LONDRES (AFP) - En parvenant en finale du tournoi de tennis sur gazon de Wimbledon, samedi, la jeune Russe Maria Sharapova a emporté le tennis féminin et toute la vieille Angleterre dans un tourbillon de charme et d'efficacité.

Extrêmement expressive, la jeune fille semble chanter un opéra quand elle joue au tennis. Si belles sont ses attitudes, qu'il y a aussi de la ballerine en elle. Cependant, elle est aussi rieuse et naturelle.

Rien à voir en tout cas avec la petite poseuse assez détestable, Anna Kournikova, devenue milliardaire sans avoir gagné un seul tournoi et avec laquelle elle ne veut plus être comparée. "On est toutes les deux blondes et Russes, ça s'arrête là !", affirme-t-elle en rappelant que, pour sa part, elle a déjà gagné trois tournois.

Pour être superbe, sublime même, n'hésitent pas à imprimer en énormes majuscules certains journaux anglais, la demoiselle a déjà le caractère bien trempé et des convictions lucides et affirmées. Si elle a signé l'an dernier un contrat qui pourrait en faire un "Top Model" (1,83 m, 59 kg), elle n'hésite pas à dire qu'être mannequin est assez ennuyeux.

Pas pour être sexy

S'émerveille-t-on devant les tenues originales qui rehaussent sa très grande beauté, qu'elle remet aussitôt les choses en place: "Bien sûr que j'aime être belle sur le court. Mais je suis ici pour jouer au tennis, pas pour avoir l'air sexy."

Alors que Kournikova collectionnait les soupirants à ses heures perdues, Sharapova suit des cours d'anglais et de mathématiques par correspondance. Il lui est même arrivé de travailler au diplôme de sociologie qu'elle prépare, entre son quart de finale et sa demi-finale de Wimbledon.

"Quand on vient de nulle part et qu'on n'a rien, on a soif de tout et on a très envie de réussir", déclare-t-elle en ne cessant de s'ébouriffer de ce qui lui arrive.

Le trac, l'angoisse des débuts, les calculs tactiques, elle ignore tout cela, se contentant de jouer selon son instinct en savourant au maximum les heureux événements qui se succèdent. "Je veux gagner ce tournoi. Qu'est-ce que j'ai à perdre à 17 ans et qui n'aimerait pas être à ma place au même âge ?", interroge-t-elle sur le ton de l'évidence.

Née en Sibérie à l'ombre des raffineries de pétrole de Naygan, elle suivit ses parents fuyant à Sotchi par crainte des retombées du nuage de Tchernobyl. Elle était alors âgé de deux ans. Deux ans plus tard, elle tenait en main sa première raquette. Puis, rassemblant ses quelque 1000 euros d'économie, son père Youri l'emmena en Floride dans le camp d'entraînement de Nick Bollettieri.

Musculation

"J'avais neuf ans et nous avons logé dans un petit hôtel à notre arrivée avant de prendre le car pour aller chez Bollettieri. Parce qu'elle n'avait pas de visa, ma mère n'a pas pu nous suivre et mon père a dû repartir. Pendant deux ans je suis restée toute seule. C'était d'autant plus difficile que je partageais un dortoir avec des grandes filles qui me persécutaient", raconte-t-elle.

Déjà pas mal endurcie chez l'ancien "marine" qui fait profession de forger des champions, la petite Maria a depuis fait son chemin. Sans se préoccuper autrement de sa ligne, c'est elle qui, notamment, a décidé l'hiver dernier de faire de la musculation pour rendre ses coups plus efficaces.

"Quand j'étais petite, je défiais tout le monde. Je voulais jouer contre des filles ou des garçons, plus ou moins âgés que moi, peu importait. Et surtout je voulais donner tout ce que j'avais et gagner", se souvient cette jeune déesse dissimulant un coq de combat.

Le vieil entraîneur Robert Lansdorf, qui suit aujourd'hui sa carrière en compagnie de son père, soutient qu'il n'a jamais rien vu de pareil et qu'elle deviendra une superstar. Parmi les champions qu'il a modelés figurent Tracy Austin et un certain Pete Sampras.