L'année 2017 n’est pas une année olympique. Pourtant, elle risque d’offrir aux amateurs d’athlétisme un spectacle enlevant en raison du départ à la retraite du plus grand sprinter de tous les temps, Usain Bolt.

Le rapide Jamaïcain a mentionné à plusieurs reprises que sa participation aux Championnats du monde d’athlétisme de Londres, du 4 au 13 août prochain, serait son chant du cygne. À 29 ans (seulement 29 ans), il a le sentiment d’avoir tout accompli. Et qui peut le contredire à ce sujet?

Celui qu’on surnomme l’Éclair a à son actif 8 médailles d’or olympique et 11 médailles d’or aux Mondiaux d’athlétisme. Dans les deux cas, cela fait de lui l’athlète le plus titré de l’histoire en sprint. Il détient les records du monde aux 100 mètres (9,58) et 200 mètres (19,19). Tout a été écrit sur ce coureur hors normes qui aimerait bien fermer le livre de sa formidable histoire sur une dernière page victorieuse.

Mais un jeunot canadien a l’intention de venir gâcher la fête. La carrière d’Andre De Grasse a connu une progression fulgurante  au cours des deux dernières années. Plusieurs l’identifient maintenant comme le dauphin légitime de Bolt après que celui-ci l’eut adoubé grâce à des propos louangeurs lors des Jeux olympiques de Rio. Et qui ne se souvient pas de cet incroyable duel en demi-finale du 200 mètres alors que De Grasse avait poussé le roi Bolt jusqu’à la limite.Andre De Grasse et Usain Bolt

Ce dernier, avec un large sourire accroché au visage, avait tout de même fait comprendre au jeune canadien qu’il n’avait pas apprécié une telle dépense d’énergie alors que leurs qualifications pour la finale était pourtant assurée.  Au passage, De Grasse avait établi un nouveau record national sur la distance (19,80). Le tout s’était soldé par une finale aux côtes d’écoutes mondiales record alors que Bolt avait gagné l’or et De Grasse l’argent.

Mais qu’en est-il de l’ambition de notre sprinter canadien? Est-elle légitime? Peut-il vraiment aspirer vaincre cet Himalaya de vitesse auquel tant de coureur se sont butés?

Selon moi non! Et je ne le souhaite pas. D’abord parce que ce serait gâcher le départ d’une légende et ce ne serait pas très poli.

Mais surtout parce qu’il n’a pas encore la vitesse de Bolt. De l’avis même de l’entraîneur du coureur de 22 ans, Stuart McMillan, son protégé n’a pas connu un camp d’entraînement optimal à Phoenix en Arizona. Et pour battre Bolt, De Grasse devrait probablement sortir son meilleur chrono à vie au 100 mètres. Il est présentement à 9.91. C'est vrai qu'il a gagné en 9.69 le 18 juin 2017 à Stockholm, mais avec un vent de dos trop vraiment trop fort (+ 4,8 m/s) pour être officiel.  Et il y en a d’autres qui eux aussi aimeraient bien jouer les troubles fêtes et être reconnus comme ceux ayant barré la route à Bolt.

Pour avoir une meilleur idée de la forme de notre Canadien, on doit plutôt regarder ce qu'il a fait lors de la finale du 100 mètres de la Ligue de diamant d’Oslo, jeudi dernier (15 juin). De Grasse a terminé en 10,01 pour défendre son titre acquis l’année précédente. Un chrono ordinaire, mais qui lui a tout de même permis de remporter l’or. Bolt n’y était pas. Rien ne laisse croire toutefois qu’un temps similaire permettrait au sprinter canadien de devancer Bolt à Londres. Il est difficile d’imaginer que la plus haute marche du podium appartiendra à un homme n’ayant pas couru plus vite.Andre De Grasse

Pour le moment, Usain Bolt a annoncé qu’il ne prendrait part qu’au 100 mètres dans la capitale du Royaume-Uni. Une décision étrange puisqu’il est souvent plus dominant au 200 mètres. Ses longues foulées et son accélération tardive donnent l’impression qu’il trotte dans le dernier quart de la course tellement son avance est grande. Risque-t-il de changer d’idée à la dernière minute? Je serais le moins surpris des hommes.

La prudence devrait être de mise pour tous ceux qui avancent que De Grasse est la prochaine vedette internationale du sprint. Il n’a toujours pas de titre olympique ou de championnat du monde. Le jeune homme doit d’abord prouver qu’il a l’étoffe d’une étoile. Heureusement, son amitié avec Bolt est réelle. En plus d’être lié par le même commanditaire majeur (Puma), ils ont développé des liens d’amitiés. De Grasse n’hésite pas à demander conseil à son mentor, une attitude qui ne peut que l’aider à progresser.

Déjà, Bolt n’hésite pas à dire que son jeune ami a le potentiel pour être un des meilleurs sprinters de la planète. C’est à lui de saisir l’occasion. Mais cela, il pourra le faire seulement quand le maître incontesté de la discipline, le roi Bolt, aura volontairement abandonné son trône.

Le Championnat du monde d’athlétisme de Londres sera la dernière grande scène sur laquelle l’homme le plus rapide de l’histoire fera montre de son talent inné. Lorsque le rideau sera tombé sur une carrière légendaire, il appartiendra à Andre De Grasse de commencer à bâtir la sienne.

Victoire sans équivoque d'Andre de Grasse à Stockholm