MONTRÉAL – Les entraîneurs du milieu du sport universitaire le rappellent souvent : les études sont la priorité pour leurs athlètes. Ajoutez à cela la santé.

La publication en janvier dernier d’un reportage de l’émission Enquête révélait les lacunes du Réseau du Sport étudiant du Québec (RSEQ) et de Football Québec concernant la gestion des commotions cérébrales au football scolaire.

Il semble que les deux instances aient compris le message, particulièrement le RSEQ. Durant le printemps, les six équipes du réseau universitaire, en compagnie de leurs thérapeutes, ont été invitées à une rencontre. 

Ce rendez-vous avait été organisé dans le but de partager les manières de faire de chaque formation en ce qui a trait au protocole entourant les commotions cérébrales. Ayant des équipes médicales très complètes au niveau universitaire, les commotions cérébrales ont été généralement bien traitées.

« Ça nous a permis de voir que les six équipes prennent ça au sérieux et qu’elles ont toutes des protocoles avec leur équipe médicale. Nous avons échangé sur les manières de travail et les façons de faire. Ce sont de bons premiers pas », a mentionné l’entraîneur-chef du Vert et Or de Sherbrooke, David Lessard.

Cette rencontre a abouti aux balbutiements d’un protocole uniformisé dans le football universitaire. L’entraîneur-chef des Redmen de l’Université McGill, Clint Uttley, a confirmé qu’il y a maintenant un processus de sept étapes pour qu’un joueur puisse reprendre le jeu avec contact à la suite d’une commotion.

« On veut que nos jeunes soient en santé. Le football, c’est la deuxième plus belle chose au monde. La première, c’est la santé », a rappelé Lessard.

Des outils pour aider à détecter les commotions

Lessard et l’Université de Sherbrooke ont pris les grands moyens pour s’assurer de bien gérer les risques de blessures - tant à la tête qu’à toutes autres parties du corps - de leurs joueurs.

L’université francophone de l’Estrie a fait l’achat de 30 capteurs de l’entreprise Shockbox qui permet de recueillir des données sur les impacts subis par les joueurs. Ces données sont ensuite transmises sur une tablette électronique et peuvent être analysées en direct par les médecins de l’équipe.

« Ce n’est pas un outil qui va détecter les commotions. Il va te donner les informations sur les coups à la tête. Pour l’équipe médicale, ça leur dit qui peut avoir subi un gros coup pour aller voir son état. Ça donne une idée », a expliqué le pilote du Vert et Or, qui en sera à sa troisième saison à la barre de l’équipe.

Lessard a aussi utilisé les capteurs Shockbox pour modifier ses séances d’entraînement. Il a analysé les données recueillies pour chaque exercice. Lorsqu’il se rendait compte que l’un d’entre eux comportait trop de coups à la tête, il le remplaçait par une activité avec moins de risque de blessure.

« J’ai modifié les éducatifs pour être une meilleure équipe de football, mais plus en santé. C’est vrai pour les blessures à la tête, mais aussi pour tout le corps. Les blessures dans un match, c’est inévitable. Les blessures en entraînement, c’est fâcheux », a exprimé Lessard.

La sensibilisation, la clé pour contrer le dopage

Le dopage dans le football universitaire est revenu dans l’actualité au cours du mois d'août. Un article de Rick Westhead de TSN révélait que trois joueurs vedettes  ont échoué à un test antidopage lors du camp d’évaluation de la LCF à Edmonton.

Le Centre canadien pour l’éthique dans le sport (CCES), qui est responsable d’effectuer les tests antidopage, n’a pas encore révélé l’identité des joueurs fautifs, ni les universités qu’ils représentent. Étant donné que le camp avait lieu en Alberta, plusieurs ont commencé à montrer du doigt l’Association Ouest du Sport interuniversitaire canadien (SIC).

Sensibiliser les jeunes

« Je serai le premier à dire que je suis très déçu, a affirmé l’entraîneur-chef des Dinos de Calgary, Blake Nill, de passage à Québec pour un match préparatoire contre le Rouge et Or. Mais jusqu’au dévoilement des coupables, ne laissez pas sous-entendre que c’est un problème dans l’Association Ouest. En tant qu’entraîneur, il faut poursuivre cette bataille parce que le dopage existe. Il faut continuer à éduquer nos athlètes et utiliser nos expériences pour les encourager à prendre les bonnes décisions. »

L’article de Rick Westhead mettait aussi en lumière les failles d’un système sous-financé pour surveiller les étudiants-athlètes. Le travail des entraîneurs devient alors encore plus important dans ce dossier.

« Nous avons une politique à McGill où le département athlétique peut décider de tester n’importe quel joueur. Je suis entraîneur depuis 15 ans. Alors quand je vois un jeune, je peux déceler s’il consomme des produits dopants. Alors je lui dirais que ce n’est pas bien et que nous lui ferons passer des tests », a fait savoir Clint Uttley.

« Je connais presque tous les entraîneurs du SIC et nous sommes tous sur la même page concernant ce sujet. Je ne crois pas qu’il y ait un groupe plus solide pour supporter nos athlètes. Bien que ce fut décevant d’apprendre cette nouvelle, c’est un rappel qu’il faut continuer à éduquer et à en parler avec nos jeunes », a rappelé Blake Nill.

Malgré la faible fréquence des tests, l’aspect aléatoire de ceux-ci peut aider à décourager les athlètes. Les exemples de joueurs qui ont été pris en flagrant délit montrent aussi les conséquences.

« Un joueur qui se fait prendre à McGill est expulsé de l’équipe et peut aussi l’être de l’université selon le code de conduite. Un de nos joueurs s’est fait prendre il y a quatre ans. Je n’aime pas le nommer, mais je rappelle cette expérience à mes joueurs pour qu’ils se souviennent de ce qui peut leur arriver s’ils prennent une mauvaise décision », a exposé Uttley, qui a aussi ajouté que les joueurs, entraîneurs et administrateur du RSEQ doivent suivre un cours sur le dopage.

« Chez le Vert et Or, on est chanceux. Nous n’avons jamais eu de cas de dopage dans l’histoire du programme. Mais, on est toujours à risque quand même. Même si on en parle encore et encore, si un jeune décide de prendre ce chemin-là, c’est sa décision à lui. Notre réponse à l’interne c’est d’en parler énormément. On essaie de ne pas rendre ça tabou en espérant que les jeunes réalisent que ce n’est pas la marche à suivre », conclut David Lessard.