Nous sommes en plein tournoi du US Open, qui se tient à Flushing Meadow. Ce qu'on retiendra dans les mois à venir ne sera probablement autant le nom des vainqueurs, mais plutôt celui de Serena Williams, et pas nécessairement pour son jeu.

Le US Open est la dernière grosse fenêtre sur le monde dans l'année, un événement qui attire des millions de téléspectateurs. Alors, les compagnies offrent des contrats de plusieurs millions $ aux joueurs et joueuses.

Dans le cas de Serena Williams, si ma mémoire est fidèle, elle a une entente de quelque 40 millions $ avec Nike. Cette compagnie sait que Serena aime beaucoup la mode, que tout le monde va avoir le regard sur elle. Surtout qu'elle n'a pratiquement pas joué cette année en raison d'une blessure au genou, qui enfle à chaque fois qu'elle revient au jeu. Elle a déclaré forfait aux Jeux olympiques, à la Coupe Rogers à Montréal. On l'attendait et on avait hâte.

Tout ça pour dire que les gens de Nike ont choisi le bon moment pour donner le grand coup, sachant que Serena était prête à faire à peu près n'importe quoi pour faire parler d'elle. C'est sûr que c'est très « olé olé », je n'ai aucun problème avec ses tenues quand elle porte une jupe ou une robe mais je trouve que ça va au-delà des règles comme ses shorts qu'elle appelle micro-shorts. J'ai alors envie de lui dire : « Serena, tu as oublié ta jupe ».

Je pense qu'elle savait qu'on n'allait pas lui permettre de jouer avec ses bottes mais en même temps, c'est un coup de marketing intelligent de la part de Nike. En effet, tout le monde ne parle que de ça. Les médias qui ne couvrent pas de tennis habituellement, l'ont fait. On a vu les images partout. Dès que Nike ou les autres commanditaires font parler d'eux, ils sont contents.

Qui va gagner?

Chez les dames, la conjoncture est un peu particulière, Serena Williams n'a presque pas joué de la saison; Venus ne semble pas avoir de problème avec la défaite, elle n'est plus l'ombre d'elle-même. Ça fait tellement longtemps qu'elle n'a pas gagné un tournoi du Grand Chelem. Il y a Justine Henin qui se remet d'un long virus qui l'a tenue à l'écart pendant quatre mois.

En tenant compte de ça, il faut considérer Lindsay Davenport qui a remporté quatre tournois de suite cet été, trois en Californie et celui de Cincinnati disputé juste avant le US Open. La dame de 28 ans avait envisagé la retraite l'an dernier; elle qui voulait avoir des enfants avec son époux, mais elle s'est mise à gagner, elle est plus en forme que jamais.

Il y a aussi Maria Sharapova qui, depuis son titre à Wimbledon, a de la difficulté à composer avec la pression. Elle n'a que 17 ans et il va falloir lui donner du temps de passer à travers ce moment où tout le monde l'attend. C'est maintenant différent pour elle. À Wimbledon, elle n'avait rien à perdre. Maintenant, il faut confirmer, remporter un autre grand titre, mais à 17 ans, la plupart des joueuses ont encore beaucoup de choses à apprendre. Mais ça demeure quand même une jeune dame que l'on garde à l'œil.

Justine Henin, c'est déjà miraculeux qu'elle soit revenue à la compétition. En plus, elle a gagné la médaille d'or aux Jeux olympiques. Est-ce qu'on peut penser qu'elle a de bonnes chances d'aller jusqu'au bout? Ce serait quand même lui en demander beaucoup. Amélie Mauresmo... peut-être, depuis le temps qu'on en parle. Elle pourrait devenir numéro un au monde même si elle ne gagne pas le titre du US Open, c'est une des seules dans cette situation.

Chez les hommes, c'est moins compliqué puisque Roger Federer et Andy Roddick sont les joueurs à battre même si cela n'a pas bien été pour eux aux Olympiques. Ils ont subi une pression très différente de ce qu'ils vivent habituellement. Mais depuis le début de ce US Open, on voit qu'ils sont les joueurs à battre.

