COVID-19 même pour un athlète d’élite. Dimitrov, faut-il le rappeler, est un des joueurs ayant contracté le virus durant un tournoi joué devant partisans à Belgrade au début du mois de juin. S’en est suivi un calvaire de près de trois semaines pour le tennisman bulgare, qui dit s’en ressentir encore à ce jour.

« J’ai rencontré Grigor par hasard. Je prenais une marche et lui faisait son 1er jogging depuis qu’il était rétabli. Il venait de sortir de deux semaines passées chez lui, il m’a expliqué comment ça s’est passé pour lui, à quel point il avait des difficultés à respirer, à quel point il arrivait à peine à faire la lessive  tant il était fatigué, a relaté Auger-Aliassime.

Il a contracté une forme de virus qui l’a assez touché visiblement. C’est choquant quand on y pense car il a de bons poumons. (…) Ça te réveille et ça te confirme qu’il faut continuer de faire attention, pas  seulement pour nous-mêmes mais aussi pour nos proches.  »

Une balade en voiture de 45 minutes sépare le domicile d’Auger-Aliassime à Monaco du site de l’Académie Mouratoglou. Au moment d’écrire ces lignes, le jeune  tennisman et son entourage n’avaient pas encore décidé s’ils profiteront de l’hébergement offert par les organisateurs ou s’ils retourneront dans leurs quartiers généraux à la conclusion de chaque journée de compétition, notamment dans le but de limiter les risques de contagion.

Après l’UTS viendra rapidement le moment pour le Québécois et son équipe de s’envoler vers les États-Unis. À moins d’un revirement tardif dans les plans de l’ATP, Félix Auger-Aliassime disputera à la mi-août son premier véritable match en près de 150 jours, soit depuis le 26 février. Lui, ainsi que ses compatriotes Denis Shapovalov (no 16) et Milos Raonic (no 30) sont tous les trois en lice pour prendre part au Masters 1000 de Cincinnati, tournoi de reprise du calendrier ATP disputé exceptionnellement à l'USTA National Tennis Center de Flushing Meadows cette année.