MONTRÉAL - À environ cinq semaines de la mise au jeu inaugurale, il ne restait que de menus détails à peaufiner en prévision du premier des 19 matchs en sept jours, le lundi 20 avril sur le coup de midi. Jusqu'à ce que la COVID-19, à la mi-mars, ne vienne priver la grande communauté de Saint-Hyacinthe d'un moment qu'elle attendait avec fébrilité. Et peut-être aussi les Cantonniers de Magog.

Jusqu'à samedi, le stade L.-P. Gaucher devait accueillir six équipes de toutes les régions du pays dans le cadre du Championnat canadien de hockey midget, baptisé «Coupe Telus» depuis 2005. L'une d'elles allait être les Gaulois de Saint-Hyacinthe, de la Ligue midget AAA, à titre de club-hôte.

Ce n'est peut-être que partie remise pour les Gaulois, le comité organisateur et les centaines de bénévoles qui se sont lancés corps et âme dans cette aventure depuis l'automne de 2018. Il est en effet possible que Hockey Canada confie de nouveau l'organisation de l'événement - qui a habituellement lieu au Québec à tous les cinq ans - à la ville de Saint-Hyacinthe l'année prochaine.

« C'est une déception pour les gens, parce que nous étions prêts, mais ils ont encore envie de s'impliquer », affirme Jean-Claude Ladouceur, directeur général du comité organisateur, au sujet des bénévoles.

« Leur implication se résume à deux mots : enthousiasme et fierté, du début à la fin, ajoute-t-il. On n'a jamais senti de faiblesse, nous avons toujours senti un intérêt à être présent. »

Président du comité organisateur, l'homme d'affaires Jean Bédard avait de grandes ambitions pour l'édition 2020 de la Coupe Telus. Il avait convaincu Bruno Gervais, un ancien porte-couleurs des Gaulois du Collège Antoine-Girouard - l'ancienne appellation de l'équipe maskoutaine - d'accepter la présidence d'honneur de l'événement, ce que Gervais a fait avec empressement et enthousiasme.

Le comité organisateur avait aussi conclu une entente avec le Centre des Congrès de Saint-Hyacinthe pour loger chacun des clubs visiteurs sur un étage de l'hôtel rattaché au complexe. Et tous les jours, les écoliers du secteur auraient été invités à participer à des activités parallèles et à assister aux matchs, le tout gratuitement.

« C'aurait été la plus belle Coupe Telus jamais présentée. Hockey Canada n'aurait jamais vu rien de tel » lance Bédard, qui est aussi président du conseil d'administration des Gaulois.

« Le tournoi était un prétexte pour faire une fête collective à Saint-Hyacinthe. On avait le support de tout le monde, de la ville, des députés. »

Ce ne sera toutefois pas partie remise pour Gabriel Fredette, un Maskoutain de 17 ans, qui souhaitait vivre ses derniers moments avec l'équipe de sa ville natale dans cette atmosphère de fête.

« Avant le début de la saison, j'aurais pu aller jouer au niveau collégial, mais j'ai décidé de rester avec les Gaulois pour une troisième année parce que je savais que nous allions participer à la Coupe Telus. Ç'a été une décision assez facile pour moi, car j'avais le goût de vivre cette expérience. C'est un tournoi qui réunit les meilleures équipes au Canada et nous avions la chance d'être le club-hôte. C'est décevant, c'est certain. »

Un tournoi prestigieux et exigeant

Sans posséder la notoriété, l'histoire et le rayonnement médiatique de la Coupe Memorial, la Coupe Telus n'en est pas moins un événement de haut niveau. Né en 1974 sous le nom de la Coupe Wrigley, avant de devenir la Coupe Air Canada en 1979, le tournoi a accueilli de nombreux joueurs qui allaient connaître de grandes carrières dans la LNH.

Sidney Crosby, Joe Sakic, Steve Yzerman, Ron Francis, Mike Gartner, Jonathan Drouin et Morgan Rielly y sont passés. Patrick Roy et Kristopher Letang aussi, tout comme l'entraîneur-chef du Canadien, Claude Julien, et son adjoint Luke Richardson.

Au cours des deux dernières années, l'ancien gardien Félix Potvin a vécu l'événement à la barre des Cantonniers de Magog. Chaque fois, son équipe s'est inclinée en grande finale, incluant un revers crève-coeur en deuxième période de prolongation, en 2019, à Thunder Bay. Malgré cela, il en garde de bons souvenirs.

« Ça été une expérience exceptionnelle pour mes joueurs. Mais c'est un tournoi extrêmement exigeant. Les deux dernières années, nous avons joué sept matchs en sept jours. Il n'y a pas de journées de repos. Il faut que toutes les étoiles soient alignées et qu'il n'y ait pas de blessures. »

Potvin et les Cantonniers espéraient réaliser un rare tour du chapeau en atteignant le tournoi pour une troisième année d'affilée en 2020.

Après avoir terminé au premier rang du classement de la Ligue midget AAA avec 33 victoires en 42 matchs, les Cantonniers avaient gagné leurs cinq premières parties éliminatoires par un score cumulatif de 29-5. Ils n'avaient besoin que d'une victoire pour atteindre les demi-finales.

« Il restait encore de bonnes équipes, note Potvin. Lévis avait connu une très bonne fin de saison. Châteauguay jouait du bon hockey aussi, alors loin de moi l'idée de prétendre qu'on allait s'y rendre encore. Mais c'est certain qu'on était sur la bonne voie. x

Davantage que pour lui, ce rendez-vous raté avec l'histoire est décevant pour les jeunes, souligne Potvin.

« Le but, c'est de se rendre jusque-là, d'autant plus que cette année, ce n'était pas loin de chez nous. Nos partisans auraient pu se déplacer. Mais compte tenu des circonstances, on ne peut pas s'apitoyer sur notre sort. Il y a des choses plus importantes dans la vie à traverser. »