MONTRÉAL - Lorsqu'ils atteignent les rangs professionnels, bien des joueurs et joueuses de tennis deviennent ni plus ni moins le p.d.g. d'une PME. C'est à eux de veiller à leur entraînement, à l'embauche de personnel de soutien, à toutes sortes de détails qui n'ont pas de lien direct avec leur habileté à frapper une balle sur un terrain.

Sauf que ce ne sont pas tous les athlètes qui ont l'âme d'une personne d'affaires.

C'est un peu cela, et toutes les conséquences fâcheuses qui en découlent, que Tennis Canada a voulu corriger en étendant son programme national de développement au-delà de l'âge de 18 ans, du moins aux joueurs et joueuses des rangs professionnels qui tardent à percer le 'top-100' du classement de l'ATP ou de la WTA.

Le programme, dont les grandes lignes sont connues depuis quelques semaines, a été mis en application lundi dernier.

«Les athlètes atteignent maintenant leur pointe à 26, 27 ou 28 ans», a souligné Louis Borfiga, arrivé en poste il y a quatre ans à titre de vice-président de développement de l'élite, lors du point de presse de fin de saison de Tennis Canada tenu jeudi au Stade Uniprix du Parc Jarry. «Ça veut dire qu'à 18 ans l'évolution de l'athlète n'est pas terminée et il faut continuer (à le développer).»

Cette structure centralisée à Montréal permettra aux joueurs et joueuses des circuits professionnels de profiter de tous les services offerts par Tennis Canada - entraîneurs de tennis et physique, personnel médical, psychologues, etc.

Les joueurs parmi les 100 premiers au monde pourront continuer de profiter des services d'un entraîneur personnel s'ils le désirent. Aleksandra Wozniak, qui a repris l'entraînement le 15 novembre dernier, est néanmoins présentement en période d'essai avec Zdenek Zofka, un entraîneur faisant partie du personnel de Tennis Canada.

«Si une nation n'a pas de structure, il ne peut pas y avoir de résultats dans la continuité, a expliqué Borfiga. On peut peut-être avoir quelques résultats ici et là, mais si on veut vraiment faire du Canada une nation de tennis, et rejoindre les pays comme l'Espagne, la France, les États-Unis, il faut se doter d'une structure.»

Une structure qui existe déjà dans plusieurs pays.

«On a un peu calqué ce qui se fait en France, en Belgique, aux États-Unis, a noté Borfiga. Les fédérations s'aperçoivent que si on n'encadre pas bien les joueurs, s'ils sont livrés à eux-mêmes, ça part un peu dans tous les sens.»

«En Angleterre, qui a toujours obtenu des résultats très modestes (chez les femmes surtout), on a maintenant une approche d'équipe avec des entraîneurs supervisés par un capitaine de Coupe Fed, a souligné Sylvain Bruneau, l'entraîneur-chef du tennis féminin canadien. Et je dirais que ça bouge, il y a de plus en plus de joueuses qui montent au classement. Je pense aussi à la France et à l'Australie.»

Tennis Canada, qui finançait auparavant les déplacements d'entraîneurs personnels dans une certaine mesure, permettra maintenant à ses athlètes de profiter d'une approche plus cohérente et soutenue.

«Je crois qu'une telle structure est indispensable parce qu'entre les tournois, les athlètes n'ont pas un lieu où ils peuvent vraiment faire du tennis de manière professionnelle. Ici on a tout, a souligné Borfiga.

«Par exemple, Peter Polansky, au lieu de retourner à Toronto où il n'a personne contre qui jouer, il vient ici et peu importe quelle semaine il vient, il y aura toujours un entraîneur qui pourra le prendre en charge, a ajouté Borfiga. Il y aura d'autres joueurs pour s'entraîner avec lui, l'entraîneur physique... Donc il est tout le temps bien encadré. Il ne perd pas de temps et ça, ça peut lui permettre de progresser un peu plus qu'il ne le fait actuellement.

«On constatait qu'il y avait des petits trous, qu'il y avait des choses qu'il fallait améliorer sur le plan technique et tactique, a dit Bruneau. Avec une équipe d'entraîneurs, qui vont vraiment travailler ensemble, qui vont pouvoir échanger, on pense être capable d'élever le niveau de tennis des joueuses.»

De bonnes nouvelles

«Ce sont de bonnes nouvelles pour nous, a affirmé la joueuse québécoise Valérie Tétreault, jeudi. Financièrement, ça nous enlève un poids. On n'a pas besoin de se demander si on va pouvoir amener notre entraîneur avec nous. On avait droit à un certain nombre de semaines qui étaient payées et c'était à nous de gérer ça.

«Le fait d'avoir plusieurs entraîneurs va faire en sorte qu'on va avoir droit aux points de vue de plusieurs personnes différentes, donc ça peut être plus complet (comme enseignement)», a ajouté Tétreault.

Pour mieux réfléchir

La présence de Tennis Canada permettra aussi aux athlètes d'adopter une approche plus réfléchie, notamment en ce qui concerne le choix des tournois à disputer ou à éviter.

«Nous, on est là pour les guider pour qu'ils prennent les meilleures décisions possibles», a affirmé Borfiga, qui a par ailleurs fait savoir que Milos Raonic, le joueur canadien qui a le mieux fait en 2010, ne sera plus entraîné par Frédéric Niemeyer.

Niemeyer a accepté de céder sa place à la faveur d'un autre entraîneur qui pourra suivre Raonic régulièrement à l'étranger. Borfiga a indiqué qu'il y a «de grandes chances» que cet entraîneur soit l'Espagnol Galo Blanco, un ancien de joueur de tennis.