Il y a quelques jours, j’ai accepté de me joindre à un groupe de coureurs pour une petite sortie matinale d’une heure à St-Lambert, sur la Rive-Sud de Montréal. Je me disais que c’était l’occasion idéale de me faire pardonner tous ces refus que je leur avais adressés en prétextant un conflit d’horaire. Je vous raconte.
 
Le rendez-vous avait été fixé à 8 h à la piste d’athlétisme du Parc de la voie maritime, un superbe endroit que j’affectionne particulièrement. À mon arrivée, une dizaine de coureurs en survêtements étaient déjà sur place, dégustant un café dans un verre cartonné tout en échangeant sur les derniers potins du monde de la course à pied. L’un portait de toutes nouvelles chaussures dont il vantait les mérites alors qu’une autre expliquait que son conjoint s’était finalement mis au jogging.

Lorsqu’ils me virent arriver, ils s’empressèrent de me saluer et de me remercier d’avoir finalement accepté leur invitation. « Depuis le temps! », me lança un coureur que je ne connaissais pas avec un ton de reproche dans la voix.
 
On me posa quelques questions sur ma forme physique, sur mes dernières compétitions, sur mon métier et, bien entendu, sur le Canadien de Montréal. Le temps filait et vers 8 h 30, j’ai proposé qu’on amorce notre course en groupe si tout le monde était là. Le trafic le long de la rue Riverside était déjà important et je craignais qu’il s’empire si on attendait encore.
 
Cette préoccupation fut accueillie par un court silence suivi de quelques sourires. Celui qui semblait être le coach de ce groupe s’approcha de moi pour me parler et je compris alors que ma sortie de course ne serait peut-être pas celle que j’avais imaginée. « On est mardi Fred. À matin, on fait des intervalles sur la piste! »
 
Misère! J’étais piégé. Impossible de reculer sans perdre la face. Les intervalles sont un douloureux, mais pourtant essentiel, passage dans une semaine d’entraînement. Mais rares sont les coureurs qui attendent cet entraînement avec impatience. Car voyez-vous, faire des intervalles, ça fait mal!
 
Un entraînement plus court, mais plus efficace
 
Tous les programmes sérieux d’entraînement de course à pied comportent au moins une séance d’intervalles par semaine. Pour rendre la chose simple, disons qu’il s’agit d’un type d’entraînement fractionné à l’intérieur duquel des segments rapides de course à intensité cardiaque élevée alternent avec des périodes de récupérations plus tranquilles.  
 
Paavo NurmiLes intervalles ne constituent pas un phénomène nouveau. Déjà, le coureur de fond Finlandais Paavo Nurmi, gagnant de douze médailles olympiques, effectuait de courtes séances de course à allure élevée en 1920. Ce véritable précurseur avait rapidement compris l’importance d’un entraînement méthodique et rigoureux.
 
Le Britannique Roger Bannister, premier homme à avoir couru le mile en moins de quatre minutes en 1954, faisait une dizaine de répétitions de 400 mètres sur piste pour augmenter sa vitesse et son endurance. Et que dire du légendaire Tchécoslovaque Emil Zatopek qui s’est imposé sur des distances allant du 5000 mètres au marathon dans les années 1940 et 1950 sinon qu’il est considéré comme l’inventeur des intervalles. Cela lui a permis de battre 18 records du monde et de gagner un grand nombre de médailles sur des distances variées.
 
Il est prouvé que l’inclusion d’intervalles dans un plan d’entraînement améliore sensiblement la capacité cardiorespiratoire d’un athlète, qu’il soit débutant ou élite. Cela aide à atteindre un niveau de forme plus rapidement qu’en accomplissant simplement des séances d’entraînement à une vitesse constante. Lors de ces courtes périodes d’exercices intenses et exténuantes, la dépense calorique est également plus avantageuse. C’est donc une façon éprouvée de perdre du poids puisque les muscles continuent de brûler de l’énergie pour récupérer et se régénérer lorsque l’exercice est terminé.  Bref, il n’y a que des avantages à faire du travail fractionné puisque la période d’entraînement est plus courte et procure un résultat identique à une sortie normale à vitesse constante.
 
Je le répète, tous les coureurs, peu importe leur niveau d’expérience ou de forme, peuvent inclure des intervalles dans leurs routines d’entraînement. Il suffit d’ajuster correctement la durée et l’intensité de celles-ci de même que les périodes de récupération. C’est la clé.
 
Il est généralement entendu que les courts segments à haute intensité doivent se faire à 85-90 pour cent de la vitesse maximale que peut atteindre un coureur lors d’un sprint. Par exemple, lors de ma course à Saint-Lambert, on m’a proposé de compléter 25 intervalles de 20 secondes de course soutenue suivie de 40 secondes de jogging lent pour récupérer. Le tout devait être précédé de 15 minutes de course à un rythme facile pour bien préparer mes muscles au choc à venir.
 
J’avoue, avec une certaine fierté, que j’ai réussi à ne pas trop mal paraître, car j’ai terminé cet entraînement fractionné en limitant les dégâts. Mais ce fut douloureux. J’avais l’impression que le cœur voulait me sortir de la poitrine en plus d’avoir les poumons en feu. Après ma dernière répétition, j’ai joggé lentement pendant une quinzaine de minutes avec un large sourire sur le visage. Ne me restait plus qu’à essayer de marcher normalement jusqu’à ma voiture sans laisser paraître la rigidité qui s’installait lentement dans chacune des fibres des muscles de mes jambes. Ouf!
 
Chers amis coureurs, si vous souhaitez atteindre votre objectif lors de vos prochaines courses organisées, je vous conseille fortement d’inclure, si ce n’est déjà fait, des séances d’intervalles à votre entraînement. Une belle manière de briser la routine de vos sorties à rythme constant. Mais surtout, la meilleure façon d’améliorer votre forme physique en peu de temps.
 
Bonne course!