Les dirigeants de l'IAAF ont scruté le corps de Caster Semenya pendant une décennie, remettant en question son éthique, l'encourageant à utiliser des médicaments afin de limiter sa production d'hormones et allant même jusqu'à mettre en doute sa féminité.

La championne olympique en a peut-être finalement assez entendu.

Semenya a offert cette semaine la plus claire indication qu'elle ne voulait plus faire partie de l'élite en athlétisme. Et qu'elle ne voulait plus se battre en cour contre l'IAAF, comme c'est le cas depuis le début de sa carrière.

La Sud-Africaine âgée de 28 ans a déclaré qu'elle avait conclu une entente avec un club de soccer de son pays pour la saison prochaine, ce qui signifie qu'elle réorientera sa carrière chez elle plutôt qu'aux Jeux olympiques de Tokyo en 2020 – où elle aurait pu convoiter une troisième médaille d'or consécutive au 800 m.

Une « nouvelle aventure », a-t-elle dit à propos de sa décision.

Si Semenya se retire de l'athlétisme – elle n'a toujours pas fait d'annonce officielle en ce sens –, ça mettrait un terme à une saga qui se poursuit depuis son entrée en scène à 18 ans aux Championnats du monde de 2009. Semenya, alors une illustre inconnue, avait réalisé une performance époustouflante qui lui avait permis de s'adjuger l'or, avant de se retrouver au centre d'une controverse que son sport n'est toujours pas parvenu à régler.

Semenya est née avec les chromosomes XY associés habituellement au sexe masculin, mais elle possède aussi des caractéristiques féminines. Elle a été légalement reconnue en tant que femme à sa naissance, et s'est identifiée en tant que telle tout au long de sa vie.

Mais sa condition signifie aussi qu'elle produit un niveau anormalement élevé de testostérone pour une femme – un niveau semblable à celui d'un homme, selon l'analyse de l'IAAF –, lui procurant un avantage injuste par rapport à ses rivales.

Ainsi, peut-être que la décision de se retirer de Semenya, si c'est bel et bien son choix, sera son dernier geste de révolte contre l'IAAF. Elle quittera l'athlétisme plutôt que d'adhérer à de nouveaux règlements qu'elle n'approuve pas et qu'elle a contestés devant deux tribunaux jusqu'ici.

Il pourrait toutefois y avoir des regrets – notamment au sein de l'IAAF – si la victoire de Semenya à la Classique Préfontaine le 30 juin dernier était sa dernière course en carrière. À cause de son talent, d'abord, mais aussi à cause de son attitude.