En début de tournoi, vous prenez un tableau complet de cent vingt-huit joueurs et, au fil des tours, ce tableau se morcelle et chacune des portions ressemble d'abord à un atoll. Et petit à petit, les îles partent à la dérive vers le continent. L'amateur averti guette inlassablement le moment des demi-finales quand il ne reste plus que deux îlots qui se dessinent à l'horizon.

De toutes les Îles britanniques, Roger Federer habite l'Île de la Beauté. Il est imperturbable et ce n'est certes pas ce vieux loup de mer de Bjorkman qui peut lui faire perdre pied. Il est bien de descendance Viking, mais Borg l'Ancêtre était plus conquérant.

Deux moussaillons se partagent pour l'instant l'île flottante: Rafael Nadal et Marcos Baghdatis. Ils ont d'abord grandi sur les bords de la Méditerranée avant de s'embarquer sur les routes de l'exploit. Baghdatis, Ulysse moderne, depuis son île de Chypre, fit un long voyage en Australie; c'est là qu'on fit sa découverte, en finale.

Nadal a navigué depuis les Baléares.Pour une deuxième année d'affilée, le jeune corsaire espagnol revient de l'Ile de France avec le plus précieux des butins, la Coupe des Mousquetaires. En demi-finale, Nadal et Baghdatis ne se feront pas de quartiers.

Nadal n'accepte pas les invasions. Il aime purger quiconque infeste son territoire. L'abordage sera terrible.

Restera ensuite à faire le sac de la finale. D'autres ont bien essayé de réussir l'exploit à trois reprises, mais un grand amiral du nom de Federer veille jalousement sur le trésor anglais.