MOSCOU (AFP) - Les Russes ont fait main basse cette année sur le tennis mondial féminin, avec trois de leurs représentantes victorieuses des trois dernières levées du Grand Chelem, quatre des leurs classées dans les dix premières mondiales, sept dans les vingt premières, treize dans les cent.

Svetlana Kuznetsova a remporté samedi l'US Open en battant en finale sa compatriote Elena Dementieva. Anastasia Myskina avait brandi la coupe à Roland-Garros au terme, déjà, d'une finale 100 % russe remportée également devant Dementieva. Entre-temps, Maria Sharapova est devenue championne de Wimbledon en battant l'Américaine Serena Williams, tenante du titre.

Anna Kournikova avait ouvert la voie au milieu des années 90. Mais elle n'a jamais confirmé une demi-finale disputée à Wimbledon en 1997, faisant depuis plus souvent la Une des magazines de mode que ceux de tennis.

Myskina, 23 ans, Dementieva, 22 ans, Kuznetsova, 19 ans, Sharapova, 17 ans, se sont engouffrées dans la brèche. Sans oublier les Zvonareva, Petrova, Bovina, Likhovtseva...

Depuis les années "Kournikova", toutes ces jeunes femmes ont donné du tennis russe une image de sérieux et de continuité dans les résultats. Ses nouvelles ambassadrices sont reconnues pour leur professionnalisme et leur capacité de travail. Plus seulement pour leur plastique.

"A 15 ans, les garçons ont beaucoup de tentations, alcool, cigarettes, filles. Les jeunes filles sont plus concentrées sur leurs carrières", avance Vladimir Kampala, entraîneur en chef de la Fédération russe, comme élément d'explication à cette déferlante de joueuses.

"Elles sont plus disciplinées et mûrissent plus vite", ajoute-t-il.

Au-delà de cette analyse psychologique, la Russie possède plus de 80 académies dans 44 villes, obsédés par la détection et la production de talents amenés à grossir les rangs du tennis professionnel.

Outre la chute du communisme au début des années 90, l'amour pour le tennis de l'ancien président Boris Eltsine n'a pas été étranger à l'attrait pour ce sport auprès des nouvelles générations, et à sa popularité.

Expatriées mais toujours russes

Les jeunes pousses qui percent sur ce terreau ont la possibilité, désormais, de s'épanouir à un niveau supérieur en rejoignant les académies étrangères les plus réputées, celles de Nicolas Pilic ou de Nick Bollettieri, machines à produire des championnes.

Nombre de ces championnes n'hésitent plus à s'expatrier: Sharapova est ainsi arrivée dès l'âge de 7 ans en Floride, où elle a intégré l'acédémie Bollettieri, et la base d'entraînement de Kuznetsova est en Espagne.

Néanmoins, ces jeunes femmes, qui manient aussi bien l'anglais que le russe, ne cessent d'affirmer à longueur de déclarations et d'interviews qu'elles dédient leurs victoires à leur pays d'origine.

Kuznetsova en est un des exemples les plus frappants. "Je suis partie avec ma maman, raconte-t-elle. Elle m'a consacré tellement de temps. Nous changions souvent d'entraîneur, et je me souviens qu'elle pleurait la nuit parce que je ne répondais pas à ses attentes. Le peu d'argent que possédait ma famille allait dans le tennis. Elle ne s'achetait jamais rien pour elle. Quand j'y repense, je trouve ça incroyable."

Le tennis de Russie se conjugue aujourd'hui au féminin. D'autant plus que chez les messieurs, Yevgeni Kafelnikov, vainqueur à Roland-Garros en 1996, de l'Open d'Australie en 1999 et olympique en 2000, est en pré-retraite, Marat Safin, vainqueur de l'US Open en 2000, n'a pas confirmé depuis son immense talent, et Mikael Youzhny plafonne aux alentours du 40e rang mondial.