70% préfèrent le tennis féminin

Un récent sondage sur le site Internet d'ESPN montrait que 70% des répondants préféraient le tennis féminin au tennis masculin.

Avec l'avènement des nouvelles raquettes, avec lesquelles les joueurs peuvent faire des services plus puissants, les hommes vont chercher tellement de points gratuits, tellement de points avec leurs services que je pense que les gens préfèrent voir des échanges.

Les nouvelles raquettes ont amélioré énormément la qualité et la puissance du jeu féminin. Mais pour le tennis masculin, déjà extrêmement puissant, il l'est peut-être devenu trop sur certaines surfaces comme à Wimbledon. Je ne suis donc pas surprise de ce résultat.

Les filles sont aussi de plus en plus en forme, on ajoute aussi l'élément mode qui ne déplait pas. Malgré tout ce qu'on a pu dire de négatif sur elle, Anna Kournikova a permis d'amener le tennis féminin à des auditoires qu'on ne pensait jamais s'accaparer.

La mode, les meilleures raquettes, le fait qu'elles soient plus en forme, le fait qu'on fasse appel à des spécialistes de la forme physique et du côté mental en plus des nutritionnistes, je pense que ce sont tous ces facteurs qui ont fait en sorte que le tennis féminin a beaucoup progressé et permet aux gens de s'identifier un peu plus de s'y identifier.

Chez les hommes, les gens se disent qu'ils ne pourront jamais frapper un service de 152 milles à l'heure, dans les 244 km/h, de sorte qu'ils se sont davantage tournés vers le tennis féminin et ont développé des affinités avec certaines des grandes vedettes. On appelle les joueuses par leur prénom, un peu comme Céline Dion qu'on appelle Céline. Tout le monde sait de qui on parle parce qu'elle est connue à travers la planète. Venus et Serena ont fait la pluie et le beau temps pendant quelques années. Après, il y a eu Justine et Kim, les deux Belges, mais dans leur cas, c'est dommage qu'il y a eu des blessures et la maladie. Puis il y a Maria.

Le tennis féminin, ce n'est pas seulement de la force brute.

Nos Québécoises

Du côté du tennis féminin au Canada, ce sont les Québécoises qui ont le haut du pavé. Marie-Ève Pelletier est la vétéran du groupe et possède depuis plusieurs années un classement oscillant entre la 120e et la 180e position. Elle a sa place parmi les meilleures.

Stéphanie Dubois (18 ans) et Aleksandra Wozniak (17) sont plus jeunes, mais font déjà partie de l'élite mondiale chez les juniors. Alexandra se situe actuellement autour du 20e rang, mais elle va monter au classement après la demi-finale à Repentigny. Stéphanie a gagné le tournoi de Hamilton et a fait la finale au Mont Tremblant. Ces deux filles progressent de plus en plus. Avec Mélanie Marois, elles ont leur place sur le circuit international.

Stéphanie et Aleksandra, qui ont participé au Tournoi de Repentigny, sont deux joueuses complètement différentes. Stéphanie est une fille qui travaille fort, elle est dans une forme superbe, court sur toutes les balles, a du « guts » tandis qu'Aleksandra a un touché, une main exceptionnelle, des coups fluides. Elle a beaucoup de tennis dans le corps, a un talent inné avec une main pour déposer la balle où elle le veut, un peu comme Roger Federer.

C'est une vie palpitante, mais difficile, que le tennis professionnel. C'est encourageant de voir des filles prêtes à faire des sacrifices. Les verra-t-on dans un tournoi du Grand Chelem? Pourquoi pas. Elles ont eu leur place avec les invitations à Montréal, mais dans les tournois de la série Masters, c'est plus difficile parce qu'il y a moins de place et qu'habituellement, les meilleures y participent. Pour prendre part à un tournoi du Grand Chelem, il faut améliorer son classement, notamment en prenant part à des tournois secondaires, avec de plus petites bourses. Il faut se trouver parmi les 110 premières au monde pour s'assurer d'avoir sa place sinon, il faut passer à travers les qualifications.

*Propos recueillis par RDS.ca