Dernier évènement officiel de l'année alors que les joueurs de 18 nations se retrouvent à la Caja Magica de Madrid pour la toute nouvelle formule de la Coupe Davis. Beaucoup de changements d'un coup ce qui fait le bonheur de ceux qui ne s'intéressaient plus à l'ancien format jugé désuet et trop demandant. Certains autres, appelons-les « puristes », pleurent la mort de la vieille dame.

Je comprends que c'est excitant de jouer à la maison ou de baigner dans une atmosphère hostile et réussir à s'arracher pour aller chercher la victoire pour la patrie. Mais soyons honnêtes, les meilleurs ne jouaient plus sur une base régulière et la raison est simple : leur demander quatre week-ends par année et jouer cinq rencontres au meilleur des cinq sets est franchement beaucoup trop.

J'aime bien la nouvelle formule bien que très exigeante aussi : six groupes de trois nations alors que l'on compétitionne d'abord dans un un tournoi à la ronde. Les six meilleures équipes se qualifient pour les quarts de finale tandis que les deux autres meilleures formations s'ajoutent au groupe pour compléter le tableau des quarts. Bien sûr, beaucoup de choses restent à peaufiner pour les prochaines éditions, dont l'horaire car ce n'est pas normal de terminer des matchs à quatre heures du matin et encore plus difficiles s'il faut enchainer avec un autre face-à-face la même journée. Certes, sept jours seulement pour ce genre de compétition, c'est peu. Mais au-delà de tout, c'est le format qui plait : deux matchs de simple et un double au meilleur des trois manches.

Honnêtement, voir nos Canadiens se battre si farouchement dès le premier duel face à l'Italie lors des deux matchs de simple nous donne déjà une indication du niveau de jeu de nos porte-couleurs. Je vous rappelle que Matteo Berrettini est 8e mondial et Fabio Fognini 12e. D'abord c'est Vasek Pospisil qui est appelé au combat en premier puisque les dirigeants jugent que Félix Auger Aliassime a besoin d'un peu plus de temps pour bien se sentir sur le terrain après un pépin à la cheville qui l'a empêché de jouer à Paris Bercy et Milan. Six semaines sans compétition c'est beaucoup. De toute façon, les conditions de jeu sont absolument parfaites pour Vasek Pospisil qui a fait de si belles choses récemment. Vasek a battu le top-10 Karen Khachanov au US Open, Diego Schwartzman à Shanghai en plus de remporter deux tournois Challenger de suite aux Etats-Unis. Impressionnant, il est pour vaincre Fognini en deux sets consécutifs tandis que Denis Shapovalov surprend Berrettini 7-6, 6-7 et 7-6! Géant!!!

Puis dès le lendemain, nos porte-couleurs enchaînent avec deux autres performances époustouflantes alors que le capitaine américain Mardy Fish prend la décision de ne pas faire jouer l'immense serveur Sam Querrey. Vasek reste très concentré sur son tennis d'attaque pour remporter deux bris d'égalité face à Reilly Opelka tandis que Shapo démontre sa maitrise su tennis champagne pour vaincre Taylor Fritz en deux sets. Le capitaine Frank Dancevic décide de ne pas insérer Félix pour le double et fait plutôt un cadeau aux Américains en offrant le point du double. Il est donc évident à partir de ce moment-là que pour lui, ses deux hommes de confiance pour toute la durée de cette finale Coupe Davis sont Vasek Pospisil et Denis Shapovalov pour le simple ET le double. Difficile de le critiquer puisque jusque là, les deux sont extraordinaires.

Aussi incroyable que cela puisse paraitre, après deux jours de compétition seulement, le Canada est le premier pays à se qualifier pour les quarts de finale ce qui est au-delà des espérances compte tenu de notre classement (13e) à l'échiquier mondial. Saviez-vous que les États-Unis comptent le plus de titres avec 32?

Le Canada fera aussi mordre la poussière à la formation qui est au 2e rang avec 28 couronnes soit l'Australie. Bizarrement, le capitaine Leyton Hewitt décide de mettre le pétaradant Nick Kyrgios sur le banc, lui qui vient pourtant de gagner ses deux matchs de simple pour aider son pays à se faire une place en quarts. S'il y a un joueur que nos Canadiens ne veulent pas affronter à l'intérieur, c'est bien Nick avec son service de feu! Il semble que Kyrgios ait un problème à la clavicule. En conférence d'après match, Hewitt amène un autre son de cloche en ajoutant que tous les joueurs sur le terrain pour la rencontre face au Canada s'étaient sacrifiés pour l'équipe TOUTE l'année et qu'ils méritaient d'aller au combat. C'est beau avoir de grands principes, mais il a perdu son pari l'ancien numéro un mondial puisqu'en double Shapo et Vasek arrachent le point décisif.

Bravo sur toute la ligne à nos Canadiens qui atteignent la demi-finale en Coupe Davis pour une 2e fois après les beaux succès de 2013.

