Le premier Grand Chelem de l'année est maintenant chose du passé avec le couronnement logique de Naomi Osaka et de Novak Djokovic. J'ai beaucoup parlé de l'importance du service sur surface rapide durant la quinzaine, mais cela est intéressant de noter que nos deux champions se démarquent en finale en retours et sur les points importants. Il faut croire que l'expérience y est pour beaucoup et l'approche mentale aussi. C'est fort entre les deux oreilles pour Novak qui remporte 9 tournois à Melbourne en 9 finales. Impressionnant aussi pour Naomi de triompher 4 fois sur 4 rondes ultimes en Grand Chelem.

Allons-y pour cette chronique de façon un tout petit peu différente pour le résumé de la quinzaine. Je vous suggère mes coups de cœur, surprises et déceptions. J'offrirai également des bouquets de fleurs et quelques citations entendues durant le tournoi que vous pourrez peut-être ajouter dans votre journal personnel si le message vous rejoint.

Mon premier coup de cœur appartient à Stefanos Tsitsipas qui se bat tellement bien durant tout le tournoi. Le Grec livre une bataille de haut niveau pour arracher la victoire en 5 sets devant le revenant Thanasi Kokkinakis, un ami de longue date. Puis, il subit les foudres de Rafael Nadal pendant 2 manches avant d'effectuer une des plus belles remontées jamais vues pour l'emporter en 5 sets. Ce que j'ai particulièrement apprécié de la part de Tsitsipas, c'est son attitude de guerrier pendant tout le match. Jamais au grand jamais, il ne se décourage et il aurait bien pu alors que Nadal le dominait outrageusement. Opportuniste pour remporter le bris d'égalité de la 3e manche, Stefanos grimpe l'Everest pas par pas, palier par palier jusqu'au sommet de la gloire. Mais quelle remontée il effectue, prouvant une fois de plus que ce sont d'abord et avant tout nos pensées qui sont le moteur de la réussite.   

Chez les dames, on ne peut passer sous silence la poussée jusqu'à la demie de Karolina Muchova. Fois après fois, la Tchèque revient de l'arrière pour remporter des victoires spectaculaires face à la no 1 mondiale Ashley Barty, Karolina Pliskova (6e) et Elise Mertens (18e) avant de s'incliner de justesse devant la finaliste Jennifer Brady. Impossible de ne pas être charmé par son style discret, mais si efficace en plus d'apprécier son honnêteté au cœur de l'effort et son humilité dans la victoire. Muchova est à surveiller pour le reste de l'année parce qu'elle vient vraiment de réaliser jusqu'à quel point son talent est grand.

La grande surprise de ce tournoi est sans l'ombre d'un doute le merveilleux russe Aslan Karatsev qui se farcit d'abord 3 tours de qualifications avant de se rendre jusqu'en demie. Au-delà de ses mirobolantes accélérations en coups droits, revers et au service, le Russe de 27 ans passe littéralement, en deux semaines, de l'ombre à la lumière. En plus de remonter d'un déficit de 2 sets devant Félix Auger-Aliassime, Karatsev frappe 50 coups gagnants contre 5 pour sortir en 3 petits sets le 9e mondial Diego Schwartzman. Ce que j'aime le plus durant le tournoi, c'est justement de découvrir l'histoire derrière le joueur. Karatsev est né en Russie, mais de 3 à 12 ans, la famille déménage en Israël avant de retourner à Moscou pour s'entrainer avec Dimitri Tursunov, ancien top-20 mondial. Les succès ne viennent pas, alors il déménage à Halle pendant 2 ans, puis Barcelone et depuis 3 ans dépose ses pénates en Biélorussie pour travailler avec Yahor Yatsyk, d'un an seulement son ainé. Il n'a plus d'argent pour voyager, mais quelques bons samaritains, dont celle qui deviendra sa femme, croient en lui et le financent. Avec ses immenses succès à Melbourne, Karatsev sera 42e lundi ce qui veut dire qu'il aura sa place dans tous les grands tournois lors des prochains mois. Tout vient à point pour celui qui travaille et qui y croit jusqu'au bout malgré beaucoup de galères.

Je veux absolument offrir virtuellement un immense bouquet de fleurs à monsieur Craig Tiley, patron de Tennis Australia et directeur du tournoi qui a réussi, avec toute son équipe, un exercice logistique colossal pour assurer la présentation du tournoi. On ne peut même pas s'imaginer tous les problèmes à régler lors des derniers mois. Du même souffle, le même honneur revient à Jennifer Brady finaliste chez les dames. L'Américaine, forcée d'observer une quarantaine stricte de 14 jours, ne s'est jamais apitoyée sur son sort lorsqu'elle s'est retrouvée prisonnière dans sa chambre d'hôtel. « Pas question d'être négative », nous partage-t-elle. Je fais des exercices au sol, de la bicyclette et du tapis roulant en plus d'organiser des conversations virtuelles avec des amis. C'est immense de se rendre jusqu'à la ronde finale sans pouvoir se préparer sur le court autant que les autres.

Pour ce qui est des déceptions, je reviens avec douleurs sur la défaite de Serena Williams face à Osaka en demie. En pleurs en conférence de presse, comme si la réalisation que son rêve d'égaler la marque de 24 titres de Margaret Court est impossible à réaliser. Le temps passe et à 39 ans le niveau des étoiles montantes ne cesse de grimper. J'étais triste aussi pour Félix Auger-Aliassime, qui ne laisse pas jouer le dangereux Karatsev pendant 2 sets, mais qui se crispe lorsque le Russe hausse son niveau de jeu par la suite. Ce match lui appartenait...

Voici maintenant quelques citations retenues lors de la quinzaine qui vous feront peut-être réfléchir ou sourire?

Craig Tiley : « Mon père me disait toujours que si tu n'es pas critiqué, c'est que tu ne fais rien. »

Un 4e titre majeur pour Naomi Osaka

Naomi Osaka :« Je joue pour mon équipe avec qui j'ai passé beaucoup de temps lors de la quarantaine. Je veux exceller pour eux afin de les remercier pour la belle énergie qu'ils amènent chaque jour. »

Naomi Osaka (prise 2) : « Toute ma vie était axée sur mes victoires. Plus maintenant. Mon coach Wim Fisette me l'a fait comprendre en me disant ceci :"Ta vie ne changera pas si tu perds, elle peut juste s'améliorer". »

Stefanos Tsitsipas : « Il faut être prêt à verser son sang pour parvenir à ses fins. Il ne faut jamais se limiter, penser grand et rester calme dans les moments chauds. J'évolue. »

Tel que lu dans la section commentaire du Journal L'Équipe : « Seul un(e) juge de ligne pourrait arrêter Novak Djokovic, excepté qu'il n'y en a pas... »

Finalement je voudrais remercier du plus profond de mon cœur Louis Borfiga, qui a littéralement changé la position de notre pays sur la scène mondiale. De morne plaine, il en a fait un nid de champions. Mission accomplie cher Luigi et merci pour ce bonheur que vous avez si habilement partagé avec nous...