MONTRÉAL – Olivier Aubin-Mercier était en vacances au Costa Rica lorsque la nouvelle de sa mise sous contrat par la Professional Fighters League (PFL) a commencé à s’ébruiter. « J’avais prévu le voyage parce que ça va être intense pour les prochains mois », avait-il alors justifié en promettant de donner plus de nouvelles à son retour.

Aubin-Mercier, sa copine et sa fille ont pris leur vol de retour pour Montréal le 12 mars. La petite famille était en haute altitude quand les différentes instances sportives ont décidé, une après l’autre, de suivre l’exemple donné la veille par la NBA et de suspendre leurs activités.

« Au départ, j’avais envisagé d’annuler notre voyage. Dans l’avion, au retour, je me souviens d’avoir pensé que finalement, c’était pas si pire que ça. Et puis pendant les cinq heures qu’a duré notre vol, le monde dans lequel on vivait a changé. À notre arrivée, c’était tellement weird d’ouvrir nos téléphones et de voir tout ce qui se passait. »

Depuis, l’intensité qu’il anticipait à son retour au pays se vit dans un tout autre spectre. Dans le quotidien du combattant, « c’est pas mal l’opposé de ce que j’avais prévu », résume-t-il au jour 7 de la quarantaine qu’il s’est imposée.

Alors que son ancien patron, le président de l’UFC Dana White, défraie les manchettes pour son obstination à continuer d’aller de l’avant avec l’organisation de ses événements, Aubin-Mercier est toujours sans nouvelles de ses nouveaux employeurs. Et il n’est pas pressé d’en avoir.

Comme le format de la PFL diffère de celui des autres circuits d’arts martiaux mixtes – elle préconise un calendrier composé d’une « saison régulière » et d’un tournoi éliminatoire plutôt que d’une série d’événements indépendants les uns des autres – le Montarvillois ne s’attendait pas à se reprendre l’action avant le printemps de toute façon.

« Ils ont quand même du temps devant eux et je pense que c’est la chose à faire, d’attendre avant de prendre une décision. Je comprends que Dana ait senti la bonne affaire pour faire connaître son sport, mais je pense que ça peut entraîner des gros problèmes dans le futur, des grosses controverses. C’est comme un couteau à double tranchant. Les gens de la PFL, présentement, sont plus posés. Ils prennent ce qui se passe au sérieux. »

Aubin-Mercier, qui ne s’est pas battu depuis le mois de juillet dernier, se prépare donc à un scénario où il pourrait être sans combat pendant plus d’un an.

« Dans le pire des mondes, je ne recevrai pas d’argent pour un bout. Mais tout le monde est dans le même bateau présentement. Je ne vais pas me plaindre de ne pas recevoir de paye, pour vrai. On est tous dans le même panier et il faut travailler ensemble présentement. »

Le « Canadian Gangster », qui a publié une délirante vidéo de prévention sur ses plateformes de médias sociaux plus tôt cette semaine, envisage même d’utiliser les revenus générés par la diffusion de son podcast pour aider les travailleurs de la santé.

« On me demande de m’asseoir chez nous et de m’entraîner au chalet. Ma vie n’est pas difficile. Il y en a qui ont vraiment des gros mois qui s’en viennent. »

Du « prizefighting » à son meilleur

Malgré toute l’incertitude qui entoure son avenir à court terme, Aubin-Mercier parle avec enthousiasme de la suite de sa carrière. Ses épaules semblent libérées du poids des trois défaites consécutives qui ont marqué la fin de son association avec l’UFC et il ne retient visiblement aucune amertume de son divorce avec la compagnie qui l’a employé pour douze combats.

« Ça faisait un an et demi que je suivais la PFL avec beaucoup d’attention. J’aime beaucoup leur concept. Quand j’étais jeune, j’écoutais Bloodsport, la Conquête du Dragon d’or, Mortal Kombat. Ce sont tous des films qui mettent en scène des tournois. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui m’ont incité à commencer les arts martiaux », raconte l’ancien judoka.

Aubin-Mercier a tenu des propos surprenants lors de l’annonce de son embauche. Au micro du journaliste Ariel Helwani, il a affirmé que pendant deux ans, il avait caressé l’objectif secret de terminer son contrat UFC en force pour ensuite faire le saut chez PFL.  

Après mûre réflexion, il s’explique, mais ne se rétracte pas.

« Tu as raison, je ne sais pas ce qui serait arrivé si j’avais gagné mes trois derniers combats. Peut-être que l’UFC aurait pris mon image et que je serais devenu une superstar. Je ne sais pas ce qui serait arrivé. »

« Ce que je veux dire, c’est qu’on aurait pu signer une nouvelle entente avant la fin de mon contrat et on a décidé de ne pas le faire pour aller voir ailleurs. Après ça, je suis un grand fan des univers parallèles, mais je ne sais pas ce qui se serait passé. Et je ne sais pas quoi dire au monde qui ne me croit pas. Ce que je dis, c’est que j’avais un intérêt pour la PFL. »

L’entente entre le Québecois de 31 ans et l’organisation américaine a pris du temps à se matérialiser. « Assez pour que ça me stress », avoue-t-il. Mais maintenant qu’il a un contrat de plusieurs saisons en poche, Aubin-Mercier a hâte de se mettre au travail. Le calendrier de la PFL pourrait lui permettre de se battre cinq fois par année.

Les galas de la PFL sont diffusés sur ESPN aux États-Unis ainsi que sur TSN et RDS au Canada. Les combattants, contrairement à ceux de l’UFC, peuvent profiter de cette visibilité en affichant le logo de deux commanditaires sur leur uniforme.

Aubin-Mercier affirme qu’il touchera un salaire de base de 25 000 $ par combat s’il atteint la phase éliminatoire de la saison, avec une prime de 25 000 $ s’il se qualifie pour la finale. Le champion de chaque catégorie au terme de la saison reçoit un chèque d’un million de dollars.  

« C’est du prizefighting à son meilleur », s’excite le gaucher à la fiche de 11-5.

Le champion en titre de la division des poids légers de la PFL est le Brésilien Natan Schulte. Parmi les autres aspirants à sa ceinture en 2020, on retrouve notamment sur le site internet de l’organisation l’Américain Johnny Case et le Polonais Marcin Held, deux autres anciens de l’UFC.