Cette fois, ce n'est pas la Serbie de Novak Djokovic qui sera au rendez-vous dans le carré d'as, mais bien deux blancs-becs représentant la Russie. Andrei Rublev et Karen Khachanov sauvent trois balles de matchs en double devant Djokovic et Viktor Troicki pour offrir le point décisif à la Russie. Moments remplis d'émotions en conférence de presse après la défaite alors que tous les représentants de la Serbie pleurent : Troicki parce qu'il a raté une volée immanquable sur balle de match, Janko Tipsarevic puisqu'il s'agit de la dernière fois qu'il représente son pays alors qu'il prend sa retraite, Nenad Zimonjic qui jouait le rôle de capitaine voulait tellement remporter une 2e Coupe est ému aux larmes lui aussi sans oublier Novak Djokovic qui se laisse emporter comme les autres dans cette vague déferlante de peine.

La preuve est faite : même si ce format connait durant la semaine quelques ratées, vaincre pour l'honneur de sa patrie occupera toujours une belle grande place dans le coeur de tous, joueurs ou spectateurs. C'est tout de même réconfortant compte tenu du fait que le monde change vite et pas toujours pour le mieux. Encourageant, tout de même que certaines valeurs demeurent...

Bon revenons à nos moutons puisque la belle aventure se poursuit jusqu'en finale pour nos valeureux guerriers, une première dans l'histoire de notre nation. L'Espagne de Nadal est au menu aujourd'hui en ronde ultime de ce qui sera, nous l'espérons tous, un joyeux festin. Tiens pour ceux qui adoraient l'ambiance de l'ancienne formule, vous êtes servi à souhait, car nos porte-couleurs vont se sentir lancés au coeur de l'arène dans une corrida. Dire qu'un des surnoms de Rafael Nadal est le taureau de Manacor! Je me demande ce qui reste dans les jambes de Vasek... Et bien nécessité oblige, c'est Félix Auger Aliassime qui joue le premier match!!! Il affronte Roberto Bautista Agut qui a quitté l'équipe en début de semaine en raison de la mort de son papa! Wow! Que d'émotions dans l'air! Le capitaine Dancevic se donne une chance de gagner le double en reposant son meilleur joueur de double, Vasek Pospisil.

Show Time FAA! Puisse ta merveilleuse année avec tes 33 victoires et ton titre à ce même endroit avec Denis lors de la Coupe Davis junior en 2015 t'inspirent! Attention cependant, Agut est 9e au monde et a gagné 9 titres sur le grand circuit sans oublier sa poussée jusqu'en demie à Wimbledon cette année. Félix commence bien le match en déployant une belle légèreté et constance en fond de terrain, mais sur certains schémas d'attaque notamment avec son coup droit, cela s'avère évident que son manque de matchs récent lui fait mal. Jouer en altitude n'est pas facile et malgré de belles opportunités à 4-3, Félix n'arrive pas à concrétiser sur balle de bris. Je l'ai aussi senti nerveux dans le bris d'égalité. Dommage il était tellement proche de gagner ce premier set.

À la 2e manche, Félix fait quelques doubles fautes qui le ralentissent dans ses efforts et en plus je le sens un peu fatigué. Bautista Agut est un guerrier qui remet tout ce qui est humainement possible de remettre en jeu donc c'est difficile de gagner en jouant principalement en fond de terrain. Il faut varier, attaquer et monter ce qui est difficile et qui demande des références. Les bonnes sensations ne tombent pas du ciel, je suis peinée qu'il n'ait pas eu la chance de jouer plus tôt dans la semaine. Le Canada s'incline 7-6 (3) et 6-3. Va falloir que Shapo joue le match de sa vie face à Nadal qui a eu son mot à dire pour amener la Coupe Davis dans son pays cinq fois depuis le début des années 2000.

Denis se bat farouchement face l'ogre Nadal. Il s'en ai fallu de peu que notre Canadien l'amène à la 3e manche. Si cela avait été le cas, tout était possible parce que Nadal a joué beaucoup en cette fin d'année et lui aussi commençait à démontrer quelques signes de fatigue. Nadal sauve balle de manche pour gagner en deux manches. Encore une fois s'il y a un homme sur la planète tennis qui démontre toutes les plus grandes qualités de leader, c'est bien Nadal. Bravo tout de même à nos merveilleux Canadiens qui sont fait tomber un gros paquet de barrières. Bravo pour une semaine de rêve. Que s'amène 2020!

Oui bravo à TOUTE l'équipe c'est vraiment formidable. Tiens, cette fierté du maillot me rattrape à nouveau alors que dans les années 80 j'ai représenté fièrement (et gratuitement) la feuille d'érable en Coupe Fed. Ce qui se passe cette année sur la scène mondiale du tennis est comme un immense cadeau qui vient du ciel. L'émergence de Félix, la poussée vers les plus hauts sommets de Shapo, la renaissance de Vasek et la folle envolée de Bianca à New York. Soyons fiers de vivre dans un pays de liberté et opportunité. Je vous laisse donc avec ces paroles écrites à la fin des années 1800 qui prouvent, tout de même, que les paroles s'envolent, mais les écrits restent: Ö Canada, ton histoire est une épopée des plus brillants exploits!