On a toujours su jusqu'à quel point l'Italien Fabio Fognini est gorgé de talent. Sur terre battue la grandeur de ses capacités s'étale au grand jour de façon encore plus éloquente. En demi-finale, c'est Rafael Nadal qui goûte au cocktail maléfique de l'Italien : accélérations des deux côtés, en coups droits et en revers, un touché de balle formidable en amorties, avec en plus, un désir de vaincre que nous n'avions pas vu de sa part cette année.  

 

Le plus incroyable, c'est que Fognini se présente à Monaco avec seulement 4 victoires dans sa besace. Avouez que ce n'est pas avec ce genre de fiche que l'on peut espérer faire le spectacle pendant le week-end de Pâques devant la royauté! D'ailleurs, c'est avec grande difficulté qu'il s'extirpe de son premier match face à Andrey Rublev car il perd 6-4, 4-1 alors que le jeune Russe possède en plus 5 balles de bris pour ajouter au supplice.

 

La même chose lui arrive en quarts face à Borna Coric alors qu'il tire à nouveau de l'arrière par un set et un bris. Chaque fois il accepte de travailler même lorsque le vent l'empêche de s'exprimer pleinement. Sans doute le fait qu'il soit originaire de San Remo et qu'il vive quelques lancers de pierres plus loin à Arma de Taglia y est pour beaucoup pour expliquer sa passion à s'accrocher cette semaine tel un guerrier prêt à y laisser sa vie. Monte-Carlo c'est tout près, donc cela veut dire que ses amis d'enfance, sa famille et ses partisans peuvent facilement venir l'encourager. Une petite balade en voiture de 45 minutes sur la côte et puis ça y est, tout ce beau monde permet à Fabio d'exceller dans une ambiance Coupe Davis comme s'il était à la maison. Quand ce bougre d'homme se sent aimé, il ne lâche pas mais à la place redonne généreusement. 

 

Aujourd'hui en finale c'est, oh surprise, Dusan Lajovic qu'il a devant lui et non un des monstres sacrés du circuit. Le Serbe vit à 28 ans une première finale et il avoue candidement qu'il est surpris de se retrouver là, en ronde ultime. Facile à comprendre puisqu'il n'a pas mis tous les éléments en place depuis le début de l'année car au compteur ce n'est pas beaucoup mieux que l'adversaire : 6 victoires en 9 tournois et en plus une vilaine grippe en arrivant dans la Principauté.

 

Fait assez cocasse, Dusan travaille avec l'Espagnol Jose Perlas qui a forgé les meilleurs sur terre : Carlos Moya, Albert Costa, Juan Carlos Ferrero, Guillermo Coria et un certain Fabio Fognini. Cela fait maintenant plus de deux ans que monsieur Perlas lui répète de ne pas toujours essayer de jouer le point parfait, que simplifier le jeu peut sembler banal mais très efficace. Quoi qu'il en soit, même si Lajovic n'est que 48e au monde, il se comporte comme un top-10 pour battre David Goffin et Dominic Thiem en plus de revenir d'un déficit de 1-5 face à Daniil Medvedev en demie. Cinq matchs plus tard, tous gagnés en deux manches consécutives et assuré de la 24e place mondiale, il mérite pleinement cette première ronde ultime.

 

Le problème, c'est que Lajovic est trop juste physiquement et en plus il a des ampoules à un pied. Dans chacun des sets, il aurait dû mener 3-1 mais n'arrive pas à faire les bons choix et surtout, à être suffisamment constant. Un total de 36 fautes en deux manches, c'est beaucoup, surtout quand plusieurs proviennent du coup droit. Fognini n'est pas parfait non plus mais beaucoup plus constant et rusé. Normal, l'Italien a gagné huit trophées sur le circuit et participe à une 19e finale. Il finira par user Lajovic jusqu'à la corde pour remporter son plus grand titre en carrière. 

 

Ce triomphe lui permet d'atteindre son meilleur classement à vie soit cogner à la porte du top-10 à nouveau avec la 12e place. Cela est pleinement mérité car les conditions étaient très difficiles cette semaine avec ce vent qui tourbillonne et vous force à vous ajuster sans cesse. De toute façon, soyons honnête, un joueur qui bat Nadal en deux sets sur terre mérite le titre quand on sait jusqu'à quel point l'Espagnol est un coquillage difficile à ouvrir sur cette surface.

 

Bravo Fabio, je t'en prie, fais nous rêver à Roland Garros cette année…