MONTRÉAL (PC) - Jeffrey Loria, propriétaire des Expos, devait se dire que Felipe Alou en mettait du temps à se décider. Tellement de temps en fait pour se décider à démissionner qu'il a dû passer lui-même aux actes et le congédier, quitte à lui verser, bien malgré lui, le reste de son salaire pour la saison 2001.

On lui avait déjà enlevé bien des joueurs importants, on lui laissait dans les pattes le directeur général Jim Beattie avec lequel il ne s'entendait pas très bien, on lui avait fait l'affront de congédier sans aucune raison véritable deux de ses instructeurs hispanophones Luis Pujols, son bras droit, et Bobby Cuellar, son instructeur des lanceurs, le 20 juillet de l'an dernier.

On pensait ébranler Felipe Alou. C'était mal le connaître. Il n'a pas bronché, forçant ainsi Loria à le congédier en posant un autre geste qui a certes déplu aux amateurs montréalais mais aussi au monde du baseball en général, parce qu'Alou est un homme respecté.

Mais Loria peut bien agir à sa guise, le club est complètement à lui maintenant.

Et la véritable ère Loria a commencé quand Jeff Torborg, son grand ami, a remporté son premier match à titre de gérant des Expos samedi.

Loria n'était pas sur place pour congédier lui-même Alou jeudi dernier. Il a laissé le sale boulot à ses hommes de mains; Beattie et son beau-fils David Samson.

Mais il était là samedi pour sauter dans les bras de Torborg. Après le match, le vestiaire des Expos a d'ailleurs été fermé aux journalistes pendant une bonne dizaine de minutes pendant que Loria faisait l'accolade à Torborg.

Il en a bien le droit, c'est SON gérant, SON équipe.

Et il s'est bien entouré. Son beau-fils est son bras droit; Beattie est son fidèle serviteur; Brad Arnsberg, l'instructeur des lanceurs, fait aussi partie de son cercle d'amis, Perry Hill est aussi un de ses choix. C'est lui aussi qui a voulu faire l'acquisition précieuse de Hideki Irabu, par exemple.

C'est son équipe, il a tous les droits. Jacques Ménard et les autres actionnaires québécois, lui ont cédé tous ces droits.

Et peu importe ce qui adviendra de l'équipe, qu'elle reste ou qu'elle parte, on est en droit de se demander de ce qui en adviendra sur le terrain.

Torborg nous a déjà confié que Loria lui téléphonait souvent pour discuter de matches qu'il regardait à la télé. Il allait jusqu'en faire la description. Un amateur donc qui donne des emplois à ses amis.

On peut se demander si la recette est vraiment bonne. On peut se dire aussi que Loria fait son petit George Steinbrenner. Ce dernier, qui est lui aussi un grand amateur et qui aime bien mettre le nez dans ce qui se passe sur le terrain, a eu au moins le bonheur de ne pas faire appel qu'à des amis, mais à des gens d'une grande compétence pour diriger son équipe.

Pour ce qui est de Felipe Alou, on n'a pas à s'en faire. Il sera grassement payé d'ici la fin de la saison.

L'an prochain, on le retrouvera à la barre d'une autre équipe. Ce serait un juste retour des choses qu'il puisse avoir sous ses ordres une formation capable de rivaliser avec les meilleures.

On ne sait pas si Alou peut conduire une équipe au championnat parce qu'il n'en a jamais vraiment eu la chance. Mais ce serait bien... juste pour voir, qu'on lui permette de le faire. Je suis prêt à parier qu'il se débrouillerait fort bien.

Et je pense qu'il pourraît se retrouver avec les Marlins de la Floride, si bien sûr les Marlins obtiennent un nouveau stade à Miami.

Tony Perez demeurera en poste avec les Marlins jusqu'à la fin de la saison. Par la suite, il pourrait bien volontiers céder la place à Alou, qui serait aussi populaire à Miami qu'il l'a été à Montréal. Les Marlins pourraient rapatrier son fils Moises, qui leur a aidé à remporter la Série mondiale.

Ce qu'il faut à Felipe Alou, c'est une équipe qui lui fera la promesse de garder ses jeunes joueurs de talents. A Montréal, ni Claude Brochu, ni Jacques Ménard, ni Jeffrey Loria n'ont jamais tenu ces promesses.