MONTRÉAL (PC) — Jeff Torborg ne se fait pas d'illusions. Il sait que le défi de remplacer Felipe Alou à la barre des Expos sera énorme. Il succède à un ami, mais il remplace une légende, l'homme de baseball le plus populaire à Montréal depuis "bien des lunes".

David Samson, vice-président des Expos, et le directeur général Jim Beattie ont en effet annoncé en conférence de presse, jeudi, au Stade olympique, que Torborg, ancien gérant des Indians de Cleveland, des White Sox de Chicago et des Mets de New York, avait accepté un contrat de trois ans pour ainsi devenir le 10e gérant de l'histoire des Expos.

Alou a été remercié de ses services même s'il avait encore en poche un contrat qui le liait à l'équipe jusqu'à la fin de la présente saison.

Torborg, un receveur, a évolué pendant 10 ans dans les ligues majeures avec les Dodgers de Los Angeles et les Angels de la Californie.

Mais il chaussera les souliers d'un homme qui a passé 27 ans dans l'organisation des Expos et qui a vu la direction démanteler sa formation année après année. Alou était gérant des Expos depuis le 22 mai 1992.

Torborg est de plus un ami personnel de Jeffrey Loria, principal actionnaire des Expos, et dès qu'il s'est pointé le nez au camp d'entraînement 2000 comme instructeur des receveurs, invité justement par Loria, les rumeurs ont commencé à circuler selon lesquelles il succéderait à Alou un jour.

C'est mardi que Loria, qui n'était pas présent à la conférence de presse, a contacté Torborg, un commentateur au réseau Fox, à son domicile de Sarasota en Floride, pour lui offrir le poste.

"J'étais en train de réparer des marches à l'arrière de la maison et Loria m'a demandé si j'avais encore le feu sacré, a dit Torborg. Je pense que ça ne se perd jamais. J'ai toujours cru que j'étais un privilégié. Je suis toujours un grand amateur, un fan de baseball et j'y travaille pour gagner ma vie."

Torborg connaît Alou depuis fort longtemps et il a avoué que c'était difficile que de prendre sa place. Torborg avait déjà succédé à Frank Robinson en 1959 avec les Indians et il a lui-même perdu son poste deux fois.

"J'étais très lié à Frank Robinson. Je lui ai dit que j'était peiné de prendre sa place, a dit Torborg. Mais Frank a riposté en me disant d'oublier cela, que je ne prenais pas vraiment sa place, qu'elle n'était plus la sienne de toute façon.

"Je sais à quel point Felipe était populaire et quel homme de baseball il est. Mais tout ce que je peux offrir est ce que je suis. C'est une journée excitante pour moi et mon épouse, mais c'est aussi une journée difficile à cause du départ de Felipe."

Torborg n'a pas géré dans les ligues majeures depuis la saison 1993. Mais il est demeuré dans le monde du baseball à titre de commentateur.

On se demande bien à quoi s'attendre de ce nouveau gérant.

"Je dois d'abord me faire connaître des joueurs, a-t-il admis. Ils ne me connaissent pas vraiment. Ils m'ont vu à la télé, mais peu d'entre eux m'ont vu en uniforme.

"J'aime les gars qui se dépensent. Je n'étais pas un très grand joueur, mais je n'ai jamais quitté le terrain sans être fatigué ou sans avoir sali mon uniforme. J'en demanderai tout autant de mes joueurs."

Pour ce qui est de la formation, il ne croit pas devoir y apporter des changements majeurs immédiatement.

"Il y a un très bon homme de baseball, un sage, qui a établi la formation de cette équipe de jour en jour depuis longtemps, a dit Torborg. Je ne vois pas comment je pourrais tout boulverser d'un coup.

"Je sais qu'avec les White Sox, par exemple, j'avais muté Frank Thomas au troisième rang et Robin Ventura au deuxième rang. Thomas était alors un jeune joueur et Ventura avait produit 100 points. Je ne sais pas si Vladimir Guerrero aiderait mieux l'équipe comme troisième frappeur. Mais pour l'instant, je ne changerai rien. Je suis tombé en amour avec cette jeune équipe au camp d'entraînement l'an dernier. Je pense qu'on peut réaliser de grandes choses."

En 1990, Torborg avait été choisi gérant de l'année dans la Ligue américaine quand il avait conduit les White Sox à un dossier de 94-68. Sa jeune équipe avait ainsi remporté 25 victoires de plus que l'année précédente.

Torborg a beaucoup de pain sur la planche et il devra se débrouiller avec une équipe moins talentueuse.