Montréal, Qc – Une page d’histoire se tournera, dimanche, aux mondiaux de patinage de vitesse courte piste de Montréal. Charles Hamelin y effectuera les derniers coups de patin de sa carrière en finale du relais masculin 5000 m. L’athlète le plus titré de l’histoire de la discipline se retirera après plus de 20 années de labeur, au cours desquelles il aura donné tout son sens au qualificatif « professionnel ».

Portrait du patineur aux quelque 185 médailles internationales, avec la collaboration d’Éric Bédard, Mathieu Turcotte et Dany Lemay, qui ont tous eu la chance de le voir évoluer depuis ses débuts avec l’équipe nationale sénior, en 2003.

Fort d’une progression remarquée au niveau junior, Hamelin rejoignait alors une formation aguerrie qui venait tout juste de perdre son meneur, Marc Gagnon.
« Ce n’était pas évident pour Charles ! Il arrivait au sein d’un groupe qui avait déjà du succès et qui avait fait ses preuves. On était l’équipe à battre et nous avions déjà une belle synergie. Lui, on savait que c’était un bon prospect, mais c’était le petit nouveau », se remémore Éric Bédard.

Malgré l’ampleur du défi, Hamelin a rapidement fait sa place aux côtés de Bédard, Turcotte, Jonathan Guillemette et François-Louis Tremblay, avec qui il a représenté le Canada aux Jeux olympiques de Turin, en 2006.

« C’était une force brute ! Il n’était pas hyper bon au niveau technique, mais il était vraiment fort sur la glace. Mathieu Turcotte et moi, on servait de mentors pour Charles et on s’est liés d’amitié assez vite. On s’est assurés qu’il rentre dans la gang », raconte Bédard.

« Étant son co-chambreur à ses débuts, j’ai beaucoup voyagé avec Charles et on a fait les 400 coups ! Je me rappelle de l’avoir emmené en voiture dans les Keys, dans le sud des États-Unis. Il pensait qu’on allait faire un camp, mais finalement, on allait célébrer notre entre saison avec d’autres patineurs », ajoute Mathieu Turcotte en riant.

« Ça n’a pas été une semaine très reposante, mais on a passé beaucoup de temps ensemble et c’est là qu’on a vraiment développé notre amitié. Il a fait sa place et il est rapidement devenu un leader, malgré son jeune âge. »

La table était mise pour le début d’une longue et fructueuse carrière.

Fidèle à lui-même

Peu importe l’âge, Charles Hamelin a toujours fait preuve d’une éthique de travail exemplaire. Que ce soit sur la patinoire ou à l’extérieur, il n’a jamais hésité à mettre les bouchées doubles pour arriver à ses fins. Une qualité parmi tant d’autres qui lui ont permis d’atteindre les plus hauts sommets de son sport et d’y demeurer pendant 19 ans.

« Au fil du temps, il a peaufiné sa technique et il s’est beaucoup amélioré. Il était de plus en plus rusé et stratégique, analyse Éric Bédard. Au final, c’est son éthique de travail qui l’a mené sur le podium. Charles, c’est un gars qui n’a jamais manqué une pratique. J’ai même eu la chance de l’entraîner un an et je ne peux même pas me rappeler d’une fois où il a dû s’absenter. S’il n’est pas à l’aréna, il y a lieu de s’inquiéter. »

Qui plus est, le patineur de 37 ans aura su se démarquer au niveau individuel, mais aussi collectivement. En plus de mener la formation canadienne à une panoplie de podiums au relais 5000 m, il a toujours été un exemple à suivre pour ses coéquipiers.

« Ce n’est pas difficile ! Charles, c’est l’athlète modèle pour l’entraîneur et les autres patineurs, soutient Mathieu Turcotte. Il est compétitif, discipliné et il prend ça au sérieux. En plus, il a toujours été un joueur d’équipe, ce qui est primordial dans le sport. C’est ce que je retiendrai le plus de lui. »

Plus rien à prouver

L’ex-patineur Dany Lemay a côtoyé Charles Hamelin de près tout au long de sa carrière. D’abord comme athlète pendant des entraînements à l’aréna de Sainte-Julie dans les années 1990, puis, pour une très courte période, à titre d’entraîneur au Club Montréal-International, l'ancien club d'élite au Québec.

« Il n’est pas resté très longtemps avec nous ! » lance à la blague celui qui a surtout pu assister aux grands moments sportifs de Charles Hamelin à titre d’annonceur.
Il a notamment été aux premières loges lors de cinq de ses six podiums olympiques, tout comme lors de sa conquête du titre mondial à Montréal, en 2018. Si Lemay avoue avoir observé une évolution constante, dans les bons comme dans les moins bons moments, un trait de personnalité a toujours prédominé chez Hamelin, soit sa passion.

« S’il n’était pas aussi passionné, le reste n’aurait jamais suivi et il n’aurait jamais été au sommet aussi longtemps. Autant dans son prime que dans les dernières années, il a toujours patiné avec passion. Ce n’est pas un hasard qu’il ait pu continuer aussi longtemps et remporter autant de médailles », souligne l'auteur du surnom la « locomotive de Sainte-Julie ».

Des années plus tard, force est d’admettre que les accomplissements d’Hamelin vont bien au-delà de la glace.

À Pékin, où il a disputé ses cinquièmes Olympiques et a été le porte-drapeau canadien en compagnie de Marie-Philip Poulin en cérémonie d’ouverture, il est devenu l’athlète masculin canadien le plus titré de l’histoire des Jeux d’hiver avec six médailles, dont quatre d’or. Le tout s’est ajouté à ses 37 podiums aux mondiaux et à ses 142 médailles en Coupe du monde, ce qui constitue un palmarès inégalé dans la discipline.

« Au-delà de la locomotive sur la glace, Charles a été la locomotive pour plusieurs générations de patineurs, par sa rigueur, sa discipline et sa passion. Il a toujours su s’adapter et il a positivement évolué tant comme athlète que comme homme. C’est le patineur avec le palmarès le plus impressionnant et c’est tout à son honneur ! » résume Dany Lemay en guise de conclusion.

Comme il l’a fait si souvent, Charles Hamelin voudra faire vibrer l’aréna Maurice-Richard une dernière fois à l’occasion de la finale du relais masculin, où les Canadiens seront opposés aux Néerlandais, aux Sud-Coréens et aux Hongrois, dimanche.

Famille, amis et anciens coéquipiers seront présents parmi tant d’autres pour observer le vétéran et, l’espèrent-ils, pour entendre Dany Lemay annoncer le dernier podium de sa carrière.

Assisteront-ils à un scénario hollywoodien comme celui des Jeux olympiques de Pékin ?

Nul ne peut le dire, mais une chose demeure certaine : les frissons seront au rendez-vous et c’est avec fierté que Charles Hamelin pourra faire ses adieux à la foule québécoise.