MONTRÉAL - Ils étaient plusieurs à prédire un changement de garde au tennis féminin lorsque Victoria Azarenka a remporté les Internationaux d’Australie en 2012.

Alors âgée de 22 ans, Azarenka et la numéro un mondiale jusqu’à ce moment-là Caroline Wozniacki étaient perçues comme les dignes héritières de Serena Williams et Maria Sharapova.

Pourtant, 6 des 10 tournois du Grand Chelem suivants ont été gagnés par Williams ou Sharapova, ne laissant que des miettes à Azarenka, Marion Bartoli, Li Na et Petra Kvitova. À 29 et 32 ans, Bartoli - aujourd’hui à la retraite - et Na, étaient déjà des joueuses expérimentées.

Deux ans plus tard, la nouvelle vague se nomme Eugenie Bouchard ou encore Simona Halep. À 20 ans, la Québécoise a atteint le carré d’as des trois Grands Chelems disputés jusqu’à maintenant cette saison, s’inclinant même en finale de Wimbledon devant Kvitova.

Mais cela n’a aucune commune mesure avec une époque encore pas si lointaine pendant laquelle des jeunes femmes âgées de 17 ou 18 ans collectionnaient les titres les plus prestigieux. Martina Hingis en a gagné 3 l’année de ses 17 ans et Monica Seles 8 avant ses 20 ans!

« Au cours des dernières années, ç’a vraiment été un mélange de vedettes établies et d’étoiles montantes », a reconnu la présidente de la WTA Stacey Allaster plus tôt cette semaine. « Sauf que les étoiles montantes n’ont jamais été capables d’égaler les performances des vedettes. »

Plusieurs ont leur théorie pour expliquer la nature du phénomène. Les méthodes d’entraînement se sont raffinées et les mentalités ont changé, si bien qu’il est maintenant possible d’évoluer à un haut niveau beaucoup plus longtemps que par le passé.

« La forme physique est l’élément clé », a analysé Wozniacki, qui est maintenant âgée de 24 ans et qui n’a toujours pas connu l’ivresse de la victoire en Grand Chelem. « Tout dépend de la façon dont tu prends soin de ton corps et de la qualité des traitements que tu reçois pour récupérer. »

« Novak Djokovic me disait l’autre jour à quel point le sport a changé », a ajouté la présidente et chef de la direction de Tennis Canada Kelly Murumets. « Il y a encore quelques années à peine, des joueurs pouvaient s’amener cigarette à la bouche à l’entraînement. Ce n’est maintenant plus le cas. Les athlètes font maintenant très attention à tout ce qui touche leur corps! »

Maria Sharapova« Les sœurs Williams n’ont joué que très peu de tournois alors qu’elles étaient dans la vingtaine », a rappelé Allaster. « C’était une décision qui ne nous plaisait pas tellement à l’époque, mais force est d’admettre qu’elles ont eu raison parce qu’elles sont encore là aujourd’hui. »

Cette longévité des sœurs Williams et de Sharapova est peut-être une bonne chose au final. Tant de talents semblent avoir été gaspillés pour toutes sortes de raisons dans le passé. Les dirigeants du circuit en ont pris connaissance et se bombent aujourd’hui le torse en regardant la longévité de certaines.

« Nous avons changé notre approche après les problèmes vécus par Jennifer Capriati et Andrea Yager », a mentionné Allaster. « Avant les carrières duraient 12 ans et maintenant c’est 15 ans. C’est plaisant de voir des joueuses qui étaient sur le circuit à 16 ans et qui sont encore là à 34. »

Reste que peu importe l’époque, les clés du succès restent sensiblement toujours les mêmes. Ce sont presque toujours les mêmes qualités qui mènent les meilleures joueuses au sommet.

« Pour être numéro un, il faut dominer », a révélé Arantxa Sanchez Vicario, qui a fait son entrée au Temple de la renommée de la Coupe Rogers plus tôt cette semaine. « Il faut gagner le plus de tournois possible année après année afin de maintenir sa position. La seule chose qui a vraiment changé, c’est que les joueuses d’aujourd’hui sont beaucoup plus agressives. »

Chose certaine, la WTA entend mettre l’accent sur ses jeunes athlètes, alors qu’un nouvel événement mettant en vedette des étoiles montantes de moins de 23 ans sera tenu en marge des Internationaux des États-Unis. Il réunira deux joueuses asiatiques et deux autres du reste du monde.

« La région Asie-Pacifique est notre pari pour l’avenir. Nous voulons mettre les joueuses asiatiques en avant-plan », a indiqué Allaster. « Notre championnat de fin de saison sera d’ailleurs présenté à Singapour pour les cinq prochaines années. »

Jadis résolument américain et européen, le tennis est en train de s’internationaliser. Dix tournois seront d’ailleurs présentés en Asie après les Internationaux des États-Unis. Il n’y en avait que la moitié il y a un peu plus d’une décennie à peine.