MONTRÉAL - Lorsqu'il a entendu la question, Jean-François Manibal n'a pu s'empêcher d'éclater de rire. Puis, il a répondu dans l'affirmative: la journée de mercredi, point de départ de la relance du tennis libre au Québec, sera, en effet, l'une de ses plus agréables des deux derniers mois.

« Oui, ça va être une très, très belle journée. C'est tellement attendu par tout le monde. Ça va faire du bien, parce que ça va enlever un peu de pression sur tout le monde, sur les municipalités, sur les clubs, sur Tennis Québec. Les gens savent qu'ils peuvent jouer au tennis libre. Il n'y aura pas de cours, pas de leçons, pas d'entraînement, mais au moins c'est un début. Alors, oui, ce sera une très belle journée », lance le directeur général de Tennis Québec.

Ce retour du tennis sur les courts extérieurs de la Belle Province, en simple seulement pour l'instant, fait suite à la décision du gouvernement du Québec, le 13 mai, de permettre la relance de certaines activités sportives à des fins récréatives et en plein air.

Cette permission était accompagnée de deux règles incontournables: le respect des mesures de distanciation sociale et l'instauration de règles qui viendront protéger la santé des participants dans un contexte de pandémie. Des mesures que Tennis Québec et Tennis Canada, pour la plupart, avaient eux-mêmes proposées le 1er mai dans un document conjoint acheminé au premier ministre François Legault et à la ministre déléguée à l'Éducation, Isabelle Charest.

Selon Manibal, ce retour sera salutaire pour le bien-être général de la population.

« Les gens sont confinés chez eux depuis un bon bout de temps et je pense qu'il y a une pression énorme sur les épaules de tout le monde, des familles, des enfants. Ça va faire un bien énorme à tout le monde de pouvoir sortir dehors. C'est un peu bizarre à dire, glisse-t-il en ricanant, mais frapper sur quelque chose, ça laisse sortir un peu de pression. »

Manibal s'attend à une grande affluence sur les courts de tennis extérieurs de la province mercredi, mais il insiste sur un mot-clé: prudence.

« L'important c'est de demeurer très patient. Il faut prôner la prudence, parce qu'on ne peut pas faire un pas en avant et deux en arrière. La priorité, c'est la sécurité de nos adeptes. C'est le but principal. On ne veut pas voir des gens aller à l'hôpital, se retrouver dans des situations critiques, parce qu'on est trop pressé de frapper des balles. »

Générosité inespérée

Au-delà de cette reprise du tennis, Manibal a une autre bonne raison d'avoir le coeur plus léger: une campagne de financement qui a généré une réponse au-delà des espérances.

Face à des pertes de revenus qui pourraient grimper jusqu'à 600 000$ pour un budget d'opérations réel de moins de 2 millions $, incluant une somme de 300 000$ liée au report de la Coupe Rogers de Montréal, Manibal a vu son équipe à Tennis Québec réduite de 11 employés, au début de mars, à sept actuellement.

Deux autres employés, dont un le 1er juin, doivent quitter leurs fonctions avant la fin de l'été. Pour le moment, on ne prévoit pas les remplacer. Les membres actuels de l'organisation ont également perdu 25 pour cent de leur salaire.

Conscient que plusieurs membres de la communauté du tennis ont aussi leurs propres tracas en raison de la pandémie, Manibal a néanmoins lancé un appel à l'aide, le 29 avril, dans l'espoir de renflouer un tant soit peu les coffres de l'organisation à laquelle il est associé depuis 40 ans.

« On s'est fixé un objectif de 10 000 $. On s'est dit, on va y aller de façon graduelle, avec un objectif très bas et on corrigera au fur et à mesure si on voit qu'il y a une bonne réponse. On ne s'attendait pas à aller chercher 100 000$, mais n'importe quoi nous aide présentement », mentionne Manibal.

Or, en début de soirée mardi, Tennis Québec avait recueilli 19 275 $. De plus, cette somme sera bonifiée dans le cadre du programme d'appariement gouvernemental Placements Sports. Mis en place il y a huit ans, ce programme stipule que pour chaque dollar versé à Tennis Québec dans le cadre de ses opérations régulières, le gouvernement remet à l'organisation l'équivalent de 140 pour cent de ce don.

« Ça va nous permettre de garder des ressources humaines un peu plus longtemps, note Manibal. Pour nous, c'est surtout ça, parce que quand on passe de 11 à cinq personnes, il faut quand même donner des services, réussir à satisfaire notre clientèle. C'est dramatique notre situation. Ça nous permettra de donner un coup de pouce supplémentaire à l'interne. »

Manibal l'admet: il est impressionné par l'appui de la communauté du tennis québécois à l'appel à l'aide qu'il a lancé. Cette réaction, dit-il, a contribué à mettre un baume sur cette situation difficile.

« Je regarde l'ensemble des donateurs et je suis surpris de voir combien il y a de gens que je ne connais pas, qui sont simplement des parents ou des 'fans' de tennis. C'est pour ça que je dis que ça m'impressionne. Ce sont des gens de tennis, mais pas des gens qui gravitent nécessairement tout près de nous. On a déjà fait des petites campagnes de financement dans le passé et on n'a jamais eu cette réponse-là.

« Je suis fier de notre petite communauté, je suis fier de Tennis Québec surtout, de voir comment on a réagi parce que c'est la première crise de ce genre-là, ajoute-t-il. On est tous dans la même situation. On a dû faire comme tout le monde, apprendre sur le tas et réussir à se sortir un petit peu la tête de l'eau. »