Ex-entraîneur, André Labelle est un témoin privilégié de l'ascension de Bianca Andreescu
WTA lundi, 18 mars 2019. 14:57 lundi, 18 mars 2019. 15:18Bianca Andreescu est la sensation de l’heure dans le tennis féminin après la conquête de son titre à Indian Wells.
En battant en finale l'Allemande Angelique Kerber, elle est devenue la deuxième joueuse après Serena Williams à remporter le tournoi d'Indian Wells à sa première participation. L'Américaine avait 17 ans et 4 mois lorsqu'elle a remporté le titre en 1999, mais la nouvelle championne d'Indian Wells est la première joueuse invitée à aller jusqu'au bout.
Au 178e rang mondial fin 2018, elle est depuis lundi 24e au classement WTA. Finaliste à Auckland en janvier, demi-finaliste à Acapulco en février, elle s'est offert l'un des titres les plus prestigieux du circuit, un exploit qui a ému son ancien entraîneur André Labelle.
« J’ai versé quelques petites larmes de bonheur, parce que c’était quand même un incroyable tournoi pour elle, a-t-il admis en entrevue avec RDS lundi. On peut dire ce qu’elle dit tout le temps : « l’impossible est possible », et c’est exactement ce qui est arrivé cette semaine. On l’a vu avec Denis (Shapovalov) à la Coupe Rogers quand il a battu Rafael Nadal et qu’il s’est rendu en demi-finale même s'il a perdu contre Alexander Zverev. On a vu aussi Félix (Auger-Aliassime) avec sa semaine à Rio suivie de celle à Sao Paulo. Ce sont trois joueurs de 18-19 ans qui ont réussi une semaine extraordinaire. Comme Dominic Thiem (champion chez les hommes, ndlr) a mentionné après son match, c’est comme le cinquième Grand Chelem, donc c’est quand même un tournoi de très, très haut niveau qu’elle a gagné avec sept matchs contre des filles qui sont au top. Contre (Garbine) Muguruza à 6-0, 6-1, il faut le faire. Puis le match contre (Elina) Svitolina, elle a démontré la force de caractère et la détermination d’une gagnante. »
Andreescu a également fait preuve de persévérance lorsqu’elle tirait de l’arrière en finale. Labelle tient d’ailleurs à souligner l’implication de son entraîneur actuel, Sylvain Bruneau, qui a su la ramener à l’ordre et la motiver au bon moment au troisième set pour la guider vers le succès.
« C’était incroyable la chimie qu’il y a eue entre les deux pendant cette intervention dans le changement de côté. Elle est revenue inspirée, elle a oublié qu’elle avait des bobos. Ce n’est pas facile à ce niveau-là pour réussir, elle a démontré hier qu’elle voulait gagner le tournoi et qu’elle le voulait plus que Kerber. C’était fantastique. C’est inspirant pour tout le monde qui a travaillé avec elle et même pour le tennis au Canada, il va y avoir des petites filles qui vont s’inscrire dans les clubs de tennis grâce à une performance comme ça. »
Labelle a été aux côtés d’Andreescu de 14 à 18 ans et a également été aidé de la Française Nathalie Tauziat, ex-no 3 mondiale. Il dit avoir apprécié sa grande expérience sur le circuit féminin qui ont contribué au développement d’Andreescu. Très tôt, les deux mentors ont remarqué tout son talent.
« On a toujours vu qu’elle avait un énorme potentiel, elle l’a prouvé chez les juniors. Elle a été troisième mondiale chez les 18 ans. À 14 ans, elle a gagné l’Orange Bowl 16 ans, la finale du 14, et l’année suivante, elle a gagné l’Orange Bowl 18 ans. Tu ne fais pas ça par chance. Après, quand elle est sortie du junior et qu’elle a commencé à faire la transition vers les Futures et les Challenger, elle a gagné des Challenger.
« Elle joue un tennis qui n’est pas standard féminin, c’est plutôt un tennis de gars. On avait beaucoup d’ambition et elle avait énormément d’ambition. On voyait dans son jeu qu’elle était capable de faire tellement de choses. Avec toutes les habiletés qu’elle a, elle est capable de tout faire peu importe le plan de match. Ce n’est pas toutes les filles qui sont capables de faire ça. »
Andreescu est la première Canadienne à remporter un WTA Premier. Passée par le Centre national de la Fédération canadienne à Montréal, comme Shapovalov et Auger-Aliassime, celle qui a signé sa 28e victoire de l'année, plus qu'aucune autre joueuse cette saison, a franchi un cap fin 2018.
Plus d'attention, plus de pression
Andreescu a pu compter sur le support de sa meilleure amie Carson Branstine et de l'ex-joueur Simon Larose, qui dirige cette dernière, en Californie. Alors à quelques heures d'Indian Wells, ils ont fait la route ensemble pour aller l'encourager en finale.
Larose n'est pas tout à fait surpris de la victoire de l'Ontarienne et des aptitudes qu'elle a démontrées sur le terrain.
« Pour Bianca, je suis tellement heureux, et pour le tennis au Canada. On a toujours su que Bianca avait quelque chose de spécial, ce n’est pas nouveau cette semaine. Oui, une victoire après l’autre, sept matchs, c’est quelque chose. Par contre, son niveau de jeu, son talent, les coups qu’elle faisait pendant les matchs, ça ne sortait pas de nulle part.
« C’est sûr qu’à ce niveau-là c’est incroyable, mais elle avait des victoires contre ces filles-là dans des Fed Cup avant, comme contre (Irina-Camelia) Begu, alors elle avait quand même l’expérience de jouer contre des bonnes joueuses. Par contre, de le faire back à back dans un tournoi de cette envergure, c’est quand même surprenant un peu, personne n’aurait prédit ça avant le tournoi. Je ne tombe pas en bas de ma chaise non plus. Ça arrive rapidement, tous les morceaux sont tombés à la bonne place cette semaine, mais c’est un niveau de jeu qu’elle avait en elle. »
Un nouveau défi attend désormais Andreescu à Miami, où elle retrouvera dès le premier tour Begu, comme à Indian Wells. Il sera intéressant de voir la Canadienne tenter de maintenir une certaine constance maintenant que tout le monde l'attend de pied ferme et que les yeux sont rivés sur elle plus que jamais.
« La partie la plus importante pour elle dans les prochains mois, avec son entourage, c’est de rester terre à terre, de ne pas se laisser trop embarquer avec la jungle qui va arriver autour d’elle, le monde qui vont vouloir s’approcher d’elle, soutient d'ailleurs Larose. Par contre, elle a un entourage très solide et elle est elle-même très solide dans la sa tête. C'est sûr que ça va être un grand changement pour elle. Je lui ai demandé si elle réalisait ce qui s’est passé, et elle dit que non, pas encore. C’est quand elle va aller à Miami et revenir à Toronto que ça va plus la frapper. Par contre, il va falloir vraiment, même si je ne suis pas inquiet, qu’elle se concentre sur son tennis. On veut promouvoir le tennis au Canada et elle veut se promouvoir elle-même, mais il ne faut pas oublier que c’est son tennis le plus important, que c’est ce qui va lui amener des commandites et tout ce qu’il y a alentour. »
À lire également